En par­courant le très beau numéro 35 de la revue « Phoenix », de textes en textes, mon regard poé­tique a été accroché par quelque chose de très dif­férent qui m’a immé­di­ate­ment pris dans ses rets. Trois textes superbes de Frank Merg­er : “Idio­syn­crasie”, “les larmes d’Homère” et “Homo Masilien­sis”. De Frank Merg­er, je con­nais­sais les tra­duc­tions du per­san mais  pas les textes de poésie.

« C’est une ville où on s’oblige pas à grand-chose …. » Est-ce le rythme, les images con­tenues qui se bous­cu­lent ? Je me sens tout de suite porté par la charge poé­tique de ces mots de la ville « incivile agres­sive insalu­bre » Les mots se dressent comme la ville , en ont la couleur et les jeux sonores, accueil­lent comme un guide le fil des réflex­ions de l’hôte dans une poésie empathique qui ne veut pas heurter mais nous emmen­er dans ces rues où ce sont les images que l’on touche, sans s’arrêter à ce qu’elles appor­tent de débauche, désar­roi , vie « où cog­nent les rats ».

La beauté pénètre cet univers brut où grouil­lent blattes cafards et rats, dans l’horizon d’im­meubles et de rues  ponc­tuées de drogue de sexe et d’ef­fon­drement. On imag­ine le poète marchant dans ses rues et sans for­cé­ment chercher à com­pren­dre, énumérant la ville :  il n’y a que le regard qui touche.

Et curieuse­ment, moi qui viens d’adorer « Méditer­ranée romance»1Méditer­ranée romance, Yann Miral­lès, Unes 2018 je retrou­ve ici un esprit cousin, évo­ca­teur de ce passé- présent som­bre et lumineux où le poète laisse la vue solaire et mar­itime se mêler à ce qu’il en sait, de ce passé grec,réminiscence de toutes les méditer­ranées. Les accents et les mots de Mar­seille sont tou­jours en par­tance, se joignent dans un même temps.

Ici l’écriture n’a rien d’abstrait, elle est juste, vraie et sen­si­ble, l’œil et la voix osent le mot, le fix­ent dans ce moment qui rejoint la lumière émer­veil­lée réson­nant dans les quartiers.

Quand Soudain calan­ques est le titre qui fait que l’on cause 
« la calanque » c’est l’esprit de la ville 
beauté lumière et dureté
les gens d’ici sont bruyants
mais ils se taisent à l’intérieur. 

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Lambert Savigneux

De racine basque, Lam­bert Sav­i­gneux nait aux pieds des Pyrénées et est tout à la fois pein­tre, poète, tra­duc­teur, et marcheur. Il se dirige vers les langues et est fasciné par les cul­tures étrangères en par­ti­c­uli­er celles qui remon­tent le cours du temps mais aus­si les cul­tures de métis­sages. Il porte une atten­tion par­ti­c­ulière aux vies mal­menées et à l’outre occi­dent. Poète, il est l’Auteur de deux recueils aux édi­tions du petit véhicule. Des tra­duc­tions sont à paraitre. Il s’occupe actuelle­ment de la mai­son de la poésie de Grasse (06)

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