Terre à ciel : constellations pour une poésie d’aujourd’hui

Fondée en 2005 par la poète et passeuse Cécile Guivarch, Terre à ciel s’est rapidement muée d’un carnet personnel en une revue collective ; aujourd’hui, elle est animée par une équipe élargie (Roselyne Sibille, Sabine Huynh, Clara Regy, entre autres) tout en gardant son principe d’"hospitalité artisanale". La devise qui barre sa page d’accueil — « Poésie d’aujourd’hui » — dit bien son ambition : refléter, chaque semaine, la pluralité des voix contemporaines, qu’elles viennent du terroir francophone ou du vaste « voix du monde ».

L’interface privilégie la lisibilité : menu latéral fixe, police sans‑sérif claire, et rubriques hiérarchisées comme autant de portes d’entrée - Un ange à notre table : publication de poèmes inédits d’un auteur invité, souvent accompagné d’un bref autoportrait, Terre à ciel des poètes : fiches bio‑bibliographiques fouillées, nourries d’entretiens, Voix du monde : traductions inédites, parfois multilingues, L’arbre à parole : focus sur l’oralité (lectures, vidéos, podcasts), Hep ! Lectures fraîches ! – chroniques critiques courtes, attentives aux parutions discrètes (rubrique apparue en 2023), Paysages, Bonnes feuilles, Mille‑feuilles, À l’écoute ... autant de ramifications qui organisent la revue comme un herbier vivant plutôt qu’un sommaire figé.

Chaque page s’achève sur un bloc Terre à ciel a reçu, véritable liste de dépôts en librairie qui tient lieu de veille bibliographique.

Depuis 2019, l’équipe publie, en marge du flux continu, des dossiers thématiques numérotés. Les plus récents donnent une belle image de ce travail remarquable : La poésie ne fait pas genre (avril 2024), Le poème nous fait signe (juillet 2024), Pour que la vie jaillisse (décembre 2024).

Ces dossiers servent d’instantanés critiques : un éditorial, une brassée de textes, un bouquet d’articles critiques et d’entretiens. Le n° 21, dont le titre emprunte à René‑Guy Cadou, s’ouvre sur une méditation : « Quoi de plus intense, de plus secrètement vivant ? » avant de convoquer Ron Rash, Fabienne Ronce, Sabine Dewulf et une sélection d’éco‑poètes autour de la question du souffle vital. Le sommaire, volontairement foisonnant mais lisible grâce aux ancres internes, alterne poèmes, notes de lecture, et Lignes d’écoute — rubrique où Sabine Dewulf fait dialoguer un livre et une œuvre d’art sonore.

Enfin, et pour rendre compte de la spécificité de cette belle revue, Terreàciel se définit d’abord comme une revue‑site : son architecture arborescente privilégie la circulation par rubriques, ce qui autorise des mises à jour constantes et l’ajout d’entrées au fil de l’eau. Sa temporalité combine un flux hebdomadaire de publications (lectures fraîches, inédits, entretiens) et des dossiers numérotés paraissant deux fois par an — les n° 19 à 21 ont jalonné la période 2024‑2025. A cette richesse de contenu s'ajoute une ouverture manifeste : la rubrique Voix du monde  multiplie les traductions inédites tandis que Un ange à notre table accueille de jeunes auteurs francophones, créant un dialogue constant entre horizons linguistiques et générations. Pilotée par une équipe collégiale et bénévole, chaque section porte la signature d’un responsable (critique, traducteur, artiste sonore), gage d’expertise et de diversité de points de vue. 

Polyphonie donc (centaines d’auteurs indexés), porosité des genres (poème, essai, image, son),  chronique de l’actualité éditoriale et aventure d’un laboratoire poétique permanent : Terre à ciel compose une géographie sensible où le lecteur circule, non pas de numéro en numéro, mais « de la terre au ciel » — c’est‑à‑dire de la rumeur du monde au battement intime du poème.