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Claude Serreau, Réviser pour après

En publiant ce nouveau recueil, il dit « mettre un point final » à ses « prétentions d’écrire ». Le Nantais Claude Serreau (91 ans) est un poète fécond. « Face au grand âge devenu », il annonce vouloir tourner la page. Mais peut-on se passer vraiment du « démon » de l’écriture ? Le concernant, plutôt que de « démon », il faudrait parler de « bonheur » de l’écriture. Son nouveau et dernier livre le démontre une fois de plus.

« J’engrange de l’amour/tout ce qui se partage/un soleil habité/de ces rires majeurs/où le matin s’invente ». Claude Serreau est du côté du « oui » à la vie. Il l’exprime notamment dans une série de « Dix poèmes à C… ». Mais ce chant d’amour, que l’on suppose adressé à l’être aimé, embrasse tout ce qui palpite « dans l’instance des jours ». Les accents fraternels du poète rejoignent, une nouvelle fois, les intonations de René Guy Cadou à qui il fait allusion dans l’un de ses textes (« Son corps avait gardé/d’enfance sous la guerre/une haine du froid/de l’ombre et de la nuit… ») Claude Serreau, lui aussi, opte pour la lumière « égarée quelque part/vers l’ouest ». Il entend, comme il l’a toujours fait, poursuivre « un chemin de ferveur/sans failles ni hasards ».

Claude Serreau, Réviser pour après, Des sources et des livres, 90 pages, 15 euros.

Des souvenirs d’enfance reviennent aussi par bouffées (« Mon enfance est à tout le monde », écrivait René Guy Cadou). « Dans la Vendée de ce temps-là/patrimoniale bocagère, note pour sa part Claude Serreau, Le clocher toujours s’égrenant/sur les âmes et les clairières/on vivait de petite épargne ». Ailleurs surgissent des sensations olfactives : « L’odeur des autocars/m’est restée d’une enfance/au bord de la grand-route ». Mais le poète ne s’attarde pas. S’il regarde dans le rétroviseur, c’est plutôt pour effectuer une forme d’introspection en forme de bilan. « Lire écrire afin d’espérer/qu’il en reste quelque chose/un cahier un livre épargné/retrouvé au hasard des ans/sous la poussière d’un grenier ».

Claude Serreau ne cultive pas la nostalgie, ne ressasse pas des regrets. Il cultive plutôt l’art du détachement. « Mon âge a ses musées/solitaires et vains ». Il nous parle de sa « vie maraudée » et livre « au soir du saut dans l’inconnu » une forme de testament littéraire pour « échapper au pouvoir des ombres ». Plus encore, il nous indique un chemin que ne renieraient pas les plus grands sages. « Chaque instant sera bien à prendre/au foyer du cœur loin du bruit ». Et si ce sont vraiment les derniers mots du poète, accueillons-les avec joie et gravité, manuscrites à la dernière page de son livre : « Ecoute les violons du monde descendre/au grave de leurs harmonies/quand c’est l’heure et que tout est dit ».

Présentation de l’auteur

Claude Serreau

Claude Serreau, est né à Les Sorinières en 1932. Enseignant, il a publié une quinzaine de recueils, depuis Raisons élémentaires , prix Théo Briand, en 1966, aux éditions Traces que dirigeait Michel-Francois Lavaur, à la revue duquel il a collaboré pendant cinquante ans après avoir collaboré à la revue Sources créée par Gilles Fournel dans les années cinquante. 

© Crédits photos (supprimer si inutile)

Bibliographie

Publications aux éditions Traces :

Raisons élémentaires, 1966, prix Théo Briand
Réflexion pour la nuit, 1969
Récrire le temps, 1972
Risquer la lumière, 1975
Référence la terre, 1978
Rechant et mémoire ou les mots exsangues, 2002
Rumeur du vide, 2003
Rien ou presque, 2004
Récitation des rites, 2006
Rémanences, 2008
Réfractions 2010

Aux éditions le Petit Véhicule :
Recension, mini-anthologie, 2006

Poèmes choisis

Autres lectures

Claude Serreau, Résurgence ou les parenthèses du soir

Résurgence : « réapparition à l’air libre, sous forme de grosse source, d’eaux infiltrées dans un massif calcaire » (Dictionnaire Larousse). La poésie de Claude Serreau est de cet acabit-là : elle fait surgir à la surface [...]

Claude Serreau, Réviser pour après

En publiant ce nouveau recueil, il dit « mettre un point final » à ses « prétentions d’écrire ». Le Nantais Claude Serreau (91 ans) est un poète fécond. « Face au grand âge devenu », il annonce vouloir tourner la [...]




Claude Serreau, Résurgence ou les parenthèses du soir

Résurgence : « réapparition à l’air libre, sous forme de grosse source, d’eaux infiltrées dans un massif calcaire » (Dictionnaire Larousse). La poésie de Claude Serreau est de cet acabit-là : elle fait surgir à la surface des pages des émotions enfouies parfois frappées du sceau de la douleur et du chagrin, pour en faire un bouquet où transpire un inaltérable appétit de vivre et de dire le monde dans sa beauté.

Le poète n’avait-il pas parlé dans un précédent recueil de « l’humus fertile de nos deuils » (Racines et fragments, Des Sources et des Livres, 2018). Il réédite aujourd’hui cette approche dans un recueil plus secret que le précédent, comme auréolé d’un halo de mystère.

Il commence le titre de tous ces livres par la lettre R. Ce n’est pas un hasard. Claude Serreau vit et écrit dans la fidélité à René Guy Cadou. Et il sème dans ses livres des petits cailloux qui nous ramènent au poète de Louisfert. « Maintenant les trains en partance, écrit Claude Serreau, n’assurant qu’au rythme du cœur/René Guy dirait à Hélène/au moment d’ouvrir ses cahiers/que les horloges n’ont qu’un sens/pour imprimer le fil des heures/sur les murs blancs de l’espérance (…) « J’ai certitude d’avenir/quelques saisons peut-être pas », poursuit-il. Le temps file, en effet, pour Claude Serreau (né en 1932). Il file dans la douleur d’une absence : « Chaque nuit/retrouver/le vide bien présent/l’inquiète solitude ».

Claude Serreau, Résurgence ou les parenthèses du soir, Des Sources et des Livres, 106 pages, 15 euros.

Dans une préface éclairante, Marie-Laure Jeanne Herlédan nous dit que Claude Serreau « déplie son long poème à la vie, l’amour, la mie, la mort ». Poème à « celle qu’il a accompagnée et veillée ». Le poète parle à l’absente, pousse son chant : « Je voudrais te crier/autant qu’il se pourra/t’envelopper te dire/je t’aime et t’ai aimée//puisqu’enfin avec toi/l’éternité s’étire/une fois recréée ».

Cette toile de fond de la séparation n’estompe pas la « marée de vie » ni l’espoir « qui renaît des souterraines eaux ».Car dans l’univers de Claude Serreau (fait de résurgences et de nappes phréatiques) la nature est toujours prête à « dévider sa toile ». Sous sa plume on découvre « un rideau coloré/cent arbres et mille fleurs/comme la mer à l’ouest/sans cesse élaborée/sous d’obscures étoiles ».  Et quand le printemps est là, « on voit au mois de mai/Vénus et son parterre/d’étoiles revenues/au ciel donner le change ».

Présentation de l’auteur

Claude Serreau

Claude Serreau, est né à Les Sorinières en 1932. Enseignant, il a publié une quinzaine de recueils, depuis Raisons élémentaires , prix Théo Briand, en 1966, aux éditions Traces que dirigeait Michel-Francois Lavaur, à la revue duquel il a collaboré pendant cinquante ans après avoir collaboré à la revue Sources créée par Gilles Fournel dans les années cinquante. 

© Crédits photos (supprimer si inutile)

Bibliographie

Publications aux éditions Traces :

Raisons élémentaires, 1966, prix Théo Briand
Réflexion pour la nuit, 1969
Récrire le temps, 1972
Risquer la lumière, 1975
Référence la terre, 1978
Rechant et mémoire ou les mots exsangues, 2002
Rumeur du vide, 2003
Rien ou presque, 2004
Récitation des rites, 2006
Rémanences, 2008
Réfractions 2010

Aux éditions le Petit Véhicule :
Recension, mini-anthologie, 2006

Poèmes choisis

Autres lectures

Claude Serreau, Résurgence ou les parenthèses du soir

Résurgence : « réapparition à l’air libre, sous forme de grosse source, d’eaux infiltrées dans un massif calcaire » (Dictionnaire Larousse). La poésie de Claude Serreau est de cet acabit-là : elle fait surgir à la surface [...]

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