La revue Népenthès en est à sa 4ème livrai­son. C’est une pub­li­ca­tion de l’As­so­ci­a­tion Car­refour des Chimères et son maître d’œu­vre se nomme Bernard J.Lherbier.
Belle revue de plus de 300 pages, par­courir son som­maire est déjà promet­teur : les poètes ryth­ment la cadence au gré de ce que la revue nomme “Para­phe” ; leurs poèmes sig­nant la tra­ver­sée de Népenthès. Des “Gemmes”, tel Vic­tor Segalen, Paul-Jean Toulet ou René Crev­el, scin­til­lent d’outre-tombe. Nous pou­vons faire “Escales”, dans le n°3, avec Chris­t­ian Girard évo­quant sa vision du fan­tôme de Richard Brauti­gan, le père de la con­tre-cul­ture américaine :

De petites araignées
communes
desséchées
les pattes rabougries
se bal­an­cent aux bouts de leurs fils
comme des boules de Noël
aux extrémités
de sa moustache
gon­flée de poussière

Nous y croi­sons des hom­mages, à Arthur Rim­baud, à Guil­laume Apol­li­naire, des “Dandy loque­teux” tel Jehan Ric­tus, ou des “Sélénites” comme Denis Sam­son en son poème Extrait du Temps :

Assis sous un arbre
dans le filet des ombres
jetées sur nous ;
le vent feuillette
Pierre Reverdy

Juil­let à Québec sur les Plaines
il fait beau, chaud,
l’été oublie
qu’il va finir
tôt ou tard.

On y croise aus­si le ciné­ma sous la plume de Jacques Sicard ; la pein­ture avec Marc Cha­gall ou Mar­cel Gro­maire ; la chan­son avec Ode Des­fonds, et plein d’autres sur­pris­es mir­i­fiques comme ce poème évo­ca­teur de Annie Van de Vyver :

 

L’odeur après l’amour

L’odeur après l’amour de deux corps en sueur
Inhaler tout ton être à m’en couper le souffle
Et du grain de ta peau en pren­dre la senteur
Jusqu’au pro­fond ver­tige où mon amour s’essouffle

A tant te respir­er, à m’ab­sorber de toi
Je suis comme un buvard, je suis comme une éponge
Tu es ma fleur d’amour, tu es mon odorat
Tant je con­fonds en toi tout mon être qui plonge

Comme l’abeille qui sait butin­er la corolle
Je viens en t’in­spi­rant éveiller tous mes sens
Puis pren­dre à plein poumons jusqu’à devenir folle
Je vais cueil­lir en toi l’ef­fluve d’indécence.

 

Le  saviez-vous ? Népenthès est un mot grec Νεπένθος , com­posé de Νε- « non » et de πένθος « tristesse ». Homère en fit boire à Hélène afin qu’elle oublie son pays natal.
S’abon­ner et lire Népenthès aujour­d’hui, c’est ain­si con­jur­er un peu la nos­tal­gie ambiante qui attriste la part aliénée de  l’âme européenne.

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