Alberto Comparini, palimpseste

Par |2025-11-06T12:45:04+01:00 6 novembre 2025|Catégories : Alberto Comparini, Poèmes|

2.1.

les pas­sages pié­tons les voitures débor­dant en dou­ble file les feux verts clignotants
cette hâte ado­les­cente de vouloir à tout prix vain­cre l’attente lourde du lendemain
après les con­vo­ca­tions pour le stage d’été les entraîne­ments les matchs les suicides
les dernières coupures tout s’achève dans un virage ser­ré près du car­refour la force
cen­tripète de la route ne suff­i­sait plus le frot­te­ment dynamique cède à l’inertie
de la moto l’énergie ciné­tique se con­serve ton corps devient pur mouvement
en une frac­tion de sec­onde tu es figé tu heur­tes la tête le genou la poitrine

2.8.

tu com­pos­es le 0103621526 il s’était fait tard à la mai­son le télé­phone fixe de la cuisine
avait longue­ment son­né c’était l’heure du dîn­er de l’autre côté du com­biné on entendait en fond
le générique de Otto e mez­zo quelqu’un avait bais­sé le vol­ume de la télé à l’écran défilaient
en silence des pub­lic­ités muettes jusqu’à l’explosion soudaine d’une voix con­fuse de mère ou fille
bon­soir ce n’est pas moi Alber­to a eu un acci­dent de moto il est vivant il ne respire pas très bien
après la chute il a dû per­dre son porte­feuille main­tenant il est en état de choc il n’arrive pas
à bouger les jambes il est agité inqui­et insta­ble il répète à tous qu’il veut encore jouer au basket

3.8.

un an après l’opération la réé­d­u­ca­tion du genou gauche est
ter­minée le tonus la masse la mobil­ité du mem­bre ne sont pas
suff­isants pour repren­dre l’activité sportive il faut atten­dre l’avis
de l’orthopédiste n’est pas posi­tif dans l’autre jambe tu ressens
une douleur aiguë elle est inter­mit­tente elle con­tin­ue de croître
en même temps qu’une autre vie entre la tête et le col du fémur

5.9.

tout a un prix même les tra­jets en train région­al les vols low-cost de dernière minute
ces jeûnes col­lec­tifs dans les cab­i­nets les dis­cus­sions vos silences et mes demandes
pour un sec­ond avis après le dernier con­trôle raté tu com­prends ce que deviendra
ton corps une fois obtenu le prêt d’honneur à la banque de l’os cette cicatrice
une vieille blessure ta mémoire diluée dans une per­fu­sion analgésique

8.8.

au moment de la sor­tie tu reçois le pro­to­cole de départ
un symp­tôme con­stant du mal obscur est le syndrome
du mem­bre fan­tôme tu en perçois tout de suite la position
la douleur va et vient elle est épisodique il serait risqué
d’intervenir encore sur le fémur les décharges tendent
à croître elles tra­versent entière­ment le corps du patient

Présentation de l’auteur

Alberto Comparini

Alber­to Com­par­i­ni, né à Gênes en 1988, a étudié et tra­vail­lé à l’université de Stan­ford, le City Col­lege of New York et à l’université libre de Berlin. Actuelle­ment il enseigne Lit­téra­ture com­parée et théorie de la lit­téra­ture à l’Université de Trente. 

Bibliographie

Il a pub­lié des séquences et pros­es lyriques dans les jour­naux ital­i­ennes « Nazione Indi­ana », « GAMMM » et « L’Ulisse ». Fri­bourg est sa pre­mière pub­li­ca­tion en français et fait par­tie d’un pro­jet mul­ti­lingue inti­t­ulé Sur une échelle de un à dix.

Autres lec­tures

image_pdfimage_print

Sommaires

Aller en haut