Cette poésie par­le de ce qui est en lisière, de ce qui peut être vu depuis un refuge du point de vue d’un être indéfini, caché, par besoin, par survie Son refuge est une forêt dans laque­lle il enfouit sa vie Dans laque­lle il s’en­fuit De laque­lle il ne peut s’en­fuir vrai­ment Alors il longe ce qui le sépare des hommes Les sons, les allures, les rires, les gestes, les mots séparent Voir sans être vu, enten­dre sans être écouté, jouer sans y être appelé L’être mau­dit a pour lui la con­fes­sion intérieure et les actes de soli­tude Cette poésie exprime la crainte que le monde atteigne par trop de folie l’être démuni de naissance.

Aver­tisse­ment : les mots entre par­en­thès­es ne sont pas lus, mais leur présence est néces­saire, les mots en italiques restent ainsi.

10

ain­si arriv­er marais et flaques trou­ver ramass­er inven­ter des choses bruits des rayons lumière dans les yeux devenir petit minus­cule c’est le silence de l’eau avec des éclats de cha­toiement des odeurs de lune alors marcher par l’en­nui les dents mor­dent ma langue marcher par l’en­nui les dents cassent en morceaux marcher par l’en­nui bris­er des branch­es (cass­er) rompre des planch­es fouler les orties mas­sacr­er les orties les orties enne­mies tranch­er les têtes puis les corps écras­er les pouss­es admir­er le lieu du com­bat s’as­soir sur une souche pleur­er là sans savoir sans eau qui coule, dans nuit atten­dre dans cabane demain je grimperai en haut des arbres voir le soleil admir­er plaine le clocher du vil­lage vers l’é­cole pren­dre route vers sur la grande route vers sur la très grande route noire route dess­inée (de) les lignes blanch­es zozotantes (ou)… longues par­fois (très)… dessous les arbres saisir les nuages

11

les mains de l’homme de fer la poigne empoign­er sec­ouer sec­ouer sec­ouer la souf­france ça com­mence un jour jour pré­cis l’in­stant de brute ça devient brute c’était mais devient alors (et) ça s’ap­pelle la la brute coups le mal gri­maces cas­sures brisures rien à bris­er le rien qui dit qui fait ça suf­fit à tuer ça du bon­heur on est dans bon­heur puis d’un coup frayeur le corps meurt de ça il meurt le mou­ve­ment meurt la grâce quand elle et qu’elle la grâce non non plus jamais plus élé­gance… par­fois si encore un peu elle danse en elle dernière joie joie… dans dans cabane je vois encore (sa) la joie le vent des robes elles tournoy­aient je riais… dans forêt les arbres dansent c’est elles et chantent… je ralen­tis je freine je stoppe comme si comme si je restais je moi dans le mou­ve­ment de ses robes

12

ils gag­nent le ter­rain man­gent la terre bonne béton­nent goudron­nent ça on sait ils arrivent avec leur vitesse sûrs des moteurs de vie la leur une mécanique d’anges anges détournés de l’at­tente déjouée leur esprit des anges tor­dus (des) anges per­vers­es des anges ont ils ont mangé la loi les cathé­drales elles pro­tè­gent leurs mandibules croch(ues)ets les gar­gouilles diri­gent recru­tent repèrent crachent les petits je je les appelle les petits ils cav­a­lent alors aux ordres aux ordres je me suis réfugié oui un réfugié ne plus quit­ter ça la quié­tude d’être dans le silence mais pas le silence la soli­tude mais pas la soli­tude être immo­bile mais pas immo­bile je suis mes mots mes mots mes mots

13

je fais plus vite plus mieux (que) le temps du jour avant le jour pour être prêt (avant) tou­jours avant tou­jours j’é­claire tout les étoiles qui les appelle(nt) qui le matin avec le réveil ray­on le réveil soleil du chas­seur du luisant des nuits avec des voyelles avec des con­sonnes (à) avec des sons la quié­tude d’être dans le silence mais pas le silence la soli­tude mais pas la soli­tude (que) le temps les vagues de géant j’en ai devine mes mots mes mots mes mots mes mots

14

je ne songe pas pas à moi pas à moi mais pas à moi un barouf du barouf du fra­cas même l’or­age ne fait pas ça ô rage ma colère je ris quand l’é­clair je ris quand ton­nerre quand la grêle je me marre j’en­tends le cristal archange déluge de chant d’étoiles 

ici l’eau fait ça si on veut sur des bateaux de glace sur des voiliers de l’été feuille de noix coquille radeaux de chêne plouf plaf pluf toc coulé re-coulé dépan­né sauvé font ça les livres aux couleurs inven­tent les mares ce qu’on fait là 

ça explose là-bas je sais mille bombes dix mille j’en­tends plus j’en­tends plus (geignent) ça geint les ruines ruines décharnées les corps fumées fan­tômes aux écoles les sons les rires les sou­venirs muets j’en­tends plus le chien le chat vente vent ce n’est plus un souf­fle en haleine, charogne, les nuées les mouch­es des mon­ceaux des monceaux

au bord (de) regarder la peau de l’eau atten­dre l’eau à soi atten­dre l’eau à soi c’est ça mais là-bas immense incroy­able immense les yeux ne s’ar­rê­tent pas le loin est loin loin loin sans jamais d’ar­rêt tir­er l’eau à soi la plage l’im­mense mare salée c’est ça

des mon­ceaux gémis­sants des vers, plein, le ven­tre ouvert geint et ça coule un liq­uide du fiel noir ça coule un son dia­ble sa peau écorchée peu à peu ça s’ébruite ça se désha­bille en sang cail­lotte et bulles ça pour­rit avec des sons bruits de ça ça pour­rit sur les champs de ça une guerre les nuées car­il­lon­nent de leurs ailes il suf­fit d’elles (de) elles sept mouch­es pour un nuage un silence ça n’ex­iste plus

(et) je ramasse aux champs les chutes de voix célestes

15

gouttes qui font ding dong
poings défaits mains ouvertes
posées sur la terre posées vers le ciel
mains de gouttes (clig­nent) de chatouillis
mains libres de pluie de gouttes mains nénuphars
des mains libellules

il me reste la guir­lande du rêve
ange grenadine
elle est venue là et
elle chante rit
je mire la lumière dans ses yeux
stop
puis les mots les gestes
stop
rien
juste dans l’éclat
juste un éclair

nous aurons les gestes min­i­mum pul­sa­tions infimes les sons du cœur des vais­seaux à fleur de peau avec des fleurs les toi­sons d’or

il y a une vie qui bouge partout sous les écorces dans un cail­lou ça grouille même à la queue de la comète

16 et 17

grand arbre mon ami je t’embrasse mais tu grattes

une bête sent la four­rure la terre feuille sauvage (d’)étoiles filantes incan­des­centes dans le corps les yeux lâchent des bal­an­celles stop la magie stop elle par­le elle sourit bouge ne fait plus la lumière (par­le s’en­fuit) explique racon­te elle ment ajoute ça mul­ti­plie ça sous­trait elle addi­tionne elle divise (perd je perds) elle mon­tre sa tête ses bras ses jambes sa chair rose ses yeux bruns ses cheveux tous frisés elle met du bleu des bleus sur ses ongles du vert sur les orteils bijoux au cou à la cheville (les doigts) des bijoux (les) dia­mants avec de l’or encore les améthystes et les rubis encore les émer­audes (et) en chrysalide

elle cache puis elle laisse une trace quand par­tie loin elle dis­parue une bague comme en toc tic toc accrochée dans le ray­on soleil con­tre la pen­d­ule tic tac j’at­tends un mirage sans lumière je plie et je replie bras jambes corps têtes pieds mains lesoreilles même ferme tout ça et pose ça en rond sur les fougères oranges

des mil­lions et une four­mis bavassent elles tor­turent le cadavre encore dans la vie elles (déchirent) découpent arrachent (piéti­nent acid­i­fient) per­cent et boivent et ron­gent, le cadavre hurle des faux cris, (ce sont) elles qui tchatch­ent qui mon­tent au ciel le (un) vrom­bisse­ment des maux humains les bouf­fent les digèrent les crachent en sons incroy­ables tuent les oreilles

moi j’en­tends tout ça assis moi plié con­tre l’ar­bre (j’)écoute les peurs humaines toutes les ter­reurs mon­di­ales de la nuit mod­erne je me plaque con­tre le tronc (j’)ouvre grand ma gueule et (je) mords l’arbre

un hel­lé­bore de fin d’hiv­er (elle) tombe dernier(s) ®appel(s) (l’)avant le (à) présent

 18

donne-moi de la gai­eté l’u­nivers (en) dans la poche une pierre un pétale une écorce donne-moi que ça et tou­jours que ça chante des instants de tré­sor à garder sirot­er l’été réchauf­fer l’hiv­er je fix­erai la lune je peindrai la lune je la frôlerai la lune elle me fera une note sus­pendue en atten­dant que le requiem s’élève

19

le maître me donne à moi (moi) con­tre le radi­a­teur la bonne place c’est (ce) qu’il faut trou­ver tou­jours avec des gom­mettes (et des) les images les mots des autres les addi­tions des autres ah les réc­i­ta­tions ah les réc­i­ta­tions les mots des réc­i­ta­tions les images des réc­i­ta­tions écho des mots des réc­i­ta­tions ah les images des réc­i­ta­tions  ah les images des réc­i­ta­tions longtemps en écho même en récréa­tion écho des images et des mots à dessin­er sur le sol des faux mots des fauss­es images

allongé je regarde le ciel venir établir l’or­dre je croy­ais que la terre elle allait vite si vite quand le vent et ça filait dans le ciel les nuages ils défi­laient si vite sans bruit le vent si mais les nuages non ils imi­taient les sons des songes m’emmenaient loin dans la terre à l’intérieur(e)

 20

tu veux jouer aux billes je suis bon aux billes (bonne bille) (bonnes billes) le cham­pi­on peu s’af­fron­tent je pique toutes les billes (car cham­pi­on) peut pas per­dre car cham­pi­on le ter­rain con­nu grat­té du regard prom­e­nade des doigts du doigté paf la bille dedans au pied de la racine (un) tilleul (doit) dix billes vingt billes gag­nées les belles (billes) agates (belles) bril­lent elles s’a­mon­cel­lent petite vasque au pied de l’ar­bre nid de billes richesse des lumières met­tre la bille entre les doigts s’éblouir au soleil il y a des mon­des là-dedans si je bouge si je tourne des mon­des mag­iques des planètes inter­dites (seules con­nues seules) je les gagne tou­jours alors per­dent déçus eux pleurent eux jalousent eux voudraient les billes les planètes les cieux du(e) magi­cien jamais me les pren­nent mes agates eux boudent s’éloignent ne jouent plus jamais (longtemps longtemps) car eux savent mon armée mes galax­ies de couleur

mous­sail­lon, à l’abor­dage de la vie ha ! ha ! tout droit, courir, sauter, berlinguer dans tous les sens ! bourli­cot­er avec espoir, c’est quoi (l’espoir) ? la peau s’éveille ! les fan­tômes (ils) rapetis­sent ! sym­pa ! belle journée ! ce sera comme ça, avec le cœur ! vas‑y mets(-y) la joie !

 

 

 

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