Toute nos­tal­gie est absente du dernier recueil de Jacques Ran­court, Suite en rouge mineur, évo­ca­tion dis­crète des rites de pas­sage de l’enfance à l’âge adulte.

 

Rien de trop appuyé dans ces scènes rétro­spec­tives, présen­tées en français et en anglais et accom­pa­g­nées des mag­nifiques tableaux de Wan­da Mihuleac : ceux-ci for­ment un con­tre­point visuel dont l’effet est de soulign­er le côté dra­ma­tique à peine sug­géré par le texte. Plusieurs images défi­lent ain­si sous nos yeux, à la manière d’un lent trav­el­ing soutenu par la musique des mots. Ain­si l’éclat des images est-il con­stam­ment dou­blé, mis en sour­dine, par le regard dis­tan­cié du poète. Regard ironique ou ten­dre, rap­pelant les anec­dotes de la vie courante, les pre­mières amours ou l’éloignement des siens. Ici et là appa­rais­sent les sil­hou­ettes de la mère et du père, celle du curé ou de la femme du maire. Jusqu’à la plongée en soli­tude qui se ponctue par ce con­stat : « Je n’étais plus que moi ». Expéri­ence de la lib­erté qui se trans­forme en con­nais­sance du monde. Cette suite joue avec brio des con­trastes entre les propo­si­tions pic­turales et les tonal­ités plus douces du texte, ici décliné tel une envoû­tante mélodie.

 

Jacques Rancourt, Suite en rouge mineur, poèmes, traduit par John F. Deane, peintures de Wanda Mihuleac, Éditions Transignum, 2017.

Jacques Ran­court, Suite en rouge mineur, poèmes, tra­duc­tion de John F. Deane, pein­tures de Wan­da Mihuleac, Édi­tions Tran­signum, 2017.

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Lise Gauvin

Lise Gau­vin est une écrivaine, essay­iste et cri­tique lit­téraire québé­coise. Elle est par­tic­i­pante de longue date au fes­ti­val lit­téraire Metrop­o­lis bleu.