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Michel Gendarme, LES ENFANTS DE MOINS DE DOUZE ANS VOLENT !!, extraits

Le temps est calme

Leurs ailes sont des poisons invisibles
Des pinsons variables dénotent les écorces
L’aire est tendre la chair hélas se laisse prendre

La vitesse du vent est de un nœud
L’enfant maîtrise dans la coïncidence
Maisonnette de sagesse
Lit de poupée réglée
Les enfants sont des songes
Leurs ailes, des poisons d’avril

La fumée monte droit

 

Il y  avait un arbre quand c’était un jardin non pas une entreprise un super commerce une super usine âge de longtemps des longues rives folâtrer pour non sens des lisières c’était à l’ailleurs on pourrait le penser c’est autorisé de rêver une écorce suffit pour une fourmi suffit à peupler le cerveau de jouets

 Charme arbre de plaine à feuilles gaufrées caduques vit sur sol argileux ou calcaire ne dépasse pas vingt mètres se taille facilement en haie bois blanc grisâtre altérable à grain très fin aubier indistinct cercles d’accroissement sinueux rappelant le tronc cannelé résiste particulièrement bien au fendage et à l’usure par frottement

Etals de bouchers et billots vis et engrenages des pressoirs anciens moyeux de roues instruments aratoires maillets rabots serre-joints navettes de métiers à tisser formes de chaussures quilles boules pâtes à papier excellent bois de feu pour les fours à pain

Pourquoi tant de charmes ?

 

 

On ressent une très légère brise

Dort dans la maison l’épaisse toison dort
Dort à l’abri l’apaise
Les enfants ont des ailes de papier
Des songes de géants des ailes

La fumée indique la direction du vent
Où vas-tu vas là

À lit à rouler froissé défroissé enroulé
Au frais à faire du chaud des sinuances de l’esprit
Se parer de drap d’humeur mais je me sens mieux comme ça
S’envelopper d’urine chaude dans l’urine chaude
L’enfant dans le marécage de ses rumeurs nocturnes

Urine

La vitesse du vent est de un à trois nœuds

 

 

 

 

 

Pour un refuge planté là sans regrets éternels des larmoyantes strophes les larmes des amants démunis désamiantés un arbre comme un abri anti-automnique des malédictions tectoniques dans les boîtes ils ne connaissent pas cela les piquants sous les fesses à la plante des pieds courir nu au clair de la lune ô encore une fois courir nu sous le clair de ta lune

 Châtaignier arbre de demi-lumière à feuilles caduques atteignant trente mètres sensible au froid pousse sur un sol riche perméable et non calcaire bois hétérogène beige ou brun très durable aux intempéries aubier distinct blanchâtre altérable très bonnes résistances mécaniques en flexion et compression assez fissible

Le bois le plus riche en tanin utilisation en tonnellerie par fendage les tiges fournissent des clôtures de l’emballage des cercles de tonneaux et de merrains les bois ronds sont employés pour les manches d’outils montants d’échelle piquets de clôture ou de vigne les sciages sont utilisés en menuiserie parqueterie et charpente mauvais bois de feu les sous-produits sont transformés en panneaux de fibres

Suivre le châtaignier

 

 

On sent le vent au visage on sent
Caresse douce ma mousse te pardonne
Sonne l’heure ma douce
L’enfant n’est plus à vendre depuis longtemps
Il le sait
Connaît un certain prix

La vitesse du vent est de quatre à six nœuds

Il se lève de cauchemars
Derrière la porte il y a toujours une surprise qui l’attend
Marre marre
Viens viens qui en voudrait
Pendant que les songes se font un placard
La vérité sort de la poubelle 
Elle

La brise est légère

 

Ils ne marchent pas comme nous ont toutes sortes de réseaux invisibles souterrains d’âmes argileuses planques à foutre de silice ils craquellent les distances et surfaces se font dépendances des cavernes avalées tu avales des couleuvres quand tu te couches sous les fougères tu respires un autre paradis

 Aulne arbre dont le port ressemble à celui des résineux pousse au bord de l’eau en pleine lumière peut atteindre trente mètres feuilles caduques d’aspect visqueux bois rosé à grain fin aubier indistinct se polit bien résistance mécanique faible presque imputrescible lorsqu’il est immergé

Piquets de clôture en sol marécageux modèles de fonderie tournerie sabots jouets brosses bobines boutons bols cuillères bon bois de feu pour la verrerie contreplaqué pâte à papier panneaux agglomérés Venise est bâtie sur pilotis en aulne

À l’aulne des lueurs

 

 

 

Tiens une petite brise
On se dirait des mots dans des cachettes d’allumettes
Chouette
Des jeux mauvais rituels des dates assouvies digérées
Hibou
Recrachées
Pour lui faire jouer un autre jeu
À l’enfant

Qu’importe il plante des fanions des éléphants de vapeur
Saute dans la contemplation
Ça pique

La vitesse du vent est de sept à dix nœuds

Ça pique
Se goinfre déjà de futur

Alors les drapeaux flottent

 

Ils collectionnent les sons s’attribuent des symphonies dédicaces écorcées des craquements de nuits de noces des succions de serrements des approches en écho ils résonnent de feutres de glissements en foutoirs mélange végétal en folie rapprochée là juste au-dessus se créent les sons du monde ceux de toutes les langues le babil forestier

 Trois cents espèces sont connues allant du plus petit arbre espèce naine de montagne dix centimètres de haut un centimètre de diamètre à trente ans au saule blanc des bords de rivières en passant par le saule pleureur poussent sur sol humide en pleine lumière bois blanc à gris rose léger et mou pelucheux

Charpente de qualité secondaire volige emballages légers boîtes à fromage manches rustiques battes de cricket jouets perches et échalas claies vannerie grossière chevilles et dents de râteaux meilleurs liens pour la vigne les toits de chaume nasses et petit mobilier des feuilles et de l’écorce on tire l’acide salicylique remède dès le dix-septième contre la fièvre des marais

En équilibre sur le saule

 

 

 

 

 

Ô que la brise est jolie si jolie jolie
Drapeau orange

Grossir ce qu’on lui a donné son travail est tumeur
Boursouflure du langage enflure des mots
Il triture ses bouts de peau arrache des dents aux livres
Se fout de la peinture dans à l'intérieur
L’enfant bourse

Le sable s’envole
Le sable ça veut dire l’océan la plage loin
Le sable s’envole
L’enfant et ses croûtes pleines de grains passés présents futurs loin
Lèche et mélange et titouille vit avec ça
Bourse

La vitesse du vent est de onze à seize nœuds ah ! quand même !

 

 

Boivent ce qu’il y a d’humide dans ce monde faut bien chercher la goutte rompre la solitude molécule de calcul ils incrustent la soif c’est une racine aussi supportent l’abstinence le sacrifice la tradition du jeûne mais qu’on ne leur coupe pas la route un monde ça se construit les rhizomes sont à la recherche tout le temps

 L’hêtre est grand de trente cinq à quarante mètres ne dépasse guère trois cents ans préfère l’ombre les sols riches et légers l’humidité atmosphérique de la Suède à l’Italie bois fin homogène sans aubier distinct couleur variable du blanc au rougeâtre se cintre et se ponce très bien assez cassant en flexion peu durable n’est pas un bois de construction

Ébénisterie contreplaqués spéciaux bois comprimés-bakélisés mobilier scolaire de cuisine établis étals articles de ménage brosses formes de chaussures sabots semelles de galoches jeux et jouets bobines pelles de boulanger boisseaux sièges et porte-manteaux pâte à papier textiles artificiels bois de feu traverses de chemin de fer

L’hêtre de la question

 

Présentation de l’auteur

Michel Gendarme

Textes

Michel Gendarme est membre de la Poéthèque du Printemps des Poètes et de la MEL. Invité d'honneur du Village en Poésie (label Printemps des Poètes) de Limeyrat (24) en 2016. La Maison de la Poésie de Poitiers l'invite à son Festival en mai 2018. Il est programmé au Festival Voix Vives de Méditerranée en Méditerranée, à Sète en juillet 2018.

Il est publié par de nombreuse revues dont : Terre à ciel (en ligne), Recours au poème (en ligne), Ouste, Décharge, Verso, Arts et Résistances/Gros Textes, Le Portulan Bleu, Interventions à Haute Voix, Comme en Poésie...

Parmi ses recueils : « cadeau, une histoire d'amour », Gros Textes 2018 ; « Mémoire Méduse Requiem », avec CD, co-écrit avec Hervé Brunaux, Patrick Chouissa, Gros Textes 2016; « Exquises Esquisses », 20 dessins de José Corréa, Gros Textes 2014; « Ceux qui ne connaissent pas le corps des autres », avec CD, Gros Textes 2010; « des rivages », pastel de Roseline Granet, Gros Textes 2006; "Les mots invisibles" éd. du Non Verbal 2000 ...

Appelle-moi poésie produit en 2016 un vidéo-clip de son poème « Le fils du muet n'a pas la parole » (extrait), également publié dans le recueil collectif Langue Vivante 2 aux éd. LansKine 2018.

Il participe à de nombreuses performances et lectures avec les artistes, poètes, musiciens, plasticiens, danseurs, Hervé Brunaux, Delphine Barbut, Michel Brand, Patrick Chouissa (avec qui il invente l'installation Le Poéticomatophone), Thomas Dejeammes, Natacha Muslera, David Chiesa, Hiroshi Okazaki, Jean-Sébastien Mariage, Inna Maaimura, Catherine Jauniaux, Sylvain Roux (sound painting), Maurice Moncozet, etc.

Il est également auteur dramatique et romancier.

 

http://ecla.aquitaine.fr/Ecrit-et-livre/Annuaire-des-professionnels/Auteurs/Gendarme-Michel

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