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Cécile A. Holdban, extraits inédits de Toucher terre

Les certitudes nous maintiennent sur un socle précaire, flammes debout que bientôt les feuilles recouvrent, amenuisent, étouffent. Nous restons sans appui sur la terre nue, glacée, au seuil du vertige et de l’obscurité.

Notre seul viatique : l’espérance secrète du printemps.

 

 

 

Les migrateurs

Novembre noir, novembre gris
poème sans ciel sans ailes sans bruit
la rue se noie la rue est sombre
le vent tourne dans les manteaux
les visages gommés par la pluie

(en toi indivisible je reconnais
le goût de l’eau)

on dit que la joie
compose dans sa lumière franche
de trop faibles poèmes

(je ne peux taire le chant
qui le matin monte à ma gorge
ourle mes lèvres fleurit ma main)

on dit que la joie
est un leurre pour les oiseaux
que la vérité se situe
dans des zones entre gel et ombre
dans l’opacité de la rue

(je te sais, et je suis la source
comme la source
sait l’océan)

Novembre noir, novembre gris,
dans l’aube humide sur les ruelles
j’ai vu la joie ordonnant sa clarté
vers ce vol lointain que ton regard suivait.

 

 

 

Templum

les augures déchiffrent le vol des oiseaux dans un carré donné de ciel.
baguette de coudrier, bois de cerf, trompette de cuivre
tracent dans les airs l’angle d’une vision inaccessible

Sois l’espace entier, la fenêtre où voir est sans limite
l’horizon : on le mesure à ce qui tremble
par delà les lignes possibles. Le temple est transparent

 

 

 

Hirondelle

fends et strie le ciel de l’arc de tes ailes
présage, pulsation, boomerang
ailes noires, cœur rouge, ventre blanc
emporte dans la nue les couleurs du conte
et reviens, plumes empennées d’orage
de foudre, illuminer la nuit

 

 

 

Vivre c’est
entendre cette musique qui s’élève
parfois avec la douleur

Vénus annonçant la nuit

nos mains

(comme un pressentiment
             le mouvement suspendu)

sont tendres
et disent en se retirant :

grâce soit rendue à nos os de flûte
par qui la musique fut ailée.

Présentation de l’auteur

Cécile A. Holdban

Elle est peintre et écrivain, lauréate du prix Yvan Goll (2017) et du prix Calliope du Cénacle Européen (2017), est également traductrice et coéditrice de la Revue Ce qui reste, une revue en ligne de littérature et d’art contemporains. Elle anime une chronique littéraire sur Aligre FM radio.

Elle pratique peinture et écriture en les faisant dialoguer : les liens et transmissions entre les différentes formes d’arts sont au cœur de son travail. Son univers de création se fonde sur ces rapports synesthésiques. Il s’enrichit de l’observation et de l’imaginaire de la nature, entre paysage visible et invisible, d’une écoute et d’une attention au vivant, aux contes et mythes.

Elle collabore par ses peintures,  poèmes, traductions et articles à de nombreuses revues, anthologies et ouvrages collectifs variés. Elle aime aussi s’associer à d’autres créateurs ou écrivains dans des publications, revues et livres d’artistes. Elle a fait l’objet de deux expositions personnelles en France et participe régulièrement à des expositions collectives et des festivals, et anime régulièrement des masterclasses et ateliers de création, d’écriture et expression plastique.

Cécile A. Holdban

BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE

Derniers ouvrages publiés

Premières à éclairer la nuit, récit, Arléa, janvier 2024

Toutes ces choses qui font craquer la nuit, textes et peintures, Exopotamie, 2023

Osselets, dessins et poèmes, Le Cadran Ligné, Saint- Clément, 2023

Kaléidoscope, 173 poètes contemporains mis en image pendant le confinement, l’Atelier des Noyers, Dijon, 2023

Jacques Bibonne, une vie en peinture (collectif, texte de contribution au catalogue ) éditions Le temps qu’il fait, Bordeaux,  2023

Pierres et berceaux, dessin et poèmes, Potentille, Nevers, 2021.

Toucher terre, Arfuyen, Paris, 2018

Silence, photographies d’Anne Lise Broyer, poème de Cécile A. Holdban, Sous les glycines, Paris, 2016.

Poèmes d’après suivi de La route de sel, Arfuyen, Paris, 2016.

Quelques traductions :

John Keats, La poésie de la terre ne meurt jamais, édition traduite et annotée par Cécile A. Holdban et Thierry Gillyboeuf, Poésis, 2021

Howard Mc Cord, Poèmes Chamaniques, édition établie, traduite et annotée par Cécile A. Holdban et Thierry Gillyboeuf, La Part Commune, 2021

Virginia Woolf, Le Paradis est une lecture continue, traduction et présentation de Cécile A. Holdban, La Part Commune, Rennes, 2019.

Virginia Woolf, Ainsi parlait – Thus Spoke, dits et maximes de vie choisis, traduits de l’anglais et présentés par Cécile A. Holdban, édition bilingue, Arfuyen, Paris, 2019.

Sándor Weöres, Filles, nuages et papillons (Lányok, lepkék, fellegek), poèmes choisis et traduits du hongrois par Cécile A. Holdban, Érès Po&Psy, Toulouse, 2019.

Dezső Kosztolányi, Venise, traduction du hongrois et préface de Cécile A. Holdban, Cambourakis, Paris, 2017.

Attila József, Le Mendiant de la beauté, Le Temps des Cerises, Paris, 2014, poèmes traduits du hongrois par Francis Combes, Cécile A. Holdban et Georges Kassai.

DÉCOUVRIR

Site de la Revue Ce qui reste – Journal quotidien de son travail de peintre sur Instagram

Mail : mcguichard@outlook.com

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