I. P. Couliano – la dernière victime…

Par |2025-05-07T10:30:47+02:00 6 mai 2025|Catégories : Focus, Ioan Petru Couliano|

Le pro­fesseur I. P. Cou­liano (Ioan Petru Culianu, 1950–1991), his­to­rien des reli­gions dis­ci­ple de Mircea Eli­ade, émi­gré de Roumanie en 1972, établi à Chica­go en 1986, est le pre­mier uni­ver­si­taire à avoir été assas­s­iné par une police poli­tique post-com­mu­niste sur le sol des États-Unis.

Les « aveux » dissimulés du président

Vu le cadre même du crime (per­pétré le 21 mai 19911 dans les toi­lettes du 3e étage de la Divin­i­ty School, à l’Université de Chica­go, insti­tu­tion où le pro­fesseur enseignait depuis quelques années), et la « tech­nique » de la mise à mort (par balle tirée der­rière la tête), l᾿« her­méneu­tique » du meurtre – fournie deux semaines après, avec l’éclat de la plus pure abjec­tion, par le prési­dent roumain de l’époque, Ion Ili­es­cu, lors d’une con­férence de presse télévisée et radiod­if­fusée, don­née le 7 juin 1991 – indique claire­ment un assas­si­nat poli­tique aux relents satanistes, visant surtout l’abaissement, l’avilissement de la vic­time2.

En effet, Ion Ili­es­cu affir­mait, avec les agram­ma­tismes, les men­songes et la langue de bois de rigueur en pareilles cir­con­stances, surtout chez un leader com­mu­niste et post-communiste : 

 

Le jeu de l’émer­aude par Ioan P. Couliano.

On fait de nom­breuses spécu­la­tions au sujet des réserves man­i­festées par les États-Unis ain­si que par d᾿autres pays occi­den­taux à notre égard… Quelles que soient les dif­fi­cultés aux­quelles nous nous voyons con­fron­tés durant cer­taines péri­odes de notre his­toire, nous nous diri­geons, de façon irréversible, vers la démoc­ra­tie, parce que telle est la volon­té du peu­ple roumain, telle est son option et non pour faire plaisir à d’autres. Mais, à ce sujet, s’avèrent sig­ni­fica­tives les réflex­ions d’un haut dig­ni­taire améri­cain (sic!?), qui a été inter­rogé au sujet de ces choses (?), qui en se référant aux soi-dis­ant “ser­vices” ren­dus à la Roumanie par cer­tains de ses citoyens qui dén­i­grent le pays au-dehors [n.s.], dis­ait que de tous les cas de para­noïa qu’il con­nais­sait, la vari­ante roumaine lui sem­blait la plus grave. Et, entre autres, il se référait aus­si au cas de Culianu, le pro­fesseur tué à Chica­go, ancien col­lab­o­ra­teur de Mircea Eli­ade, au sujet duquel il a dit qu’il était un exem­ple d’un tel com­porte­ment de cer­tains cer­cles roumains à l’étranger, inclusivement

les déc­la­ra­tions de l᾿ex-général Pacepa qu᾿il voy­ait la main de la Sécu­ri­tate dans sa mise à mort.3

On apprend donc que pour le prési­dent roumain post-com­mu­niste Ion Ili­es­cu, il y a cer­tains « dén­i­greurs » du pays dont les cri­tiques « au-dehors » sont telles qu’ils sont même devenus un « exem­ple d’un tel com­porte­ment » – sans doute haute­ment blâmable – avec men­tion nom­i­na­tive à I. P. Cou­liano, au point que des rumeurs – jus­ti­fiées, dirait-on ! – se font jour pour accuser la Secu­ri­tate de leur assas­si­nat – à juste titre donc, puisqu’ils sont coupables ! En ayant l’air de s’indigner, comme face à de fauss­es accu­sa­tions, le prési­dent offusqué, en fait, les con­firme. Et surtout, affiche claire­ment le mobile du crime : les cri­tiques de Cou­liano à l’étranger, à l’adresse du pou­voir roumain auto-proclamé en décem­bre 1989. Il s’agit de la suite d’articles que le pro­fesseur de Chica­go a pub­liés durant près de 18 mois, sous le titre de rubrique Scop­tophil­ia, dans le jour­nal new-yorkais Lumea Liberă româ­nescă (Le Monde Libre roumain), dont un visait nom­i­na­tive­ment le prési­dent Ion Ili­es­cu, vu comme héri­ti­er direct de Nico­lae Ceauşes­cu4.

Les « hypothèses » insidieuses

Mais était-ce suff­isant ? Il paraît que non, puisque le 13 juin de la même année, une semaine à peine après la con­férence de presse prési­den­tielle, on pas­sait à la radio (sur la chaîne 1 de Radio Bucarest, au cours de l’émission “24 heures”) une cor­re­spon­dance de Mircea Pod­inǎ con­cer­nant l’enquête. Il est dif­fi­cile d’imaginer un plus com­plet amal­game entre la con­t­a­m­i­na­tion typologique des « textes » de l’assassinat (propo­si­tion­nel, virtuel, réel) et la per­ver­sion des fonc­tions sémi­o­tiques, car­ac­téris­tique pour cette tech­nique de mul­ti­pli­ca­tion des vari­antes qui, tout en déstruc­turant la lec­ture de sur­face par le brouil­lage des pistes, et en ren­forçant le mes­sage sous-jacent, sélec­tionne les lecteurs eux-mêmes (cibles virtuelles du texte réel du crime)5.

En effet, en men­tion­nant des soi-dis­ant « sources de l’émigration roumaine » – car il ne peut être ques­tion d’une véri­ta­ble référence, vu son car­ac­tère nébuleux et invéri­fi­able – ou en faisant appel, tout sim­ple­ment, à « l᾿on dit », Mircea Pod­ină énumère trois caus­es de l’assassinat :

  1. Des recherch­es que le pro­fesseur Cou­liano aurait entre­pris­es au sujet d’organisations secrètes des légion­naires aux États-Unis, par­mi lesquelles celle qui s’intitule “Les Fils d’Avram Ian­cu”, entraî­nant de la sorte la réac­tion vio­lente des organ­i­sa­tions respectives ; 
  2. Le rôle que le pro­fesseur Cou­liano aurait joué dans l’organisation de la vis­ite du roi Michel I de Roumanie à l’Université de Chica­go, l’idée étant que le rap­proche­ment entre le pro­fesseur et l’ancien sou­verain et sa famille aurait pu déranger des milieux poli­tiques, non pré­cisés ; enfin, 
  3. En invo­quant « le dernier numéro» du « jour­nal Lumea Liberǎ Româneascǎ édité à New York » (désor­mais abrégé LLR), numéro aban­don­né au même vague référen­tiel que ses autres « sources », le cor­re­spon­dant nous révèle, chose con­nue de tout le monde, « que le pro­fesseur Culianu était fiancé à Mlle Hillary Wies­ner (…) qu’il devait épouser en août». On se demande quel rap­port aurait pu entretenir ce mariage avec le crime par­ti­c­ulière­ment odieux, que le pro­fesseur Antho­ny Yu avait inter­prété dans le sens d’un crime rit­uel. Jalousie ? Que nen­ni ! Car : « À cause de ce mariage, le pro­fesseur a con­sen­ti à pass­er au judaïsme, ce qui, appré­cie la pub­li­ca­tion préc­itée, aurait pu sig­ni­fi­er pour l’assassin un par­ri­cide moral post-mortem à l’encontre du père spir­ituel (…) Mircea Eli­ade » !

21 mai — Il était une fois Ioan Petru Culianu ! Istoria.

Une affaire de religion ?

On entre, avec cette troisième « hypothèse », dans la galax­ie du plus pur anti­sémitisme, aggravé par cette for­mule igno­ble et absurde entre toutes de « par­ri­cide moral post-mortem à l’encontre du père spir­ituel Mircea Eli­ade ». Sinon, il va sans dire qu’on a affaire là à une « hypothèse » fondée sur une autre et réduite, de ce fait, qua­si­ment à néant, vu le car­ac­tère invéri­fi­able de la sup­posée con­ver­sion de Cou­liano au judaïsme. Vraisem­blable­ment, il s’agit, plutôt, d’une opéra­tion d’intoxication mise en œuvre par les « sémi­oti­ciens du crime » qui sem­blent avoir misé sur le sub­strat anti­sémite et sur la dés­in­for­ma­tion prob­a­ble de bon nom­bre des lecteurs éventuels du « texte » de l’assassinat. Ain­si, l’intoxication con­siste ici non seule­ment dans le con­tenu de l’information, à la lim­ite, calom­nieuse, mais aus­si dans son « cadre de crédi­bil­ité » ou, si l’on veut, dans sa source, puisque l’attribution par M. Pod­inǎ au jour­nal LLR – péri­odique new-yorkais auquel avait col­laboré Cou­liano6 de l’idée de sa con­ver­sion au judaïsme, ce qui « aurait pu sig­ni­fi­er pour l’assassin (?) un par­ri­cide moral post-mortem à l’encontre du père spir­ituel (…) Mircea Eli­ade », est, tout sim­ple­ment, fausse7.

On retrou­ve, ain­si, une astuce con­stante chez les sémi­oti­ciens du crime, à savoir celle de s’abriter der­rière des sources fic­tives (ou plus ou moins habile­ment fal­si­fiées), choisies dans le « camp de crédi­bil­ité » de la vic­time (ain­si, « le haut dig­ni­taire améri­cain » fic­tif, le rap­port fal­si­fié de la police de Chica­go, la fausse appré­ci­a­tion attribuée à LLR)8.

Détail sup­plé­men­taire, insi­dieux jusqu’aux con­fins de l’abject :

Après l’assassinat, elle [Hillary Wies­ner] a pris de l’appartement de M. Culianu trois sacs dont on ignore le con­tenu. En même temps, elle est la béné­fi­ci­aire d’une police d’assurance-vie du pro­fesseur, éval­uée à 150 000 $. Elle avait un compte com­mun avec lui en valeur de 90 000 $.

Il s’agit là d’une tech­nique jouant sur la dés­in­for­ma­tion, voire car­ré­ment sur l’ignorance du pub­lic visé, com­bi­nant le vague insin­u­ant, lim­ite calom­nieux, des références ‒ car toutes ces manœu­vres ser­pen­tesques exis­tent par le tonseule­ment, quand il ne s’agit car­ré­ment d’une téméraire fal­si­fi­ca­tion ‒ avec les préjugés sup­posés du lecteur, aux­quels on fait appel d’un air enten­du, air qui gomme, en quelque sorte, les éventuels doutes, par­faite­ment légitimes par ailleurs, con­cer­nant la fia­bil­ité des sources. Résulte de tout cela un halo de bassesse partagée qui appro­fon­dit le « crime » religieux sup­posé par une impli­ca­tion cra­puleuse, con­for­t­ant encore plus le cliché anti­sémite. Veut-on même impli­quer par-là que Hillary Wies­ner, la fiancée de Cou­liano, aurait été per­son­nelle­ment impliquée dans l’assassinat ? Aus­si absurde qu’elle puisse paraître, il faut dire que l’idée a bien été véhiculée pen­dant un temps. En tout cas, au moment des faits Hillary Wies­ner se trou­vait en Angleterre, à Cam­bridge, si mon sou­venir est bon ! 

« Les Fils d’Avram Iancu »…

Revenons à la pre­mière thèse avancée par le cor­re­spon­dant, celle con­cer­nant les recherch­es soi-dis­ant entre­pris­es par le pro­fesseur Cou­liano « au sujet d’une série d’organisations secrètes des légion­naires des États-Unis, par­mi lesquelles celle qui s’intitule Les Fils d’Avram Ian­cu, entraî­nant de la sorte la réac­tion vio­lente des organ­i­sa­tions respec­tives ». Cela aurait, du moins en apparence, l’air un peu plus cohérent. Le prob­lème est que « Les Fils… » en ques­tion, comme les autres, ne sont que des masques de la Secu­ri­tate elle-même, créés par celle-ci pré­cisé­ment pour mieux cam­ou­fler ses opéra­tions criminelles. 

Quant aux pré­ten­dues recherch­es entre­pris­es par Cou­liano au sujet de ces fameuses « organ­i­sa­tions secrètes de légion­naires », les choses sont un peu plus com­pliquées et pour les éclair­cir nous nous per­me­t­tons de citer un pas­sage de notre étude susmentionnée : 

En Juin 1990, suite à un arti­cle pub­lié dans l’hebdomadaire ital­ien Panora­ma9, Culianu devint la cible de men­aces et d’attaques aus­si bien télé­phoniques qu’écrites10. Le 13 Juin de la même année le prési­dent de la Roumanie, Ion Ili­es­cu, déclen­chait la 3e et cer­taine­ment la plus sanglante “minéri­ade” et dix jours plus tard, en réponse aux atroc­ités com­mis­es par les mineurs (sinon par les agents de la Secu­ri­tate déguisés en “gueules noires” pour les besoins de la cause) Culianu ini­ti­ait, à son tour, le “sér­i­al jour­nal­is­tique” Scop­tophil­ia. Ce fut le sig­nal d’une remar­quable inten­si­fi­ca­tion de la “sémi­o­tique de la men­ace” à laque­lle l’avaient déjà exposé ses pris­es de posi­tion antérieures. Les “cor­re­spon­dants”, d’ailleurs, n’étaient pas, comme on aurait pu s’y atten­dre et comme c’était arrivé dans le cas d’autres opposants visés par la Secu­ri­tate, des “insti­tu­teurs” indignés ou des “bons citoyens” en colère, mais deux organ­i­sa­tions politi­co-ter­ror­istes : Vatra Româneascǎ (l’Âtre Roumain) et Fiii lui Avram Ian­cu (les Fils d’Avram Ian­cu)11. Sans doute, même s’il s’avère, main­tenant, presque impos­si­ble de con­naître le con­tenu exact de ces let­tres12, on peut recon­stituer, du moins en par­tie, leur teneur d’après cer­taines déc­la­ra­tions, par­ti­c­ulière­ment agres­sives, des autorités roumaines de l’époque et en fonc­tion de quelques arti­cles de Scop­tophil­ia – notam­ment “Patri­ote ?ˮ – qui sem­blent con­tenir les répliques à peine codées de Culianu 13.

La visite du roi Michel à Chicago

Cela peut paraître curieux que nous ayons choisi de plac­er en dernière posi­tion la deux­ième « hypothèse » de Mircea Pod­ină. À vrai dire, la rai­son en est fort sim­ple puisque : à la dif­férence des deux autres, sim­ples insin­u­a­tions et com­mérages à teneur anti­sémite, celle-ci ren­ferme un noy­au trag­ique­ment véridique. En effet, il y a des élé­ments con­crets prou­vant que le rôle joué par le pro­fesseur Cou­liano dans l’organisation de la vis­ite du roi Michel à l’Université de Chica­go avait bien dérangé cer­tains milieux poli­tiques, même si le cor­re­spon­dant de Radio Bucarest se garde bien de dire qu’il s’agissait du gou­verne­ment post-com­mu­niste roumain lui-même, présidé par nul autre que Ion Ili­es­cu, le com­man­di­taire plus que prob­a­ble de l’assassinat ‒ surtout si l’on tient compte de sa fort agres­sive con­férence de presse du 7 juin 1991 que nous avons citée au début. En effet, le prési­dent craig­nait comme la peste le ren­force­ment du pres­tige poli­tique de l’ancien roi, qu’il avait fait expulser sur son ordre exprès par deux fois déjà, lors de vis­ites tri­om­phales en Roumanie après 1989, alors qu’Iliescu lui-même tirait sa « légitim­ité » à la tête de l’État de fal­si­fi­ca­tions élec­torales et d’un ensem­ble de tech­niques, lim­ite géno­cidaires, com­bi­nant les « minéri­ades » et les attaques ter­ror­istes14

Ioan Petru Culianu — expert en gnos­ti­cisme et magie de la Renais­sance | L’UE choisit la Roumanie (2015). Radio Roma­nia Regional.

De quoi s’agit-il ? Voyons de plus près quelques faits. Le 2 avril, au cours d’un déje­uner, Cou­liano avoua à Frances Gamwell, l’épouse de l’ancien doyen de la Divin­i­ty School, Chris Gamwell, qu’il était pour­suivi. Onze jours plus tard, dans la nuit du same­di, 13 avril, alors qu’il par­tic­i­pait à une col­lecte de fonds en faveur du roi Michel de Roumanie, en vis­ite à l’Université de Chica­go, Cou­liano se fit presque agress­er par un incon­nu. L’étrange événe­ment se pas­sa dans le hall du Drake Hotel de Chica­go – comme il allait le racon­ter à son ami, le Pro­fesseur Moshe Idel de l’Université Hébraïque de Jérusalem – un endroit plutôt bizarre, pul­lu­lant de fig­ures sus­pectes. L’individu, dont le pardessus fai­sait une bosse, en recou­vrant à peine quelque chose qui ressem­blait fort à une arme, cachée, selon toute vraisem­blance, dans la poche intérieure de son veston, le pous­sa con­tre le mur, tout en proférant des men­aces de mort. « Il m’a dit que si j’allais soutenir le roi, ils me tueraient » (n.s.)15.

Le sens de la manœu­vre se dévoile à l’occasion de deux points sup­plé­men­taires dans les « scé­nar­ios » avancés par Mircea Pod­ină, appelons-les 4 et 5, bien qu’il s’agisse, en réal­ité, d’un pas­sage plutôt homogène que nous allons don­ner ci-dessous :

 4. Ajou­tons encore que les recherch­es sont, en vérité, con­sid­érable­ment gênées par des rumeurs et des accu­sa­tions sans fonde­ment, fait qui a déter­miné le FBI à entraîn­er aus­si dans les efforts de solu­tion­ner le cas un agent par­lant le roumain.

5. Enfin, la con­clu­sion qui s’impose à ce stade des recherch­es, con­clu­sion qui a été con­fir­mée caté­gorique­ment par le départe­ment de la Police de Chica­go, est qu’il ne peut pas être ques­tion d’une quel­conque impli­ca­tion des ser­vices secrets roumains dans ce mal­heureux cas16.

À par­tir de cela tout devient par­faite­ment clair. Les « rumeurs et les accu­sa­tions sans fonde­ment » qui avaient « en vérité, con­sid­érable­ment gêné » l’enquête, déter­mi­nant le FBI « à entraîn­er aus­si dans les efforts de solu­tion­ner le cas un agent par­lant le roumain », sont, bien enten­du, les rumeurs et les accu­sa­tions visant l’innocente Secu­ri­tate, opprimée et per­sé­cutée comme tou­jours par un exil roumain friand d’absurdes ragots (même s’il faut con­sid­ér­er la con­férence de presse du prési­dent Ili­es­cu comme une regret­table boulette). Évidem­ment, « la con­clu­sion qui s’impose à ce stade des recherch­es, con­clu­sion qui a été con­fir­mée caté­gorique­ment par le départe­ment de la Police de Chica­go, est qu’il ne peut pas être ques­tion d’une quel­conque impli­ca­tion des ser­vices secrets roumains dans ce mal­heureux cas ».

« D’où provient cette insis­tance obses­sion­nelle de dis­culper la Secu­ri­tate ? » s’interroge, à juste titre, dans son arti­cle sus­cité, M. Dragomir Costineanu. 

« Le crime de lèse-Eminescu »

Peut-être la meilleure réponse à cette ques­tion est fournie par un autre texte, plus pré­cisé­ment un arti­cle pub­lié le 28 févri­er 1992 dans ce qu’on pour­rait appel­er sans hési­ta­tion l’officieux de la Secu­ri­tate, le jour­nal d’extrême extrême-droite Româ­nia Mare (La Grande Roumanie), jour­nal dégénéré et dirigé ou plutôt führerisé par le cousin poli­tique de Vladimir Jiri­novs­ki, dou­ble roumain aggravé de Jean Marie Le Pen : Cor­neliu Vadim Tudor, inspi­ra­teur prob­a­ble de Nico­las Sarkozy (les deux avaient sym­pa­thisé à l’occasion d’une vis­ite en Roumanie du prési­dent français, qui lui avait emprun­té, en l’adaptant, la fameuse for­mule des Kärcher17).

L’article était paru sous le titre, déjà sug­ges­tif par son inep­tie crim­inelle, de “Crima lez-Emi­nes­cuˮ (Le crime de lèse-Emi­nes­cu)18. Cette infamie, car c’en est pré­cisé­ment une, représente d’ailleurs la plus con­séquente et, cer­taine­ment, la plus dés­espérée ten­ta­tive de la Secu­ri­tate de salir – main­tenant, plus de trente ans après, nous pou­vons le dire, hagiogra­phie oblige, de pro­fan­er ‒ la mémoire de Ioan Petru Cou­liano, et en même temps, de récupér­er une sémi­o­tique du crime que ses organ­isa­teurs sen­taient trop bien leur gliss­er d’entre les mains. 

Si aupar­a­vant nous avions eu affaire à des tech­niques de dés­in­for­ma­tion et d’intoxication, somme toute, plutôt com­munes, bien plus choquantes par l’implication, dans la défense de l’« hon­neur » d’une police poli­tique depuis longtemps com­pro­mise, des plus hautes autorités de l’État, notam­ment du prési­dent de la Roumanie, M. Ion Ili­es­cu ; et si par sa cor­re­spon­dance radio­phonique, M. Pod­ină par­ve­nait bien plus à con­firmer de forts légitimes soupçons que de laver l’image à jamais salie de la plus bête « intel­li­gence » de la planète, pour repren­dre le titre d’un des arti­cles de Cou­liano19‒ dans l’article pub­lié dans le jour­nal de Cor­neliu Vadim Tudor nous décou­vrons une forme par­ti­c­ulière­ment abjecte de « reven­di­ca­tion criminelle ». 

En effet, la dégénéres­cence sémi­o­tique, d’ailleurs inévitable, du « texte du crime », com­binée à la perte pro­gres­sive du con­trôle médi­a­tique de cette fort ténébreuse affaire, ont déter­miné la Secu­ri­tate à pass­er, d’un dis­cours non dépourvu d’agressivité mais essayant de respecter, plus ou moins, les con­ven­tions d’un proces­sus de com­mu­ni­ca­tion con­stru­it d’affirmations fondées sur des sources fic­tives, il est vrai, et de déc­la­ra­tions calom­nieuses inven­tées de toutes pièces, sans doute, mais s’efforçant encore de con­serv­er le cadre vide d’une polémique poli­tique même ignare, ridicule et grotesque, à une langue de bois aggravée par un délire nation­al­iste thana­to-scat­ologique au sens lit­téral du terme. 

On retrou­ve, avec cet arti­cle, la struc­ture volon­taire­ment pro­fana­trice du « texte de l’assassinat », déjà défi­ni comme un pos­si­ble « crime rit­uel », por­teur d’une souil­lure à la fois sym­bol­ique et physique de la vic­time. Très sim­ple­ment, il s’agit d’un trans­fert, celui de la scat­olo­gie rit­u­al­isée de l’acte à la scat­olo­gie pseu­do-judi­ci­aire de la parole, en fan­tas­mant un code inex­is­tant, grossière­ment inspiré d’après l’ancien crimen lae­sae majes­ta­tis et représen­tant, en tant que tel, un inqual­i­fi­able acte de syco­phan­tisme anti-cul­turel. En fin de compte, plus que d’une tran­scrip­tion lan­gag­ière de l’acte, plus même que d’un décodage et d’une glose du crime, il s’agit, ici, d’un aveu et, d’une manière encore plus déci­sive, d’une apolo­gie du crime : une sorte de « lyn­chage sacré » au nom de la nation. 

Essayons de tranch­er dans cette charogne de syl­labes quelques quartiers puru­lents d’infamie (nous pré­cisons que les majus­cules comme les minus­cules ain­si que les éventuels souligne­ments sont dans le texte) :

…il est impos­si­ble de pass­er sous silence, si l’on est roumain, l’abominable crime com­mis par le pyg­mée de Chica­go (…) CONTRE LA CULTURE ROUMAINE (…) Mais le crime le plus affreux du réfugié au méga­lopo­lis des gang­sters nous est divul­gué, avec une para­doxale sérénité de com­plice, par Dorin Tudo­ran20 dans une apolo­gie nauséabonde dédiée à cet excré­ment sur lequel on n’a pas tiré suff­isam­ment d’eau dans le Water Clos­et létal que le des­tin sem­ble lui avoir pré­paré : nous allons citer quelques phras­es du pané­gyrique épreint rédigé par d.t. et qui sont autant d’injures de para­noïaque [on a l’impression d’avoir déjà ren­con­tré ce terme quelque part, on dirait dans la con­férence de presse du prési­dent Ion Ili­es­cu, n.n.] à l’adresse de la Roumanie et de son génie nation­al, l’inégalable Emi­nes­cu… Autrement dit, le salaud de Chica­go nous reproche le fait qu’Eminescu nous a appris à aimer notre pays comme le don le plus pré­cieux que nous ayons reçu avec la vie. Selon l’opinion fer­men­tée dans le cerveau fécaloïde de Culianu (sic!!!), Emi­nes­cu et seule­ment Emi­nes­cu serait coupable du fait que les Roumains souf­frent de patri­o­tisme qui serait une “mal­adie psy­chique”. Par con­séquent (…), Culianu rêvait, pour nous guérir du patri­o­tisme, d’une thérapie de choc, tout comme (…) s’en sont guéris depuis longtemps cer­tains transfuges, ain­si que d’autres, non exilés encore qui, par leur présence ici, souil­lent la terre sur laque­lle ils marchent [on recon­naît ici aisé­ment « les citoyens qui dén­i­grent le pays au-dehors » ain­si que « les cer­cles roumains à l’étranger », dénon­cés par la con­férence de presse ili­esci­enne, cf. supra, n.n.]. Tous, ils s’estiment les sub­or­don­nés priv­ilégiés de ceux qui visent à trans­former la Roumanie en une sorte de colonie divisée [là le lan­gage devient car­ré­ment pou­tinien, évidem­ment avant la let­tre, n.n.], pour mieux asseoir la main­mise des mag­nats de la “super-métro­pole” à laque­lle ils se sont vendus .

Cette util­i­sa­tion d’une « axi­olo­gie » nation­al­iste et, bien enten­du, religieuse pass­able­ment hys­térique, con­sti­tu­ant une sémi­o­tique de la jus­ti­fi­ca­tion du crime, sem­ble doc­u­menter le pas­sage d’une idéolo­gie total­i­taire néo-com­mu­niste, à une espèce de fon­da­men­tal­isme fas­cisant, expres­sion d’une dic­tature par­ti­c­ulière­ment revan­charde du ressentiment. 

Cor­neliu Vadim Tudor (1949–2015), l’auteur plus que prob­a­ble de ces inep­ties21, s’est vu par la suite sus­pendre son immu­nité par­lemen­taire, ayant été inculpé dans 18 procès différents. 

D’autres fables imag­inées plus tard sur le compte de Cou­liano – dépouil­lées de cet acharne­ment psy­chopathe et de cette scat­olo­gie rit­uelle macabre, qui com­bi­nent calom­nies et ragots aux injures les plus grotesques, le tout tra­ver­sé par une indé­ni­able pul­sion coprophag­ique – ont dégringolé ensuite au sous-niveau d’un sen­sa­tion­nal­isme idiot de roman de gare22.

La « sémiotique du crime »

En plus d’un bril­lant his­to­rien des reli­gions, et d’un jour­nal­iste poli­tique red­outable, comme il s’est avéré dans sa série Scop­tophil­ia, Cou­liano était aus­si un remar­quable prosa­teur. Or cette irrup­tion du total­i­tarisme par le crime dans une sphère qui aurait dû lui demeur­er absol­u­ment inabor­d­able, celle des écrivains en tant que pneu­matophores, pour n’être pas tout à fait la pre­mière, s’avérait et la plus bru­tale et la plus choquante par son incroy­able vile­nie. Pour­tant, il ne s’agissait pas de ma pre­mière expéri­ence que je pour­rais qual­i­fi­er comme per­son­nelle et mal­heureuse­ment trau­ma­ti­sante avec l’assassinat d’un écrivain. Mais plutôt de la pre­mière qui, tant par ma matu­rité acquise que par le cadre cir­con­stan­ciel sen­si­ble­ment plus flex­i­ble ‒ je me trou­vais, après tout, en France et non dans la Roumanie à peine post-com­mu­niste, bien que, le cas de Cou­liano le prou­vait ample­ment, cela ne me met­tait pas vrai­ment à l’abri de cer­tains risques ‒ m’ouvrait une pos­si­bil­ité plau­si­ble de réa­gir, et de réa­gir ana­ly­tique­ment. En effet, l’indignation ne vaut pas grand-chose sans un réel mûrisse­ment de la com­préhen­sion, de la capac­ité de trans­former le sim­ple cri en élu­ci­da­tion des raisons et des méth­odes sous-jacentes, sans quoi les sophismes de la « sémi­o­tique du crime » risquent de vous égarer. 

Car, après tout, tout est bataille d’image dans la ver­sion actuelle de ce bas monde, qu’il s’agisse d’assassinats ou de guer­res, peut-être de guer­res plus encore. Tant les bom­barde­ments de la pro­pa­gande et de l’info-propagande sont simul­tanés, même si pas tout à fait con­comi­tants, de la pro­pa­gande des bombes. Oh ! je n’en doute pas, on fini­ra par con­tem­pler l’Apocalypse à la télé jusqu’à la dernière sec­onde !… Pour pass­er ensuite au grand show escha­tologique, quelle qu’en soit la forme… 

Notes

[1] Par une étrange coïn­ci­dence, le même jour où, en Inde, était assas­s­iné Rajiv Gandhi.

[2] La date, déjà, était tout sauf indif­férente. En effet, comme le pro­fesseur Antho­ny Yu l᾿avait bien com­pris, l’assassinat de Culianu se lais­sait lire comme un meurtre rit­uel, le 21 mai coïn­ci­dant avec le jour de la fête de sa mère: «The date of the crime was rit­u­al­ly sig­nif­i­cant: May 21 in the Ortho­dox Church is Saint Helen’s and Constantine’s Day, Culianu’s mother’s name day. The name day in Ortho­doxy com­mem­o­rates a person’s bap­tism into the sacred realm. Dur­ing Ioan’s years of exile, his mail was rou­tine­ly delayed and opened, but for nine­teen years the card he had sent his moth­er on her name day always arrived prompt­ly and unopened. (…) A mur­der site is a text, and Culianu᾿s col­league Antho­ny Yu ana­lyzed the bath­room locale of his close friend’s mur­der. “It was rit­u­al­ly sig­nif­i­cant. It con­veys sym­bol­ic and phys­i­cal humil­i­a­tion, stain, impu­ri­ty, a most pro­fane site to end a life… In fact, I᾿ve often won­dered if it was a cult killing”» (apud Ted Anton, Eros, mag­ic and the mur­der of Pro­fes­sor Culianu, North­west­ern Uni­ver­si­ty Press, Evanston, 1996, p. 250 : désor­mais abrégé EMMPC). À cela il faut ajouter la remar­que du poète et essay­iste Andrei Codres­cu: « Such dis­in­for­ma­tion was a “trade­mark of Secu­ri­tate”, accord­ing to Andrei Codres­cu. The humil­i­at­ing man­ner of the mur­der, and the choice of a less­er known fig­ure whose dis­ap­per­ance would con­fuse and demor­al­ize oppo­nents, was anoth­er trade­mark. Culianu᾿s harasse­ment, com­bined with the dis­in­for­ma­tion after the crime, at the very least mer­it­ed gov­ern­ment response» (apud Ted Anton, ibid., p. 276).

[3] Voir notre étude “Les sept trans­gres­sions de Ioan Petru Culianu. Frac­tals, des­tin et her­méneu­tique religieuse”, dans Les cahiers «Psy­chan­odia», N° 1, Mai 2011, n. 120 (désor­mais en ligne sur https://adshishma.net/Publications-Accueil.html). Les textes cités à par­tir de sources en roumain sont don­nés dans notre traduction.

[4] Il s’agit de l’article Dia­logul morţilor (Le dia­logue des morts) qui met en scène les deux per­son­nages complices.

[5] Pour cette typolo­gie des « textes » de l’assassinat, voir encore notre étude citée à la note 3 ci-dessus.

[6] Il s’agit de la rubrique Scop­tophil­ia à tra­vers laque­lle Culianu avait exer­cé, pen­dant plus de 11 mois (entre le 6 jan­vi­er et le 22 décem­bre 1990), un “voyeurisme” politi­co-cul­turel, fort dérangeant pour cer­tains milieux poli­tiques post-com­mu­nistes roumains ain­si que, surtout, pour la plus bête des “intel­li­gences”, la Secu­ri­tate. Le lecteur roumanophone peut avoir accès à la prose poli­tique de Culianu en lisant Păcat­ul împotri­va spir­i­t­u­lui (Le péché con­tre l’esprit), édi­tions Nemi­ra, 1999.

[7] Cf. Dragomir Costineanu, “Les mys­tères de la mort de I.P. Culianu”, dans Lupta/Le Com­bat, n° 211/7 octo­bre, 1993 (en roumain).

[8] L’obsession des “sémi­oti­ciens du crime” de con­trôler non seule­ment le signe émis mais surtout son code de lec­ture, voire sa tra­jec­toire inter­pré­ta­tive, ain­si que, plus com­muné­ment dans un sens, la tra­jec­toire de l’enquête, transparaît de l’impertinente offre de col­lab­o­ra­tion faite au FBI par Vir­gil Măgure­anu, le directeur de l’époque du Ser­vice Roumain d’Information (SRI), offre qui cachait mal, sous l’ironie et même l’arrogance de sur­face, l’inquiétude de pro­fondeur (v. notre arti­cle “Mas­ca şi mesajul. Bilanţul unei morţi anunţate” / “Le masque et le mes­sage. Le bilan d’une mort annon­cée”, dans Écrits cri­tiques et poli­tiques, 1980–2022, Les Cahiers «Psy­chan­odia», n° 3, Mai-Juin, 2022, p. 86 – à lire sur le site https://adshishma.net/Publications-Accueil.html).

[9] I.P. Culianu, “La real­ta? Sono dueˮ, Panora­ma, le 3 juin, 1990, p. 107.

[10] Cf. Ted Anton, EMMPC (op. cit. note 2), p. 194 ; v. aus­si G. Casa­dio, “Ioan Petru Cou­liano et la con­tra­dic­tionˮ, dans Ascen­sion et hypostases ini­ti­a­tiques de l’âme. Mys­tique et escha­tolo­gie à tra­vers les tra­di­tions religieuses, Phōs, 2006, pp. 33–34 (désor­mais en ligne sur le site https://adshishma.net/Publications-Accueil.html).

[11] Pour Vatra Româneascǎ voir notre étude citée à la note 3, § 2.2.3.2. Quant aux « Fils… », il s’agit d’une organ­i­sa­tion ter­ror­iste d’avant la « révo­lu­tion » roumaine, créée par la Secu­ri­tate, dont le but était l’intimidation, voire par­fois la sup­pres­sion des opposants de l’Exil roumain. « Secu­ri­tate often invent­ed fas­cist groups to threat­en exiles, and Ger­man jour­nal­ist Richard Wag­n­er traced “the Sons of Avram Ian­cu” direct­ly to it » (Ted Anton, EMMPC, p. 206). D’ailleurs, « les Fils d’Avram Ian­cu » n’était ni la seule, ni même la plus anci­enne organ­i­sa­tion ter­ror­iste fas­cisante créée par la Secu­ri­tate à l’encontre de l’émigration roumaine et, notam­ment, à l’encontre de Radio Free Europe : « Plusieurs let­tres de men­aces lui furent égale­ment envoyé (à Émile Georges­cu, jour­nal­iste à RFE n.n.), l’avertissant qu’il serait tué et sa mai­son incendiée s’il pour­suiv­ait ses activ­ités au ser­vice de ses “patrons juifs”. Ces let­tres sem­blaient éman­er d’une aile ter­ror­iste de l’organisation fas­ciste en exil, la Garde de Fer, et étaient signées “Groupe Vˮ. Bien enten­du, le Groupe V avait été inven­té de toutes pièces par le DIE (Départe­ment des Infor­ma­tions Externes n.n.). Pour le ren­dre plus crédi­ble, des let­tres sim­i­laires furent envoyées à d’autres roumains vivant à l’Ouest : Noël Bernard, ancien respon­s­able du Départe­ment roumain de Radio Free Europe, très pop­u­laire en Roumanie grâce à sa cri­tique acerbe du régime, Paul Goma et Vir­gil Tǎnase, deux dis­si­dents très act­ifs instal­lés en France, l’ancien roi Michel de Roumanie, exilé en Suisse, et le célèbre écrivain Eugène Ionesco, mem­bre de l’Académie française. Une opéra­tion de chan­tage fut égale­ment ten­tée, visant à forcer Georges­cu à démis­sion­ner “volon­taire­ment” de son poste en échange d’un visa de sor­tie pour sa vieille mère, qui vivait encore à Bucarest (…) Bucarest n’a jamais réus­si à com­pro­met­tre Emil Georges­cu, qui a con­tin­ué à dif­fuser ses féro­ces cri­tiques de Ceauşes­cu. Le matin du 28 juil­let 1981, Georges­cu fut frap­pé de vingt-deux coups de couteau par deux trafi­quants français alors qu’il quit­tait son domi­cile muni­chois. Le rap­port annuel du min­istère de l’Intérieur alle­mand présen­tant les actions les plus impor­tantes du Bun­de­samt für Ver­fas­sungss­chutz pub­lié en 1983 pré­cise : “La vic­time a pu être sauvée grâce à l’arrivée rapi­de des sec­ours. Les mal­fai­teurs ont été arrêtés et con­damnés à plusieurs années de prison. Ils ont obstiné­ment refusé de révéler l’identité de ceux qui avaient com­man­dité le meurtre. Après cette ten­ta­tive mal­heureuse, il sem­ble que d’autres agents de Roumanie aient été chargés de liq­uider l’émigré roumain une fois pour toutes”» (Ion Mihai Pacepa, Hori­zons rouges, 1988, p. 126).

Le par­al­lélisme des deux cas – Émile Georges­cu et Culianu – tant sur le plan “sémi­o­tique” que méthodologique est telle­ment évi­dent qu’il devient qua­si­ment inutile qu’on s’y attarde. En effet, non seule­ment le scé­nario des let­tres de men­ace envoyées par une organ­i­sa­tion fas­cisante créée pour les besoins de la cause par la Secu­ri­tate, suiv­ies d’une ten­ta­tive d’assassinat – man­quée tem­po­raire­ment dans un cas, réussie d’emblée dans l’autre – con­cor­dent, mais l’on retrou­ve, en plus, le même halo d’excitation anti­sémite autour de la vic­time poten­tielle. À vrai dire, seule l’arme du crime dif­fère ! (cf. notre op.cit.., ibid. n. 86).

[12] La plu­part détru­ites par Culianu lui-même qui, soit par mépris, surtout au début, soit par anx­iété (pro­gres­sive­ment), a con­stam­ment refusé de met­tre au courant la police améri­caine des men­aces dont il fai­sait l’objet, et cela mal­gré les con­seils réitérés de ses amis. La meilleure déf­i­ni­tion de cette atti­tude, pour le moins ambiva­lente, appar­tient, d’ailleurs, à la fiancée de Culianu, Mlle Hillary Wies­ner : « Il avait la logique du magi­cien. Il pen­sait : “Si je déchire et détru­is rit­uelle­ment ces papiers, les cir­con­stances qui guet­tent der­rière eux vont être neu­tral­isées” » (Ted Anton, EMMPC, p. 206).

[13] Cf. notre étude citée à la note 3, § 2.2.3.3. Dans son ouvrage sus­men­tion­né (note 2) Ted Anton pré­cise : « When they [I.P. Culiano et Hillary Wies­ner, n.n.] came back to Boston he found more let­ters for­ward­ed by Lumea Liberă. He called his friend Dorin Tudo­ran. “The let­ters were sim­i­lar to those I received,” Tudo­ran said, “from a group claim­ing to be the Sons of Avram Ian­cu.” Hatch­ets, large knives, and drip­ping blood dec­o­rat­ed the page, which promised: “Our arms will hit those who accept wages to pro­fane their nation, and we will put them to sleep in dis­grace for­ev­er.” » (EMMPC, p. 206). Donc des haches, des couteaux et des gouttes de sang asso­ciés à une rhé­torique de la trahi­son de la patrie… Voilà pour les « recherch­es » de Ioan Petru Culianu con­cer­nant cette « série d’organisations secrètes des légion­naires des États-Unis, par­mi lesquelles celle qui s’intitule “Les Fils d’Avram Ian­cu” ».

Quant à Avram Ian­cu lui-même, duquel se revendiquent ces bâtards crim­inels, il s᾿agit d᾿un fomi­da­ble révo­lu­tion­naire, avo­cat de for­ma­tion, organ­isa­teur et chef de la révo­lu­tion de 1848 en Tran­syl­vanie, de loin la plus énergique et la plus effi­cace des trois révo­lu­tions roumaines de l’époque, vu qu’elle a duré jusqu’en 1849, mal­gré le fait que Kos­suth avait refusé l’alliance avec les révo­lu­tion­naires roumains. Finale­ment, ç᾿a été un « men­songe impér­i­al », celui du très jeune François-Joseph ‒ men­songe qui fai­sait suite à un autre, du même genre, celui du « despote éclairé » Josèphe II (en 1784) con­tre un autre révo­lu­tion­naire roumain, Horea ‒ qui a per­mis l’étouffement de la révo­lu­tion. Horea, lui, a été roué ; sans subir de sup­plice, Avram Ian­cu est devenu, tout sim­ple­ment, fou. Vis­i­ble­ment, rouer les gens était passé de mode.

[14] Cette his­toire des « ter­ror­istes », la plu­part du temps des snipers qui frap­paient et dis­parais­saient comme venus de nulle part, a longtemps obsédé les media roumains, jusqu’à ce qu’une émis­sion sur la chaîne ARTE ait fini par apporter des lumières com­plète­ment inat­ten­dues sur le sujet, impli­quant, curieuse­ment, plusieurs ser­vices secrets étrangers, occi­den­taux ou (encore) sovié­tiques. Or, si la présence des derniers n’avait en soi rien de sur­prenant, les « aveux », par­fois frap­pants de fran­chise froide, des pre­miers (faut-il dans ce cas aus­si par­ler de « com­pen­sa­tion aléthéique » ?) avaient de quoi éton­ner. Quant au rôle joué par la fal­si­fi­ca­tion infor­ma­tique dans le proces­sus élec­toral roumain, voir notre arti­cle “Qui-pro-quoˮ dans Les cahiers « Psy­chan­odia » n° 3, à lire (en roumain) sur le site https://adshishma.net/Publications-Accueil.html.

[15] Apud Ted Anton, EMMPC (cité n. 2), pp. 232–233 ; v. aus­si notre étude (op. cit. note 3), n. 105.

[16] Apud D. Costineanu (art. cit. note 4).

[17] Avec cette petite dif­férence que si M. Sarkozy envis­ageait utilis­er les net­toyeurs en ques­tion exclu­sive­ment con­tre ce qu’il appelait fort déli­cate­ment la « racaille » dont il comp­tait débar­rass­er les Français, C.V.T., bien plus rad­i­cal, menaçait de gou­vern­er, en cas d’arrivée au pou­voir, « à la mitrailleuse ». Kärcher, mitrailleuse ‒ le con­traste demeure, quand-même, sai­sis­sant (démoc­ra­tie oblige…).

[18] Inep­tie sans doute crim­inelle car, comme nous l’avons mon­tré en détail, Mihai Emi­nes­cu, indu­bitable­ment le plus grand poète des Roumains, fig­ure astrale de rebelle roman­tique, avait aus­si, en son temps, été assas­s­iné par la forme monar­chique de ce qu’allait devenir le total­i­tarisme mod­erne roumain (Les Cahiers « Psy­chan­odia » n° 4, juin 2023, sur https://adshishma.net/Publications-Accueil.html, ain­si que, désor­mais, La Let­tre du PEN Club français n° 38, pp. 8–20). 

[19] “Cea mai proastă inteligenţă” (“La plus bête intel­li­gence”), arti­cle en deux par­ties, pub­lié suc­ces­sive­ment dans Lumea liberă românească, n° 94, 21 juil­let 1990 et n° 96, 28 juil­let 1990 (repris dans Păcat­ul împotri­va spir­i­t­u­lui (Le péché con­tre l᾿esprit), édi­tions Nemi­ra, 1999, pp. 99–104). Pour mieux saisir l’esprit du texte, nous nous per­me­t­tons de don­ner une petite cita­tion, assez éclairante : « L’une des innom­brables ‒ mais non des moins impor­tantes ‒ raisons pour laque­lle la Roumanie aspire à un lieu unique dans le monde est son ser­vice d’intelligence. Car on peut affirmer sans hésiter : la Roumanie se trou­ve à la pre­mière place en ce qui con­cerne la bêtise de son Intel­li­gence » (art.cit. p. 99). Faut-il encore s’étonner qu’après s’être fait si dure­ment insul­ter, l᾿« intel­li­gence » en ques­tion ait voulu pren­dre, intel­lectuelle­ment par­lant, sa revanche par une balle ?!

[20] Poète et jour­nal­iste roumain, à l’époque opposant du régime com­mu­niste de Ceauşes­cu et post-com­mu­niste de Ion Iliescu.

[21] Bien que le sig­nataire de l’article soit un cer­tain Leonard Gavril­iu, tra­duc­teur en roumain de Freud. Inter­rogé par M. Ted Anton au sujet de ce texte, Leonard Gavril­iu a nié en être l’auteur, bien qu’il ait dû, dans des con­di­tions mal éclair­cies, prêter son nom à cette igno­minie. Pour plus d’éléments voir notre étude citée note 3, n. 146.

[22] Voir notre étude citée note 3, n. 147.

Présentation de l’auteur

Ioan Petru Couliano

Ioan Petru Culianu ou Cou­liano (5 jan­vi­er 1950 — 21 mai 1991) était un his­to­rien roumain des reli­gions, de la cul­ture et des idées, un philosophe et un essay­iste poli­tique, ain­si qu’un auteur de nou­velles. Il a été pro­fesseur d’his­toire des reli­gions à l’u­ni­ver­sité de Chica­go de 1988 à sa mort, et avait aupar­a­vant enseigné l’his­toire de la cul­ture roumaine à l’u­ni­ver­sité de Groningue.

Spé­cial­iste du gnos­ti­cisme et de la magie de la Renais­sance, il a été encour­agé par Mircea Eli­ade et s’est lié d’ami­tié avec lui, même s’il s’est pro­gres­sive­ment éloigné de son men­tor. Culianu a pub­lié des travaux fon­da­men­taux sur les rela­tions entre l’oc­cultisme, l’éros, la magie, la physique et l’histoire.

Culianu a été assas­s­iné en 1991. On a beau­coup spéculé sur le fait que son assas­si­nat était la con­séquence de sa vision cri­tique de la poli­tique nationale roumaine. Cer­taines fac­tions de la droite poli­tique roumaine ont ouverte­ment célébré son assassinat[1]. La Secu­ri­tate roumaine, qu’il a un jour dénon­cée comme une force « d’une stu­pid­ité d’époque », a égale­ment été soupçon­née d’être impliquée et d’u­tilis­er des fronts fan­toches de la droite comme couverture.

Bibliographie 

Essais

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  • Éros et Magie à la Renais­sance. 1484, Paris, Flam­mar­i­on, 1984; Eros and Mag­ic in the Renais­sance, Chica­go, Uni­ver­si­ty of Chica­go Press, 1987; Eros e magia nel Rinasci­men­to: La con­giun­zione astro­log­i­ca del 1484, Milano, Il Sag­gia­tore – A. Mon­dadori, 1987; Eros şi magie în Renaştere. 1484, București, Nemi­ra, 1994, 1999 ; Iaşi, Polirom, 2003, 2011, 2015; Eros y magia en el Renacimien­to. 1484, Madrid, Edi­ciones Siru­ela, 1999
  • Expéri­ences de l’ex­tase: Extase, ascen­sion et réc­it vision­naire de l’hel­lénisme au Moyen Age, Paris, Pay­ot, 1984; Expe­rien­ze del­l’es­tasi dal­l’El­lenis­mo al Medio­e­vo, Bari, Lat­erza, 1986
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  • I viag­gi del­l’an­i­ma, Milano, Arnol­do Mon­dadori Edi­tore, 1991
  • The Tree of Gno­sis : Gnos­tic Mythol­o­gy from Ear­ly Chris­tian­i­ty to Mod­ern Nihilism, San Fran­cis­co, Harper­Collins, 1992; Arborele gnozei. Mitolo­gia gnos­tică de la creş­tin­is­mul tim­puriu la nihilis­mul mod­ern, București, Nemi­ra, 1999; Iasi, Polirom, 2005, 2015
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  • Religie şi put­ere, București, Nemi­ra, 1996; Iași, Polirom, 2005
  • Psi­han­odia, București, Nemi­ra, 1997, Iași, Polirom, 2006
  • Păcat­ul împotri­va spir­i­t­u­lui. Scrieri politice, București, Nemi­ra, 1999; Iași, Polirom, 2005, 2013
  • Studii româneşti I. Fan­tas­mele nihilis­mu­lui. Secre­tul Doc­toru­lui Eli­ade, București, Nemi­ra, 2000; Iași, Polirom, 2006
  • “Studii românești II. Soarele și Luna. Otrăvurile admi­rației”, Iași, Polirom, 2009
  • “Iter in sil­vis I. Eseuri despre gnoză și alte studii”, Iași, Polirom, 2012
  • “Iter in sil­vis II. Gnoză și magie”, Iași, Polirom, 2013
  • Jocurile minţii. Isto­ria ideilor, teo­ria cul­turii, epis­te­molo­gie, Iaşi, Polirom, 2002
  • Iocari serio. Şti­inţa şi arta în gîndi­rea Renaş­terii, Iaşi, Polirom, 2003
  • Cult, magie, erezii. Arti­cole din enci­clo­pe­dii ale religi­ilor, Iaşi, Polirom, 2003
  • “Mar­silio Fici­no (1433–1499) si prob­lemele pla­ton­is­mu­lui in Renastere, Iasi, Polirom, 2015
  • Dia­loguri intre­rupte. Core­spon­den­ta Mircea Eli­ade-Ioan Petru Culianu, Iasi, Polirom, 2004, 2013 

Ouvrages collectifs

  • With Mircea Eli­ade and H.S. Wies­ner: Dic­tio­n­naire des Reli­gions, Avec la col­lab­o­ra­tion de H.S. Wies­ner. Paris, Plon, 1990, 1992(2); The Eli­ade Guide to World Reli­gions, Harp­er, San Fran­cis­co, 1991; Hand­buch der Reli­gio­nen, Zürich und München, Artemis-Win­k­ler-Ver­lag, 1991; Suhrkamp-Taschen­buch, 1995; Dic­cionario de las reli­giones Barcelona, Pai­dos Ori­en­talia, 1993; Dicţionarul religi­ilor, București, Human­i­tas, 1993, 1996(2); Iași, Polirom, 2007
  • The Ency­clo­pe­dia of Reli­gion, Col­lier Macmil­lan, New York, 1987
  • The Harper­Collins Con­cise Guide to World Reli­gions, Harp­er, San Fran­cis­co, 2000

Fiction

  • La collezione di smeral­di. Rac­con­ti, Milano, Jaca Book, 1989
  • Hes­pe­rus, București, Univers, 1992; București, Nemi­ra, 1998 ; Iaşi, Polirom, 2003
  • Perga­men­tul diafan. Pove­stiri, București, Nemi­ra, 1994
  • Perga­men­tul diafan. Ultimele pove­stiri, București, Nemi­ra, 1996 ; Iaşi, Polirom, 2002
  • Arta fugii. Pove­stiri, Iași, Polirom, 2002
  • Jocul de smar­ald, Iași, Polirom, 2005, 2011
  • “Toz­grec, Iași, Polirom, 2010

Autre

  • Dia­loguri între­rupte. Core­spon­dența Mircea Eli­ade – Ioan Petru Culianu, Iași, Polirom, 2004

Poèmes choi­sis

Autres lec­tures

I. P. Couliano – la dernière victime…

Le pro­fesseur I. P. Cou­liano (Ioan Petru Culianu, 1950–1991), his­to­rien des reli­gions dis­ci­ple de Mircea Eli­ade, émi­gré de Roumanie en 1972, établi à Chica­go en 1986, est le pre­mier uni­ver­si­taire à avoir été […]

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Ara Alexandre Shishmanian

Né à Bucarest en 1951, diplômé de la fac­ulté de langues romanes, clas­siques et ori­en­tales, avec une thèse sur le Sac­ri­fice védique, opposant au régime com­mu­niste, Ara Alexan­dre Shish­man­ian a quit­té défini­tive­ment la Roumanie en 1983. Poète et his­to­rien des reli­gions, il est l’auteur de plusieurs études sur l’Inde védique et la Gnose, parues dans des pub­li­ca­tions de spé­cial­ité en Bel­gique, France, Ital­ie, Roumanie, États-Unis (dont les actes du col­loque « Psy­chan­odia » qu’il a organ­isé à Paris sous l’égide de l’INALCO en mémoire de I. P. Cou­liano, dis­ci­ple de Mircea Eli­ade : Ascen­sion et hypostases ini­ti­a­tiques de l’âme. Mys­tique et escha­tolo­gie à tra­vers les tra­di­tions religieuses, 2006, et le pre­mier numéro d’une pub­li­ca­tion péri­odique : Les cahiers Psy­chan­odia, I, 2011 ; ces deux pub­li­ca­tions sont éditées par l’Association « Les amis de I. P. Cou­liano » qu’il a créée en 2005). Il est égale­ment l’auteur de 18 vol­umes de poèmes parus en Roumanie depuis 1997 : Priviri / Regards, Ochi­ul Orb / L’oeil aveu­gle, Tirezi­a­da / La tirési­ade, regroupés dans Trip­tic / Trip­tyque (2001, éd. Cartea românească), le cycle Migrene / Migraines, I‑VI (2003–2017), le cycle Absenţe / Absences, I‑IV (2008–2011), et enfin Neştiute / Mécon­nues, I‑V (2012, 2014, 2015, 2018). Il est égale­ment l’auteur de 18 vol­umes de poèmes parus en Roumanie depuis 1997 : Priviri / Regards, Ochi­ul Orb / L’oeil aveu­gle, Tirezi­a­da / La tirési­ade, regroupés dans Trip­tic / Trip­tyque (2001, éd. Cartea românească), le cycle Migrene / Migraines, I‑VI (2003–2017), le cycle Absenţe / Absences, I‑IV (2008–2011), et enfin Neştiute / Mécon­nues, I‑V (2012, 2014, 2015, 2018). Deux vol­umes de poèmes traduits en français par Dana Shish­man­ian sont parus aux édi­tions L’Harmattan, dans la col­lec­tion Accent tonique : Fenêtre avec esseule­ment (2014), et Le sang de la ville (2016), les deux plusieurs fois recen­sés dans des revues lit­téraires français­es (dont Recours au poème). Il est égale­ment l’auteur de 30 vol­umes de poèmes parus en roumain depuis 1997 : Priviri / Regards, Ochi­ul Orb / L’oeil aveu­gle, Tirezi­a­da / La Tirési­ade, regroupés dans Trip­tic / Trip­tyque (2001, éd. Cartea românească), le cycle Migrene / Migraines, I‑VI (2003–2017), le cycle Absenţe / Absences, I‑IV (2008–2011), enfin Neştiute / Mécon­nues, I‑V (2012, 2014, 2015, 2018), Menue­tul men­estre­lu­lui mor­bid / Le ménuet du ménestrel mor­bide (2019), Staze şi enstaze / Stases et enstases (2021), Zdrenţe / Hail­lons, I‑IV (2022–2025), Onirice / Oniriques, I‑II (2022–2023), Leta­la lunii / La létale de la lune (2024). À ce jour, six vol­umes de poèmes sont parus en France, traduits par Dana Shish­man­ian, avec la révi­sion de l’au­teur: Fenêtre avec esseule­ment (2014), Le sang de la ville (2016), Les non-êtres imag­i­naires (2020), et Orphée lunaire (2021), aux édi­tions L’Harmattan, dans la col­lec­tion Accent tonique ; Mi-graines (2021), à Echap­pée belle édi­tion; enfin, La létale de la lune (2024), en autoédi­tion (PHOS). Ils ont été plusieurs fois recen­sés dans des revues lit­téraires français­es (dont Recours au poème).

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