Dominique Sampiero, Où vont les robes la nuit, extraits, et poèmes inédits

Par |2019-05-04T19:28:03+02:00 4 mai 2019|Catégories : Dominique Sampiero, Poèmes|

 

Où vont les robes le nuit, extraits

 

 

Un matin, j’ai ouvert les portes de la maison
et j’ai invité le nuage le plus ani­mal à entr­er. Puis
j’ai décroché ta petite robe noire de son cin­tre de 
bois clair dans l’ar­moire cirée où dor­ment encore
toutes tes enveloppes.

 

∗∗∗∗

 

 

Mais un matin
le manque m’a chuchoté
cette porcelaine
d’une phrase

Si tu laiss­es la robe
dans le lit d’herbe de ton jardin
elle va germer
et les con­tours du paysage
lui dessineront
des seins
des hanches

le manque de l’homme
que tu as été.

 

∗∗∗∗

 

 

 

 

 

 

J’ai atten­du sous la coque noc­turne du bateau de
cen­dre, là où on avait tant nav­igué, là où la houle
de nos caress­es griffe encore la pous­sière de cette
fièvre noire, épaisse comme le néant sous le lit, j’ai
atten­du que ton corps me mur­mure, me sup­plie de 
te ser­rer dans mes bras.

 

∗∗∗∗

 

 

Où vont les robes la nuit
quand les femmes
les déposent en offrande
à leur chaise ?

Où va l’âme des femmes
endormie dans le cri de l’herbe

 

∗∗∗∗

 

 

Un jour les phras­es rejoignent exacte­ment ce 
qu’elles ont appris à dire. C’est ce que ta main a
ren­du à la mienne en la ser­rant très fort.

 

 

 

Basse résolution

Présentation de l’auteur

Dominique Sampiero

Dominique Sampiero est né dans l’Avesnois, région de prairie, de forêt, de bocage du Nord de la France, l’hiver où l’abbé Pierre lance son appel pour les sans-logis, quelques jours après la mort de Matisse et le même mois que la démis­sion de Mar­guerite Duras du Par­ti Communiste.

Insti­tu­teur et directeur en école mater­nelle à par­tir de 1970 et pen­dant une ving­taine d’années, mil­i­tant des péd­a­go­gies Freinet, Montes­sori, Rudolph Stein­er et de la pen­sée human­iste de Françoise Dolto, il démis­sionne de l’Education nationale en 2000 pour se con­sacr­er entière­ment à l’écriture.

Poète (Prix Gan­zo 2014 pour La vie est chaude, édi­tions Bruno Doucey et pour l’ensemble de son œuvre), romanci­er (Le rebu­tant, Gal­li­mard, prix du roman Pop­uliste 2003), auteur de livres jeuness­es (P’tite mère, Prix sor­cière 2004) mais aus­si scé­nar­iste (Ça com­mence aujourd’hui, Prix inter­na­tion­al de la cri­tique à Berlin, et Holy Lola, deux films réal­isés par Bertrand Tav­ernier) auteur de théâtre (Tchat­Land / Le bleu est au fond) et réal­isa­teur de courts métrages (La dormeuse / On est méchant avec ceux qu’on aime), il reste pro­fondé­ment attaché à sa région natale et une grande par­tie de son écri­t­ure par­le de la lumière des paysages et des vies minus­cules en lutte avec leur pro­pre silence et l’oubli.

Son dernier roman Le sen­ti­ment de l’inachevé paru en Avril 2016 chez Gal­li­mard est une plongée dans l’enfance à tra­vers laque­lle il racon­te une his­toire d’amour qui lais­sera une empreinte forte dans son élan vers l’écriture. La petite fille qui a per­du sa langue (Gal­li­mard jeunesse Giboulées. Illus­tra­tions Bruno Liance ) a été écrit avec des enfants en dif­fi­culté sco­laire. Les édi­tions de la Rumeur Libre ont pub­lié le pre­mier tome de l’ensemble de ses textes poétiques.

Pho­to de Jacques Van Roy.

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