Pleure Guenièvre présence blanche le fils d’Uther
Les spectres que les chants amènent jusqu’ici portent le masque
Des morts Et le vent traîne vide sa coupe d’argent le long du sillon
Bleu Dîtes-moi quelle voix guerrière se lève du soir
Pour vos cortèges et vos mêlées car les corneilles
Maintenant ont déserté Albion et accourent du côté
Des terres sauvages Aussi de razzia en razzia la cendre
Légère des maisons roule jusqu’en bas des vallées où
Les montagnes noires prennent leurs racines où
L’Ancien Cerf hante sans fin les bois de Valdone
Qu’une nuée noire recouvre tandis que l’orage plonge
Sur les herbes vertes des Cornouailles ses petits yeux
Ouverts sur un pays endormi par rêve D’autres ailleurs
Flottent sur cette mer engloutie où l’Île d’Ys songe à
D’autres cités qu’à celle qu’elle portait jadis
Sur son monticule de pierres dures glisse la brume
Rampante de ses lagunes sèches La pente retournée
De son exil Vieille maraude de matière rouge la Porte
Pour toi reste ouverte comme on fait du blé dans les champs
Tranche l’eau caillouteuse où l’herbe verte n’a plus le même
Parfum au printemps Quel sort suprême reconnaître de ces
Sources
Je ne sais pas regarder sous la dernière stèle son corps
S’abandonner aux ombres comme un abysse de silence
Où le secret est un creux la lumière blanche mange les ténèbres
Comme un secret d’abysse creusé dans le silence Je pars
Terre de givre
Longtemps après le départ des derniers chevaux
Sur le bord brumeux des rives de Belerion
Pour honorer une dernière fois les morts de Camlann
Quelques suppliantes restent pour prier
Mais leurs regards sont du côté de la mer
Guettant les derniers signes du vaisseau veule
De leur roi parmi la nuit essoufflée dans la forêt
Le Mage est de nouveau muet et commence à
Reprendre son antique forme d’animal couronné
Par les bois le battement de la neige fond
Sur le corps d’Arthur qui s’apprête à pénétrer
Les sentiers sépulcraux des flots sombres
La nuit est déjà morte comme une main qui se ferme
Et la lune en mettant son manteau mièvre de poudres
Grises ne bouge presque plus entre les étoiles et les ruines
Le bâton du Mage ne viendra pas fouler cet enclos
Ce dernier verger blanc n’est plus à leurs yeux
Qu’un vaste champ désert
La voix de la mère
Quelle mort Arthur dans l’étreinte abandonnée de ton enfance
S’égare vers ici pour disparaître derrière la colline des vagues
Sous ta tête le casque de ton père songe à d’autres cieux et
Ton épée Excalibur et ton bouclier Prydwen portent les mêmes
Noms que la pierre et la barque que la forêt et la mer
Alors que dans le soir noir des nuits de la rive accouche un
Lendemain sans autre regard que celui de répéter son oubli
Sa mort crie tout bas dans la matière de l’ombre et dans celle
Qui laisse un peu paraître une lumière un éclat un rayon
De brisants et de fleurs déchirées à la vertu des rites
Mon enfant tu le sais maintenant aucune immortalité
Ne règne dans le coeur de celui qui répand la haine sur le Royaume
Songe à l’ancien chêne et au sang-sève qui descend de son tronc
Transpercé par la lance du sorcier de la guerre dont le souvenir du feu
Agit encore comme un mirage comme à travers une brume
Un soupir et un souffle creux
En haut on ne voit plus de rayon plus de regard
Seule la solitude rompue par les sacrifices humains
Dans le soir enfreint encore de nos heures rétrécies