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Barry Wallenstein, Tony’s blues

Tout est insolite dans ce minuscule recueil de 12 cm sur 16,5 cm de l’éditeur « Pourquoi viens-tu si tard ? »

Seize poèmes de Barry Wallenstein sont sélectionnés par la poète-traductrice Marilyne Bertoncini. Qui est donc ce Barry ? Un poète radical américain spécialisé dans la « drastique dislocation ». Si radical qu’on ne sait trop ce que Barry disloque, sans doute notre french vision du monde... Tous ses poèmes concernent un certain Tony, un Américain marginal. La traduction de son périple est une prouesse réussie de jargon à jargon. Tony donc, je reprends, s’adresse à sa mère, à son père (un travailleur des abattoirs qui lui fait traverser dans l’enfance « une rivière de sang »), à son créateur (His creator) et tout le tintouin. Il a ses préférences à lui (dont fraises à la crème et bordel) et sait « différer » son rêve. Son quotidien parfois teinté de fiction : le tailleur Squeaky  « fait des manteaux / qui couvrent les crimes » et offre à Iris 0’ Fay « une robe » où il a « cousu un sourire ».  Lu dans la langue originelle, ça rythme, ça pulse (multiplication des tirets longs de coupe préservés dans la traduction) comme un phrasé de jazz.

Barry Wallenstein, Tony’s blues, poèmes choisis et traduits par Marilyne Bertoncini, gravures Hélène Bautista, 92 pages, Edition Pourquoi viens-tu si tard ? mars 2020, 10 €.

De fait, la lectrice lit d’abord in american tous les poems by Barry avant d’accéder enfin à leur traduction réussie. Découvrir ce gars US qui a le « martel en tête » comme dirait la traductrice (Tony takes a hammer to his head) » n’est pas une mince affaire. « T’es un beau gros salaud de ta mère », traduit-elle pour un « slick / sick motha hubba ».  De poème en poème, on arrive au jour « où rien ne va plus », où tout merde en quelque sorte. Est-ce la veille du crime annoncé dans le poème suivant. « Tony rassemble tous les possibles marginaux de la condition humaine, précise Chantal Dupuy-Dunier dans la postface. Être poète en fait évidemment partie ». Comme il se voit lui-même, Tony est « un marcheur, un fonceur, / un sauteur ». Si on le plonge dans l’eau, il nagera et si on le met KO, « il fera dodo ». Un bel esprit de contradiction, somme toute !

Les eaux-fortes en camaïeu aquatinte grisé, d’Helen Bautista inventent un personnage solitaire qui se fond dans la brume, s’endort sur son ombre ou se détriple au hasard des pages. Une évanescence opportune !

Présentation de l’auteur

Barry Wallenstein

Barry Wallenstein is the author of eight collections of poetry, the most recent being At the Surprise Hotel and Other Poems [Ridgeway Press, 2016] and Drastic Dislocations: New and Selected Poems [New York Quarterly Books, 2012].  His poetry has appeared in over 100 journals, including Ploughshares, The Nation, Centennial Review, and American Poetry Review. 

Among his awards are the Poetry Society of America’s Lyric Poetry Prize, (l985), and Pushcart Poetry Prize Nominations, 2010, 2011. He has had resident fellowships at The Macdowell Colony, Hawthornden Castle in Scotland, Fundación Valparaiso in Spain and Casa Zia Lina on Elba, Italy.

A special interest is the presentation of poetry readings in collaboration with jazz.  He has made seven recordings of his poetry with jazz, the most recent being Lucky These Days, to be released by Cadence Jazz Records in April 2012A previous CD, Euphoria Ripens, was listed among the “Best New Releases” in the journal, All About Jazz (December 2008).

Barry is an Emeritus Professor of Literature and Creative Writing at the City University of New York and an editor of the journal, American Book Review.  In his capacity as Professor of English at City College he founded and directed the Poetry Outreach Center, and for 35 years coordinated the all-inclusive citywide Annual Spring Poetry Festival. He remains an active advisor and participant in the program.

Textes

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Barry Wallenstein, poèmes inédits extraits de Pandemonium

Ces poèmes, traduits par Marilyne Bertoncini, et inédits en Français, sont extraits du  CD Pandemonium (( Cadence Jazz ecord, 2005))

Barry Wallenstein dit "How the day begins"

How the Day begins

the day starts out as still

as a windmill caught in a calm absolute

that dreamy divagation

holds the man alive well into his future

thinking of it.

the day begins this way :

there's a bustle around the house

four kids, two his owns and two visiting,

are, literally, banging life into the place

thinking of it

the day starts out with windmill blades

holding the sunlight, and in the evening,

with moonrise, the fins again glow, and

there is no fire, no alarm

no one thinks of it.

the day resumes its burden

working deep into a leafless March

which stalls till mid-month,

holds its breath and releases April

think of it : April.

the day dissolves to evening

as in the old days

and lowers its eyes to the light ;

and every thought on the edge of dread

buries itself in night.

 

Comment démarre la journée

la journée démarre aussi doucement

qu'un moulin à vent par un calme absolu

cette errante rêverie

maintient l'homme bien en vie pour son futur

penser à cela.

la journée commence ainsi:

ça s'agite dans la maison

quatre enfants, deux à lui et deux en visite,

y font, littéralement, exploser la vie

penser à cela

la journée commence avec des ailes de moulin

retenant la lumière du soleil, et le soir,

au lever de la lune, les nageoires à nouveau brillent , et

il n'y a pas de feu, pas d'alarme

personne n'y pense.

le jour reprend son fardeau

de profond labeur dans un Mars dépouillé

qui stagne jusqu'au milieu du mois,

retient son souffle et libère Avril

y penser : avril.

le jour se dilue en soirée

comme autrefois

abaisse ses yeux à la lumière;

et toute pensée sur l'arête de la peur

plonge dans la nuit.

Pandemonium

They, driven by doubt and a whim, opened the box

and out everything jumped, fluorescent

and fearsome, and the box became famous

for its nightclub/late nighttime release and later

worse, that rumble befor the joists gave

and the bleeding call to the world,

but the world wasn't listening

with its nations pinpoint pressed to the wall ;

the nations'armies slouch in lassitude and fog

while the generals speed to their offices

to calculate scores, the scores of blame, long

having forgotten the box and its many tongues of flame.

Pandemonium

Eux, poussés par l'incrédulité et un caprice, ouvrirent la boîte

et hop! tout en sortit, fluorescent

et terrifiant, et la boîte devint célèbre

pour ses nightclubs/ exclusivités de minuit, et plus tard

encore pire, ce grondement avant que les solives ne cèdent

et la fascination du monde pour tout ce sang.

mais le monde n'écoutait pas

avec ses nations épinglées au mur, sur la carte ;

les armées des nations, lasses,  se traînent dans le brouillard

tandis que les généraux filent à leur bureau

pour calculer des scores, le score de leurs fautes, chacun

ayant depuis longtemps oublié la boîte aux mille langues de feu.

Lorelei

Cast a different set of dice

direction Lorelei

an island of spices

a package tight as Lorelei

sprung from a dream

and a good luck toss -

this straight backed head high

visage of Lorelei.

In earlier days the dice said :

love that tree for its knothole

the blades of grass for their fancy

and anything that moves without speaking.

So I did and shared the loneliness of the grass,

the shame of the tree,

and rolled again till the bones came yes

the swift gait and swaying - Lorelei ascending.

Bending, she blows on the sand - golden to the eye

and a cloud goes up shape shifting - breath of Lorelei.

Lorelei

Lance à nouveau les dés

direction Lorelei

une île à épices

un joli lot, bien ficelé, comme Lorelei

jailli d'un rêve

et d'un heureux coup de dés -

surgissant, tête haute,

ce visage de Lorelei

Jadis, les dés disaient :

aime cet arbre parce qu'il est creux,

les brins d'herbe pour leur fantaisie

et tout ce qui bouge en silence.

Ainsi faisant, je partageais la solitude de l'herbe,

l'humiliation de l'arbre,

en relançant les osselets jusqu'à ce qu'ils apportent

la démarche légère et ondulante - l'apparition de Lorelei.

Penchée, elle souffle sur le sable - dorée au regard

et la forme fluctuante d'un nuage s'élève - souffle de Lorelei.

Performance de Barry Wallenstein à la cave Romagnan, Nice

THE JOB, 2008

Sometimes this air I’m in

is so sulfurous, thick and unworthy,

I need to take much shorter breaths

to widen the zone of gasping.

My odd job is

to remember and write down,

with pencil, not pen,

the names of the ones disappeared,

then I hand the paper back 

to the state.

I’m not very good at this

and soon expect a reprimand.

I confuse Joe with Josephine,

Michael with Michelle,

Sally with Sally – gender errors.

And, on occasion, I reverse the truths

of their expirations.

Stupid me.

They all went quickly I report.

The few law suits die in court.

When the air is really bad

we all lean westward

and curse our jobs.

But if I lose this assignment

I may have to be pushing buttons again,

as during that sorrowful time 

melting by the Equator,

counting children ;

that was not a job to talk about.

 

LE BOULOT, 2008

Parfois, l'air dans lequel je suis

est si sulfureux, épais et dégradé,

que je dois inhaler de plus courtes bouffées

pour écarter la suffocation.

Mon petit boulot, c'est

de me souvenir et d'écrire

au crayon, pas au stylo,

le noms des disparus,

puis je rends le papier

à l'état.

Je ne suis pas très bon à ça

et je m'attends sous peu à une réprimande.

Je confonds José et Joséphine,

Michael et Michèle,

Sally avec Sally - erreurs de sexe.

Et, parfois, j'inverse la vérité

sur leurs trépas.

Que je suis bête.

Ils sont tous passés très vite, j'écris.

Les rares suites judiciaires s'éteignent au tribunal.

Quand l'air est trop mauvais

on se penche tous vers l'ouest

et on maudit notre boulot.

Mais si je perds cette mission

il faudra de nouveau que je tire des sonnettes,

comme dans cette période affligeante

en nage, à l'Equateur,

où je comptais des enfants :

c'était pas un boulot dont il faudrait parler.

 

 

.

Track listing: 01. Blues Again Lorelei (Barry Wallenstein) - 5:42; 02. A Little Bunch of Could Haves (Barry Wallenstein) - 2:20; 03. Ballad (Barry Wallenstein) - 1:58; 04. Drinking (Barry Wallenstein) - 2:18; 05. At Thoor Ballylee (Barry Wallenstein) - 6:17; 06. The Job 2008 (Barry Wallenstein) - 2:48; 07. Days of the Week (Barry Wallenstein) - 1:58; 08. Backstage To Be Spoken with Grass (Barry Wallenstein) - 4:40; 09. "lifey/Deathy": Sewer and Tree Commintment to a Fog (Barry Wallenstein)- 4:18; 10. Insinuation Crime (Barry Wallenstein) - 5:22; 11. Bigs & Little Prayer (Barry Wallenstein) - 5:05; 12. How the Day Begins (Barry Wallenstein) - 2:18; 13. Footsprints (Barry Wallenstein) - 3:25; 14. A Little Bunch of Could Haves (alternate take) (Barry Wallenstein) - 2:22; 15. The Job 2008 (alternate take) (Barry Wallenstein) - - 3:34

Barry Wallenstein (voix); John Hicks (piano); Curtis Lundy (contrebasse); Vincent Chancey (cor français); Daniel Carter (saxophone, trompette; Serge Pesce (guitare préparée)

.

Présentation de l’auteur

Barry Wallenstein

Barry Wallenstein is the author of eight collections of poetry, the most recent being At the Surprise Hotel and Other Poems [Ridgeway Press, 2016] and Drastic Dislocations: New and Selected Poems [New York Quarterly Books, 2012].  His poetry has appeared in over 100 journals, including Ploughshares, The Nation, Centennial Review, and American Poetry Review. 

Among his awards are the Poetry Society of America’s Lyric Poetry Prize, (l985), and Pushcart Poetry Prize Nominations, 2010, 2011. He has had resident fellowships at The Macdowell Colony, Hawthornden Castle in Scotland, Fundación Valparaiso in Spain and Casa Zia Lina on Elba, Italy.

A special interest is the presentation of poetry readings in collaboration with jazz.  He has made seven recordings of his poetry with jazz, the most recent being Lucky These Days, to be released by Cadence Jazz Records in April 2012A previous CD, Euphoria Ripens, was listed among the “Best New Releases” in the journal, All About Jazz (December 2008).

Barry is an Emeritus Professor of Literature and Creative Writing at the City University of New York and an editor of the journal, American Book Review.  In his capacity as Professor of English at City College he founded and directed the Poetry Outreach Center, and for 35 years coordinated the all-inclusive citywide Annual Spring Poetry Festival. He remains an active advisor and participant in the program.

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Une sorte de bleu…

Barry Wallenstein, Tony's Bluestraduction par Marilyne Bertoncini
Zéno Bianu et Yves Buin, Santana De toutes les étoiles
Zéno Bianu, Petit éloge du bleu

« Une sorte de bleu », « A Kind of Blue », comme une pochette d'album jazz de Miles Davis toujours en quête de ce son cristallin qui s'avère la couleur secrète de sa musique : autre prince de la nuit, mais une nuit crasseuse à la musique revêche, Tony's Blues, ce recueil de poèmes de Barry Wallenstein écrit en anglais, choisi et traduit en français par Marilyne Bertoncini, avec un sens expert de la formule et de l'image, flirtant avec l'argot pour dire le soir poisseux de la ville que sillonne l'ombre de Tony, vagabond des temps modernes qui n'aurait pas pourtant la dégaine insolente d'un Arthur Rimbaud mais plutôt celle d'un « clochard céleste » surgi d'un roman de Jack Kerouac, adepte de ces vieux blues, chants de la misère quotidienne et de l’humanité profonde !

Avec une forme d'humour qui tient ainsi de la politesse du désespoir face à la détresse présente de cette Amérique urbaine, décor trop vaste embrassant toutes les classes sociales, des plus riches aux plus démunies, dans un même cri rageur, taillé au couteau de la pauvre lame de ce personnage fictif, tout à la fois symbole et symptôme de ce que façonnent ou rejettent nos sociétés étriquées...

Une autre nuance de bleu parcourt l'ouvrage co-écrit par Zéno Bianu, poète auteur d'une tétralogie musicale, et Yves Buin, écrivain critique de jazz créateur d'un livre entre la biographie et l'essai consacré à Thélonious Monk.

 

Barry Wallenstein, Tony's Blues, traduction par Marilyne Bertoncini, PVST ?, 92 pages, 10 euros.

 

 

Ce bleu spirirituel est celui déchirant de la guitare flamboyante de Carlos Santana, dont le concert incandescent qu'il donna, à la House of Blues de Las Vegas, en mars 2016, est la principale source d'inspiration de ces deux explorateurs en échos littéraires au voyage musical que propose, depuis son irruption fulgurante au festival de Woodstock en 1969, le guitar hero à la rencontre du monde amérindien, de la communauté afro-américaine et de la culture latino, dans une fusion rock, un métissage des traditions qui s'ouvre sur l'envolée sublime d'un solo étincelant à la guitare électrique...

Evil Ways, Carlos Santana, Live At The House Of Blues, Las Vegas, 2016.

 

Dans les vers libres où circule un tel feu spirituel, cette lumière qui semble s'élever du cœur brûlant de la musique de Carlos Santana, dont le long poème-récit d'un concert unique restitue, sur le fil des émotions, l'intensité d'un dialogue démultiplié dans les vibrations d'un chant « bleu nuit » partagé par-delà toutes les frontières érigées : « Santana de toutes les étoiles / à l'ombre portée du grand Tout / et des musiques du monde / au centre des lumières / sur le versant des paradis / et des retours / comme le bleu nuit des apparences. » Mystère encore d'une nuit originelle dont le « bleu » est la teinte primordiale du musicien en guide initiatique au grand voyage que relatent déjà les épopées antiques : « dans la vie des Ulysses sonores / je cherche / une seule note bleutée »...

Zéno Bianu et Yves Buin, Santana De toutes les étoiles, Le Castor Astral, 88 pages, 12 euros.

Et comme autant de variations en immersion, en abécédaire, dans tous ses éclats répertoriés, le Petit éloge du bleu également de Zéno Bianu, se veut moins un droit d'inventaire de toutes les formes bleutées que, selon le principe des mille entrées par le pouvoir de la couleur, une plongée comme en apnée, dans un bleu immense réunissant mer et ciel, dans laquelle tous les arts sont à la fête, mais plus particulièrement la musique encore une fois, toute en improvisations, en invitations à l'écoute de la note bleue chère aux grandes figures du jazz : du Born to be Blue de Chet Baker au Blue trainde John Coltrane, en passant par Am I blue ? de Billie Holliday...

 

La seule évocation des titres des chapitres de cet essai magistral donne tout un kaléidoscope à la lumière des profondeurs d'une telle intensité : Bleu Apnée, Bleu Blues, Bleu Chet, Bleu Daumal, Bleu Éveil, Bleu Flamme, Bleu Georges Bataille, Bleu Haïku, Bleu Iris, Bleu Jimi Hendrix, Bleu Klein, Bleu Lady Day, Bleu Miró, Bleu Noctambule, Bleu Orange, Bleu Phosphène, Bleu Quattrocentro, Bleu Rimbaud, Bleu Suprême, Bleu Tibet, Bleu Univers, Bleu Van Gogh, Bleu Wang Wei, Bleu XI, Bleu Ylem, Bleu Zen…

Zéno Bianu, Petit éloge du bleu, folio, 112 pages, 2 euros.

 

Véritable signature au plus profond en écho à Santana De toutes les étoiles, le bleu fauve, le blues du delta, s’ouvrant sur la Voie lactée, de l’autre guitar hero apparu au festival de Woodstock, le virtuose Jimi Hendrix à propos duquel Zéno Bianu a cette phrase définitive : « Bleu imprégné de beauté violente, peut-être la couleur même de la poésie, dont il a restitué la pure scintillation. » !                      

Chet Baker, Born to Be Blue, by Universal Music Group.

Présentation de l’auteur

Barry Wallenstein

Barry Wallenstein is the author of eight collections of poetry, the most recent being At the Surprise Hotel and Other Poems [Ridgeway Press, 2016] and Drastic Dislocations: New and Selected Poems [New York Quarterly Books, 2012].  His poetry has appeared in over 100 journals, including Ploughshares, The Nation, Centennial Review, and American Poetry Review. 

Among his awards are the Poetry Society of America’s Lyric Poetry Prize, (l985), and Pushcart Poetry Prize Nominations, 2010, 2011. He has had resident fellowships at The Macdowell Colony, Hawthornden Castle in Scotland, Fundación Valparaiso in Spain and Casa Zia Lina on Elba, Italy.

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Présentation de l’auteur

Zéno Bianu

Zéno Bianu est né d'une mère française et d'un père roumain réfugié politique. Il est en 1971 l'un des signataires du Manifeste électrique, qui secoua la poésie des années 1970.

En 1973, il séjourne pour la première fois en Inde. L'Orient laissera une empreinte durable particulièrement prégnante dans Mantra (1984), La Danse de l'effacement (1990) et au Traité des possibles (1997). Son voyage au Tibet en 1986 marquera également son œuvre, dans laquelle il s'attache à restituer le chant des poétiques d'autres cultures. 

En 1992, il fonde Les Cahiers de Zanzibar, revue «hors de tout commerce», avec Alain Borer, Serge Sautreau et André Velter. Il traduit, pour une mise en scène de Lluís Pasqual, Le Chevalier d'Olmedo de Lope de Vega, qui sera créé en Avignon. Puis Le Livre de Spencer d'après Christopher Marlowe (1994) et Le Phénix de Marina Tsvétaiéva (1996).

Il a reçu le Prix international de poésie francophone Ivan Goll en 2003. Il a dirigé la collection Poésie aux Editions Jean-Michel Place. Il reçoit Le Prix Robert Ganzo pour l'ensemble de son oeuvre en 2017.

© Crédits photos Helie Gallimard.

Bibliographie (supprimer si inutile)

Poèmes choisis

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Zéno Bianu, L’Éloge du Bleu

Dans ce petit livre, léger d’une centaine de pages, lourd de culture et de réflexions gaiement sérieuses, cédant à la facilité je dirai qu’on n’y voit que du bleu : sous prétexte d’ordre alphabétique [...]

Présentation de l’auteur

Yves Buin

Yves Buin est un écrivain français né le 20 mars 1938. Il est médecin pédo-psychiatre.

Il publie de nombreux  romans policiers, mais écrit aussi sur le jazz et la psychiatrie, est l'auteur de biographies. Il a publié une vingtaine d'ouvrages, dont Maël (Christian Bourgois), Fou-l'Art-Noir, Thelonious Monk et L’oiseau Garrincha (Le Castor Astral), La Terre d'Arnhem (Plon), Bornéo, après la nuit (Grasset), Essai d'herméneutique sexuelle (Seghers), Kerouac (Jean-Michel Place), Kapitza et Borggi (Rivages Noir).

© Crédits photos (supprimer si inutile)

Poèmes choisis

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Barry Wallenstein, Tony’s blues, textes choisis et traduits par Marilyne Bertoncini, gravures Hélène Bautista

Un volume élégant, pour cette maison d'édition qui s'ouvre à l'internationale et propose un catalogue d'une qualité non négligeable. Pourquoi viens-tu si tard, PVST, publie cette fois-ci un recueil signé Barry Wallenstein, en version bilingue, avec un choix de textes et une traduction signés Marilyne Bertoncini. Superbe couverture, blanche, avec un paratexte monochrome, gris bleu, pour ce volume titré  Tony's blues, accompagné du témoignage de la poète Chantal Dupuy-Dunier qui connaît bien l'auteur et d'une préface d'Emmanuel Desestré. Les gravures d'Hélène Bautista qui ponctuent l'ensemble des poèmes.

Le blues, genre musical, vocal et instrumental venu des chants de travail des populations afro-américaines subissant la ségrégation raciale aux États-Unis, est un style dans lequel le chanteur exprime sa tristesse, ses déboires, mais qui est aussi éminemment politique. Que l'on songe à ces codes et références cachés dans nombre de textes des chants appartenant au genre. Parmi ces traits distinctifs on trouve des figures récurrentes, comme Stagger Lee, qui exprime un concept, celui de la révolte,  qu'elle ne met en scène à travers  un personnage quelconque  et le récit anecdotique de son aventure. Stager Lee, l'homme qui se bat pour un couvre-chef, apparaît dans cette  tradition musicale, et réapparait, du blues au rock. Son histoire a fait l'objet de tant de reprise au cours du vingtième siècle  que l'on a du mal à les compter... Cette figure de résistance abat un de ses semblables obéissant aux instances politiques et se pliant aux lois édictées par la ségrégation, pour lui prendre son chapeau, autrement dit son couvre-chef (que l'on s'arrête sur la polysémie du groupe nominal "couvre-chef", c'est à dire attribut de celui qui est en position de commander). Stagger Lee devient le symbole de la résistance contre la ségrégation. 

Barry Wallenstein, Tony's blues, textes
traduits par Marilyne Bertoncini, gravure
d'Hélène Bautista, éditions Pourquoi viens-tu
si tard ? , 91 pages, 10 €.

Tout un champ sémantique ancré dans ces codes et dans un fonctionnement antiphrastique court dans les indénombrables versions de cette histoire (qui d'ailleurs viendrait d'un fait divers ayant eu lieu au début du XXème siècle). Ce personnage s'inscrit dans une liste d'autres figures symboliques.

Cette référence à une tradition culturelle qui représente la résistance d'un peuple face à l'oppression place, dès avant la lecture, le recueil sur le terrain d'énonciation d'une parole dissidente, d'une voie off, et d'une lecture réflexive de la siociété américaine. Tony's blues est, aussi, le titre d'un album de Tony Fruscella, accompagné par Hank Jones, Wendell Marshall et Shadow Wilson, enregistré en 1952 à New York, et réédité dans la collection The jazz factory de Discoforme en 1999. Une lignée donc, une tradition sous les auspices de laquelle Barry Wallenstein  réunit l'ensemble des poèmes qui constituent ce recueil.

Le choix éditorial soutient la portée politique, sociologique, engagée, et critique des poèmes, car le recueil est scindé en deux parties, la première laissant le champ libre à la version originale, suivie par les traductions, le tout scindé par les gravures d'Hélène Bautista. C'est fort, ce choix, car l'impact est puissant et permet une plongée immédiate dans l'univers d'une société américaine qui imprègne particulièrement les textes de Barry Walleinstein, Blues oblige... Le poème liminaire donne le ton, ça cogne et percute comme cette musique qui résonne comme le battement d'un sang réfractaire dans les veines...

 

1.
Tony (To Himself)

Tony-You're a slick/sick mother-hubba
money in your ears
& your eyes are seeing halves-hlaf
what the gold, so-called, is worth

(...)

you're a dull toad, Tony
in a left-over stew ;
you've stopped reading the news
'cause it's bad-even the comics are sad

Wake up !

 

Tu es un beau gros salaud de ta mère, Tony -
de l'oseille plein les oreilles
& tu imagines des moitiés-moitié
de ce que l'or-soi disant-est coté

(...)

t'es un crapaud terne, Tony
dans un reste de ragoût ;
tu ne lis plus le journal
car il est nul-même les BD sont tristes

réveille-toi !

 

Pas besoin de comprendre l'anglais, assonances et allitérations rythment le poème, qui sonne comme une de ces interjections  utilisées par les crieurs publics pour attirer l'attention sur le discours qui va suivre. Sorte de présentation, ou d'entrée en matière, on sent bien que ce qui va suivre sera dense, virulent, fort... La traduction de Marilyne Bertoncini permet de parfaitement restituer les effets d'entrechoquement des mots, grâce à un choix de vocabulaire savamment orchestré. Le rythme qui ponctue les deux versions convoquent la musicalité du blues, tout comme le positionnement qui désormais ne laisse plus place au doute : Tony's blues est un recueils engagé, critique, politique.

L'horizon d'attente est donc celui d'une plainte portée par une visée critique de la société, dont l'énonciateur serait le personnage éponyme, Tony. Il n'en est rien, la parole est retirée de la bouche de ce supposé sujet, et c'est le poète qui dresse les multiples tableaux de la vie de celui-ci. Une immersion dans les pensées de ce dernier, et des passages discursifs lorsque sont relatées ses aventures. Tout ceci bien sûr au vitriol, mais ne faisant que décrire, finalement, une certaine catégorie de la population américaine, comme elle peut être mondiale. Les titres des textes ne laissent pas de doute sur le fait qu'il s'agisse de sortes d'instantanés comme des photos, images, cartographies de l'individu "Tony" représentatif d'un groupe, élevé au rang de figure symbolique de ce groupe. 

Alors, là est le tour de force et  aussi une certaine manière d'ouvrir à un horizon littéraire et discursif nouveau : Barry Wallenstein interroge aussi le blues, et les siècles de tradition musicale et discursive productrices d'une parole dissidente. Le recueil revêt toute sa portée symbolique quand après la lecture on a accès à  l'acception antiphrastique du titre... Le lecteur a constaté que le prétendu sujet producteur du discours, Tony, est dépossédé de la parole. Plus, il est l'objet d'un regard, d'un discours réflexif éminemment critique, il devient un type, il représente une typologie, tout comme Rastignac est l'incarnation de l'arriviste chez balzac... Dès lors, le blues et Tony sont sujets à caution, et interrogés grâce au point focal adopté par le poète. C'est également ce que nous disent les derniers vers du recueil... 

 

On parle de ces choses-
granulés de chaleur, pour soir d'hiver où les étoiles
abattent le réconfort.

 

Le blues de Tony est un discours de plus produit après des lustres de paroles dédiées au genre. Ces derniers vers, qui ouvrent vers l'avenir, et interpellent le lecteur : tu viens de lire les aventures de Tony, tu es d'accord avec ces constats, et tu vas refermer le recueil, et maintenant, tout va continuer ? Que vas-tu faire, toi, lecteur, de ces siècles de tradition artistique qui te montrent ce qui ne va pas, qui te disent ce qu'il faut balayer pour un monde meilleur ? Vas-tu encore pleurer sur du blues et continuer à laisser perdurer une société qui va à l'encontre de ce qui pourrait permettre à l'humanité et à la fraternité de s'exprimer...?

C'est ça, Tony's blues.




5 poèmes de Barry Wallenstein

 

Touch

a gift for hunger
as well as loneliness,
a wafer pure and secular.
Loam crawls with life,
clean as the wish
to send innocent arms
around innocent shoulders.
Arms or shoulders are candid and pure.

Touch: the harbinger of union,
the enduring condition
of a practiced heart,
a tonic for insult and confusion.

#

 

Toucher

Un don pour la faim
comme pour la solitude,
une ostie pure et profane.
Le limon grouille de vie,
clair comme le désir
d'entourer de bras innocents
d'innocentes épaules.
Bras ou épaules sont candides et purs.

Le toucher: précurseur de l'union
pérenne condition
d'un coeur expérimenté,
un tonique contre insulte et confusion.

 
#
 

My Dog

Just now, after many years of bogus calm,
I’ve met my match in the shape of a dog,

an angry beast outside the barn I rent
just beyond the city lights.
This dog’s an amazing creature,
five feet tall and wider than reason
his jaw is tense and his teeth snap.
There’s no way to know – ever –
when he’ll relax or attack.

But I’ll tame that  creature before I die,
medicate him with whispers,
sweet promises of greasy bones
and kinder dogs to learn from.
I’ll lead him to fire plugs, places to aim at.
But, the guy who called me a dog
for some minor misdemeanor,
should step back –
and beware our fearful fangs.

 

#

 

Mon Chien

En ce moment, après bien des années de calme fictif,
j'ai trouvé mon égal sous la forme d'un chien,

une bête furieuse à l'extérieur de la grange que je loue
juste au-delà des lumières de la ville.
Ce chien est une créature extraordinaire,
cinq pieds de haut, plus large que de raison :
sa mâchoire est tendue et ses dents claquent.
Pas moyen de savoir – jamais -
quand il va se détendre ou bondir.

Mais j'amadouerai ce clébard avant de mourir,
le soignerai par des murmures,
de douces promesses d'os bien gras
et des chiens plus gentils desquels il apprendra.
Je le mènerai aux bouches d'incendie, aux endroits à viser.
Mais, le type qui m'a traité de chien
pour un petit délit mineur
fera bien de reculer -
et craindre nos crocs puissants.

#

 

The Finale

It’s not over ‘till it’s over
thinks the pitcher about to pitch
in the 11th inning –
the fat lady’s not even in the house,
and there’s time;
but
says the trumpet
in the middle of the cadenza –
“it’s oftentimes over long before it’s over,”
and the band plays on
and the ballgame bounces along
as if time itself could erase the finale
which had fallen on both a long time ago.

Sometimes it’s long past bedtime
before the child closes her eyes.

 

#

 

La Finale

Rien n'est fini tant que ce n'est pas fini
pense le lanceur prêt à lancer
dans le onzième tour de batte -
la grosse dame n'est même pas à la maison,
et on a le temps;
mais
dit la trompette
au milieu de la cadence  -
“c'est souvent over bien avant d'être over,”
et la fanfare continue de jouer
et le match se poursuit
comme si le temps lui même pouvait effacer la finale
dévolue à tous deux il y a bien longtemps.

Parfois c'est bien après l'heure du coucher
avant que la fillette ne ferme ses yeux.

#

 

Mastery

Unable, at the start,
to do the love thing right,
he practiced stroke by stroke
and melting into whoever was by
slowly – as slowly as one
tip-toes forward and around
dripped honey circles
on the way to the jar.
Some sweet danger in every drop
until he’s safe under the lid.

Unable, late in life,
to do the large thing right
he takes on the small
inch by inch – to do
dividing the inch by quarters,
eights, many times over
into minutia
Click by click of the needle
stitch by stitch by miniscule stitch –
then comes the day the fabric’s done.

#

 

Maîtrise

Incapable, au début,
de faire correctement l'amour,
il pratiqua au coup par coup
pour se fondre en n'importe qui, là
lentement – aussi lentement que l'on
tourne sur la pointe des pieds
autour de gouttes de miel
sur la route du pot.
Chaque goutte contient un danger sucré
jusqu'à ce qu'il soit sauf, sous le couvercle.

Incapable, plus tard,
de bien faire les choses importantes
il se charge des petites
pouce par pouce – pour
diviser le pouce en quarts,
en huitièmes, un grand nombre de fois
jusqu'aux petits détails.
Clic à clic de l'aiguille
point par point, à points minuscules -
puis le jour arrive où le tissu est fait.

#

 

A Leap Beyond the Tyrants

I‘m not the devil you imagined
under your sleeve.
One night, despite my sulfurous breath,
you’ll invite me in just on the off-chance
that we’ll understand all that’s malicious
about right-wing terror and defend against it.

We may be enchanted and able to construct
a wall against fire or breakers by the sea
to hold back the bloated tide.
Yes, this love, untested but burgeoning,
will override mere guess-work
and clear the smog belched by the Titans.

They have the cash, the script and the drive,
but our leap beyond stymies their moment,
as we reach for each other
again and again.

#

 

Un saut par-delà les tyrans

Je ne suis pas le diable que vous imaginiez
sous votre manche.
Une nuit, malgré mon souffle sulfureux,
vous m'inviterez juste au cas où
nous comprenions tout ce qui est nuisible
dans la terreur de droite, pour nous en défendre.

Nous pourrions être enchantés et capables d'édifier
un mur anti-feu ou des brise-lames en mer
pour contenir la grande marée.
Oui, l'éclosion de cet amour encore inexpérimenté
dépassera de simples hypothèses
effaçant le brouillard craché par les Titans.

Ils ont le cash, le script et la conduite,
mais qu'on saute au-delà contrecarre leur règne
tandis que nous nous rejoignons
de plus en plus.

 

traduits par Marilyne Bertoncini




BARRY WALLENSTEIN

 

Je connais Barry Wallenstein et j'ai le plaisir de traduire ses poèmes depuis 2005 : j'enseignais alors à Menton, et je souhaitais que mes élèves rencontrent le poète, alors en résidence à Saorge. Durant ses séjours, Barry Wallenstein intervient volontiers dans les classes, où il anime des ateliers d'écriture, d'autant plus motivants que les poèmes des élèves sont ensuite publiés dans le recueil annuel du Poetry Festival de l'Université de New York, grande manifestation poétique dont il est le fondateur. La première rencontre n'ayant pu se faire, Barry Wallenstein m'a envoyé un CD contenant certains des poèmes de Tony, dont j'ai tout de suite pensé qu'ils allaient toucher mes jeunes élèves, par ses questionnements et son côté frondeur et marginal, proche de leur adolescence. Toutefois, il n'y avait pas de traduction disponible pour leur présenter ces textes et  c'est ainsi que j'ai commencé par traduire la séquence de Tony, dont les problématiques les ont effectivement interpellés, au point qu'un spectacle  - Tony's Blues - fut monté, dans le cadre du Printemps des Poètes, avec la classe de jazz de Manu Carré, au Conservatoire de Menton. Barry Wallenstein est régulièrement revenu dans mes classes, suscitant d'autres spectacles-lectures accompagnés par Serge Pesce, musicien de jazz  qui travaille  habituellement avec lui -  – et je l'en remercie, ainsi que des liens d'amitié qui se sont tissés autour de ces projets.

            L'entretien qui suit a été commencé à l'Osteria Lou Pountin, à Saorge, en avril 2015 – autour de spécialités italiennes et locales - et s'est poursuivi par le biais des modernes systèmes de communication que sont Skype et les courriels...

 

Marilyne Bertoncini

 

***

Vous revenez régulièrement au monastère/résidence de Saorge. Qu'est-ce qui inspire votre écriture dans ce lieu?

 

BW – Cela fait 14 ans que je viens à Saorge, une destination bien lointaine pour un New-yorkais. J'ai passé du temps dans cinq autres résidences, et aimé chacune d'elles, mais le programme de Saorge, fondé par Jean-Jacques Boin au début des années 90, a toujours été l'idéal pour mon écriture. La plupart des résidences pour écrivains offrent du silence et de l'espace pour travailler, fournissent aussi des repas et sont sans aucun frais pour les écrivains. A Saorge, l'hébergement est payant, et il faut pourvoir aux repas et aux courses. Je me sens plus indépendant à Saorge, et le paysage m'inspire : l'espace de travail est une cellule individuelle (c'était encore une cellule monacale il y a quelques décennies) pourvue d'un simple bureau, d'une lampe, et d'un lit pour dormir. Je commence généralement à penser en poésie (une façon vraiment différente de penser) dès que j'ouvre mes bagages. Je trouve aussi motivante la présence d'autres écrivains – savoir que, tandis que je travaille dans ma cellule, quelqu'un, à quelques mètres de moi, travaille aussi à ses compositions.

 

 

Vous avez parfois dit que lorsque vous arrivez dans un endroit (comme la résidence de Saorge) où vous avez temps et espace pour écrire, vous commencez à "penser en poésie" – qu'est-ce que vous voulez dire?

BW – Je voulais dire que lorsque les conditions physiques et émotionnelles sont correctes – pas de bruit, peu ou pas de distractions ou d'obligations hormis le travail en cours – je peux me concentrer sur les compositions sur lesquelles je travaille de telle sorte que les pensées me viennent avec leur métrique, dans la phraséologie appropriée au poème. Dans un tel état d'esprit, je suis capable de trouver une sélection de mots, un vocabulaire qui s'insérera dans les rythmes poétiques que j'ai en tête. Par "penser en poésie", je veux aussi dire que je vais être si impliqué dans une composition que je la tiendrai à l'esprit comme la pensée ultime de la journée et la première chose qui me viendra à l'esprit en m'éveillant.

 

 

Vous dites que le paysage de Saorge vous inspire – pourtant, vous n'écrivez pas vraiment de poésie élégiaque avec un paysage à l'arrière-plan. De quelle façon inspire-t-il votre écriture?

BW – Oui, bien sûr, la beauté du paysage alentour et, plus que la montagne, le village de Saorge, sont une source d'inspiration, mais il est souvent difficile ou impossible de dire précisément comment la beauté naturelle – ou la grandeur de la nature – vous inspire. Parfois, rien que de vivre dans un tel décor vous détend mentalement et vous rend plus réceptif aux influences du langage des relations entre les choses et les gens. Dans les premières années au monastère qui surplombe Saorge, j'ai écrit des poèmes sur le brouillard, les ombres et la beauté des montagnes alentour ; mais c'est à peu près tout ce que je peux faire avec ce matériau. J'ai vécu une vie entière dans les villes – d'abord NYC, mais j'ai aussi vécu quelques temps à Londres et Paris. Mes poèmes parlent surtout des gens, des histoires, des conflits – personnels et publics ; mais quand un poème sur le paysage se laisse écrire, je suis vraiment content.

 

 

Quant au personnage de Tony, personnage urbain, habitant des cités, avez-vous écrit des poèmes de Tony à Saorge?

BW - Oui, de nombreux poèmes de Tony sont nés à Saorge.

 

 

Pouvons-nous parler de Tony's Blues – et de ce personnage de Tony, qui s'exprime ou dont on parle dans les poème du recueil que j'ai traduit ?

BW – Tony a maintenant une longue histoire. Au départ, je n'avais aucune intention d'écrire une série de poèmes à son propos, mais le premier a tout naturellement mené au second, et à partir du troisième, j'étais en route. Tony est un personnage urbain, dont l'existence est plus ou moins liée à la pègre. C'est un personnage de la rue, par un SDF, pas vraiment un délinquant, mais marginal, qui survit en marge de la respectabilité. C'est aussi un fan de jazz, et son langage en est marqué. Dans le premier poème, celui qui a lancé la séquence, il se parle à lui-même avec ton un peu de reproche. Ce poème s'est d'abord intitulé "Tony se parle à lui-même", puis j'ai changé le titre en "Tony se réprimande". Il finit sur l'ordre de "se  réveiller!" Il veut s'éveiller à un état de conscience généreuse où il est moins avide, moins matérialiste ; tous les poèmes qui suivent (écrits sur une dizaine d'années) vont dans cette direction de conscience étendue. Son évolution s'est accomplie avec "The Day of withholding" où Tony est heureux de ne plus avoir besoin d'accumuler des "choses" – il peut faire sans possessions matérielles, et vivre heureux.

            La plupart des poèmes de Tony sont écrits pour être dits à voix haute avec un accompagnement de jazz. Ce n'est pas exactement mon alter ego, mais pas loin. Il est d'abord apparu sur mon premier enregistrement de jazz et poésie  In Case You Missed It, (SkyBlue Records, CD # 106, 1995). On peut entendre un grand nombre des poèmes de Tony sur Tony’s Blues (Cadence Jazz Records CJR 1124, 2001). Quelques-uns sont parus dans des revues, et ont eu leur première publication en livre  dans A Measure of Conduct, Ridgeway Press, 1999. Tous les poèmes de Tony (sauf ceux qui me vinrent, de façon inattendue, il y a quelques semaines) sont dans  Tony’s World, Birchbrook Press January 2010; et un ensemble assez conséquent a été republié dans Drastic Dislocations: New and Selected Poems; New York Quarterly Books, Feb. 2012. J'ai été très heureux que Matthieu Baumier et Gwen Garnier-Duguy en publient une version bilingue sous le titre de Tony's Blues. Ainsi, Tony est reparu de nombreuses fois, et tandis que je pensais en avoir fini avec ce personnage, il jaillit parfois dans mon esprit et renaît.

 

 

Vous présentez souvent vos textes avec un accompagnement de jazz –  c'est de cette façon que j'ai rencontré votre poésie, et je connais 7 enregistrements des lectures que vous parlez/chantez – de vos poèmes avec un ensemble de jazz. Quelle est la nature de la relation entre votre poésie et cette musique?

BW – Il n'est pas facile de répondre, car mes liens avec le jazz renvoient très loin dans ma vie. Quand j'avais 19 ans – en 1959 – j'ai fait ma première lecture publique. J'étais l'un des trois étudiants-poètes qui lisaient dans un club de Greenwich Village, alors appelé 'The Showplace". Nous ne le savions pas, mais le grand contrebassiste Charles Mingus devait nous accompagner. A l'époque, j'étais un fan du jazz de Mingus et j'adorais cette musique. Dix ans plus tard, je me suis enregistré lisant mes poèmes avec un accompagnement au piano. C'était agréable – une expérience qui m'a inspiré. J'aimais le son et le temps passé à faire l'enregistrement. Peu de temps après, un label de jazz a créé mon premier enregistrement en studio – un disque vinyl – et depuis, je travaille comme artiste de jazz.

            Mais pour moi, c'est le poème sur la page qui compte le plus, et si je suis un "poète de jazz",  on doit entendre la musique sur la page imprimée. Mon oeuvre use souvent des expressions familières ou idiomatiques, et certaines utilisent un phrasé infléchi par le jazz. Le fait que je travaille avec des musiciens de jazz – d'un très haut niveau artistique – me permet de présenter ma poésie internationalement, et bien plus souvent que si je me contentais de faire des lectures poétiques. Le simple fait d'avoir ces lectures/performance à préparer me pousse à produire de nouvelles oeuvres, et parfois, les poèmes naissent pour des occasions musicales particulières.

 

 

Parlez-nous de vos débuts en poésie et de la façon dont l'écriture s'organise pour vous :

BW – Enfant, j'aimais lire des poèmes, particulièrement ceux, rimés, des poètes américains du 19ème siècle; j'ai commencé à écrire aux alentours de 12 ans. Ecrire des poèmes était une façon d'exprimer mes sentiments d'isolement ou d'aliénation au sein de ma famille – je savais que mes parents – s'ils découvraient jamais les petits poèmes – ne les comprendraient pas. J'avais le sentiment d'écrire en code, car la poésie est un langage codé – le langage de l'indirection. Ainsi, il y avait mes petits secrets, et les écrire, tout simplement, était une sorte de consolation ou de soulagement. J'ai eu professeur au lycée qui m'a encouragé à écrire, et plus tard, à l'université, le poète critique littéraire M.L Rosenthal, m'a pris sous son aile et devint mon mentor pour la vie. Il m'a guidé lors de mon doctorat en littérature contemporaine et m'a aidé à publier mon premier livre.

Ces dix dernières années, j'aimais particulièrement écrire entre seize et vingt heures – les heures du crépuscule. Presque toujours je commence par ouvrir un dossier en cours d'esquisses, ou tout simplement de bribes de  vers qui me semblent contenir un germe de poème, ou un son pour commencer un possible poème. Dès que j'ai trouvé le rythme juste dans un ou plusieurs vers, alors le poème se développe plus ou moins tout seul, en suivant le rythme initial posé dans les deux premiers vers. Ensuite, je fais de nombreux brouillons avant de pouvoir le montrer à quiconque, et alors – quand j'ai eu un retour – je continue de le peaufiner. En fait je compose toujours en récitant les vers à voix haute – c'est un processus vocal.

 

 

Je pense qu'il serait intéressant de donner aussi au lecteur une idée de votre "généalogie" poétique – je veux dire, les poètes qui vous inspirent, ceux dont vous vous sentez proche.

BW – J'ai certainement été poussé à écrire des poèmes après avoir lu des poèmes qui me parlaient. C'est ainsi depuis le début (quand j'avais 12 ans environ). Mais je trouve aussi l'inspiration pour mes poèmes dans les conversations entendues, les paroles des chansons, et certains passages dans les romans et les nouvelles. Je ne sais jamais quand un élément linguistique s'offrira comme germe ou point de départ d'un poème. Très jeune, j'étais poussé à écrire des poèmes en suivant les maîtres de la rime :  E.A. Poe, Longfellow, Blake, Wordsworth, et plus tard Tennyson. Aux alentours de mes vingt ans, je suis tombé sous le charme de  T. S. Eliot, Ezra Pound, puis William Carlos Williams. Un peu plus tard, j'ai découvert les poètes symbolistes français – Mallarmé, Baudelaire, Rimbaud. C'étaient les poètes les plus lus par les étudiants en littérature anglaise.

 

Lire Barry Wallenstein chez Recours au Poème éditeurs :

Tony’s blues

***

 

 

Interview with Barry Wallenstein, presented by Marilyne Bertoncini 

 

I've known Barry Wallenstein and had the pleasure to translate his poems since 2005, I was then teaching in Menton, and I wanted my students to encounter the poet, while he was in residence at Saorge. During his stay, Barry Wallenstein willingly , involved in classes, where he hosts writing workshops, which are especially motivating because poems of the students are published in the annual volume of Poetry by City University of NY  Festival, a great poetic manifestation of which he is the founder. The first meeting could not be done, so Barry Wallenstein sent me a CD containing some of Tony's poems,  and I immediately thought they were going to touch my young students, by the questions and  rebellious, marginal aspect of this chararcter, close to adolescence. However, there was no translation available to present these texts and thus I began by translating the sequence of Tony, whose problems have actually arrested the kids, to the point that a show - Tony's Blues - was mounted as part of the Spring of Poets, with Manu Carré'sjazz class , at the Conservatory of Menton. Barry Wallenstein regularly came back in my classes the following years, and these visites prompted other staged readings accompanied by Serge Pesce, jazz musician who usually works with him - - and I thank him for that, as well as for the bonds of friendship forged by around of these projects.

 

The following interview was started at a small  restaurant, Osteria Lou Pountin in  Saorge in April 2015 - around Italian and local specialties - and continued through modern communication systems such as Skype and emails .. . 

 

***

 

You come back regularly to the monastery / residence Saorge. What inspires your writing in this place? 

BW - It's been 14 years I have come to Saorge, a very distant destination for New Yorkers. I spent time in five homes, and loved all of them, but the Saorge program, founded by Jean-Jacques Boin in the early 90s, has always been perfect for my writing. Most homes offer writers of silence and space to work, also provide meals and have no cost for writers. A Saorge, accommodation is limited, and we must provide for meals and shopping. I feel more independent in Saorge, and the scenery inspires me: the workspace is an individual cell (a monastic cell was still there a few decades) with a simple desk, a lamp, and a bed to sleep. I usually start thinking in poetry (a really different way of thinking) as soon as I open my luggage. I also find the presence of other writers, while I work in my cell, someone, a few meters from me, also working on his compositions.

 

 

You said that sometimes when you arrive in a place (such as the residence of Saorge) where you have time and space to write, you begin to "think in poetry" - what do you mean? 

BW - I meant that when physical and emotional conditions are correct - no noise, little or no distractions or obligations other than work in progress - I can focus on the compositions on which I work, so that thoughts come to me with their metrics in the appropriate phraseology to the poem. In such a state of mind, I am able to find a selection of words, a vocabulary that will fit into the poetic rhythms that I have in mind. By "thinking poetry", I also mean that I'll be so involved in a composition that I will keep in mind as the ultimate thought of the day and the first thing that comes to mind on waking . 

 

 

You say that the landscape of Saorge inspires you - yet you do not really write elegiac poetry with a landscape in the background. How does it inspire your writing? 

BW - Yes, of course, the beauty of the surrounding landscape and over the mountain, the village of Saorge, are an inspiration, but it is often difficult or impossible to say precisely how the natural beauty - or the size of nature - inspire you. Sometimes nothing but to live in such a setting mentally relaxes you and makes you more receptive to influences of language relationships between things and people. In the early years the monastery overlooking Saorge, I wrote poems about the fog, shadows and the beautiful surrounding mountains; but that's about all I can do with this material. I lived an entire life in cities - first NYC, but I also spent some time in London and Paris. My poems are mostly people, stories, conflicts - personal and public; but when a poem on the landscape lets write, I'm really happy. 

 

 

As for the character of Tony, an urban character, did you write the Tony poems at Saorge? 

BW - Yes, many Tony poems were born there.

 

 

Can we talk about Tony's Blues - and the character of Tony, expressed or spoken of in the poems I translated?

BW - Tony now has a long history. Initially, I had no intention of writing a series of poems about it but the former has naturally led to the second and from the third, I was on my way. Tony is an urban character, whose existence is more or less related to the underworld. He is a character of the street, a homeless, not really a criminal, but "fleeing" (?), Which survives on the fringes of respectability. It is also a fan of jazz, and his language is marked. In the first poem, one that started the sequence, he talks to himself a little with your reproach. This poem was first titled "Tony talks to himself," then I changed the title to "Tony reprimand." It ends on the order of "wake up!" He wants to wake up to a generous state of consciousness where there is less greedy, less materialistic; all subsequent poems (written about ten years) in this direction of expanded consciousness. Its evolution was accomplished with "The Day of withholding" in which Tony is happy to no longer need to accumulate "stuff" - it can do without material possessions, and live happily. Most Tony poems are written to be spoken aloud with a jazz accompaniment. This is not exactly my alter ego, but close. He first appeared on my first recording of jazz and poetry In Case You Missed It (SkyBlue Records, CD # 106, 1995). You can hear many of the poems Tony of Tony's Blues (Cadence Jazz Records RGC 1124, 2001). Some are published in journals, and had their first publication in book A Measure of Conduct, Ridgeway Press, 1999. All the poems of Tony (except those who came to me unexpectedly, there a few weeks) are in Tony's World, Birchbrook Press January 2010; and a quite big set was republished in Drastic Dislocations: New and Selected Poems; New York Quarterly Books, Feb. 2012. I was very heureuxx Matthew Balsam and Gwen Garnier-Duguy published in a bilingual version under the title of Tony's Blues. So Tony reappeared many times, and while I thought it had finished with that character, it sometimes gushes in my mind and reborn.

 

 

You often present your texts with an accompaniment of jazz - that's how I met your poetry, and I know 7 records readings in which you  speak / sing - your poems with a jazz ensemble. What is the nature of the relationship between your poetry and the music? 

BW - It is not easy to answer, because my relationship with jazz return far in my life. When I was 19 years - in 1959 - I made my first public reading. I was one of three student-poets who read in a club in Greenwich Village, then called 'The Showplace. "We did not know it, but the great bassist Charles Mingus was to accompany us. At the time, I' was a fan of jazz Mingus and I loved the music Ten years later, I registered my poetry reading with piano accompaniment It was nice -... an experience that inspired me I liked the sound . and the time spent doing the registration Shortly after, a jazz label created my first studio recording - a vinyl record - and since I work as a jazz artist.

But for me, it is the poem on the page that matters most, and if I am a "jazz poet," one must hear the music on the printed page. My work often use familiar or idioms, and some use a phrasing inflected jazz. The fact that I work with jazz musicians - a very high artistic level - allows me to present my poetry internationally, and more often than if I was content to do poetry readings. The mere fact that these readings / performance pushes me to prepare to produce new works, and sometimes the poems are born for special musical occasions. 

 

 

Tell us about your debut in poetry and how writing is organized for you: 

BW - child, I loved reading poems, especially, rhymed, American poets of the 19th century; I started writing around 12 years. Writing poetry was a way to express my feelings of isolation or alienation within my family - I knew my parents - they never discovered the little poems - would not understand them. I felt to write in code, because poetry is a coded language - the language of indirection. So there was my little secrets, and write simply, was a kind of consolation or relief. I had a high school teacher who encouraged me to write, and later at university, literary critic poet ML Rosenthal, took me under his wing and became my mentor for life. He guided me during my doctorate in contemporary literature and helped me to publish my first book. Over the past decade, I especially liked writing between sixteen and twenty hours - the hours of dusk. I almost always begins by opening a file of drafts under sketches, or just snippets that seem to me to contain a poem germ, or sound to start a potential poem. Once I found the right rhythm in one or more verses, the poem then develops more or less alone, following the initial rhythm laid in the first two lines. Then I make many drafts before you can show to anyone, and then - when I got back - I continue to refine it. In fact I always consists in reciting the verses out loud - it's a vocal.z process.

 

 

I think it would be interesting to also give the reader an idea of ​​[how you came to poetry] your "genealogy" poetic – Who were the poets who inspire you, the ones you feel close to ?

BW - I was certainly moved to write poems after reading poems that spoke to me. Thus from the beginning (when I was 12 years). But I also find inspiration for my poetry in conversations overheard, song lyrics, and some passages in the novels and short stories. I never know when a linguistic element to offer as a seed or starting point of a poem. Very young, I was moved to write poems following the masters of rhyme: EA Poe, Longfellow, Blake, Wordsworth, Tennyson and later. Around my twenties, I fell in love with TS Eliot, Ezra Pound and William Carlos Williams. Later, I discovered the French symbolist poets - Mallarmé, Baudelaire, Rimbaud. These were the most read poets in the English students.

Lire Barry Wallenstein chez Recours au Poème éditeurs :

Tony’s blues