LE POSSIBLE

 

s’il n’y a pas d’oiseau pour l’emmener
où ira le vent levé
où se per­dra l’âme égarée
allons cama­rades de la glèbe
ne tré­pas­sons pas trop tôt
ayons le courage d’arpenter le possible

 

 

CHARTRES

 

la Beauce ouverte au ciel mou­vante exac­ti­tude des marcheurs dans l’ombre des églis­es closes
maintenant

quel blé quelle moisson

les sil­lons s’étouffent de tant d’appauvrissement

les pales des éoli­ennes trahissent le vol des ramiers

les bosquets trans­par­ents de tant de coupes peinent à tenir au chaud l’ombre du soleil

pas à pas la poussière

osant le ciel les deux épines de la cathédrale

ces pas si accordés ce sont ceux de Péguy qui nous dépasse il est déjà loin que nous sommes
encore à tarder

il n’a pas fini d’écarter ce qui retient

 

 

EPAULE RONDE

 

faut il que la colère s’enraye pour percevoir l’unité
fut ain­si la démarche
le soleil brille
la terre respire
les arbres croissent
les oiseaux s’envolent
faut il que marcher pas à pas apaise

le sen­tier lourd de haies pleines de mûres
que la cueil­lette soit que la con­fi­ture prenne

que le sens s’annonce dans la courbe

il y eut des épaules rondes

 

 

LA PREMIERE MARCHE

 

nous sommes sur la pre­mière marche
celle qui pèse

on a fait un rem­blai de cail­loux de chif­fons de glaise collante
de mots pour tenir l’ensemble
de mots écrits sur les planches
de mots dess­inés à la craie
de mots pour le futur

debout sur la pre­mière marche

on arrivera peut être à mon­ter sur la deux­ième puis sur la troisième
dans l’espoir d’oser regarder qui penche

est-ce le Christ sur sa croix
ou l’ombre d’un bananier précoce

il y avait au car­refour un Cal­vaire entre deux arbres magnifiques
il n’en reste plus qu’un
l’autre est mort
desséché

mais sans espoir ni dés­espoir l’oiseau chante à l’unisson des syl­labiques errances
quand l’aube jail­lit pour plaire

 

 

SOLDAT

 

sen retour­na
casque dorties blanch­es
les fleurs pour­ris­sent vite
sen retour­na
breton
le gran­it tient la route vers le ciel
dur

 

 

UN JOUR DE PRINTEMPS

 

la nappe brodée de soleil et d’air
tran­chait sur le vert
ils s’y déposèrent en silence pour franchir l’inconnu paysage
s’y déposèrent de tous leurs os et tendons
de leur âme ils igno­raient qu’elle fut ce lieu de gravitation
ils ne savaient pas qu’ils avaient le droit de croire

un jour de print­emps léger de lumière
ils allèrent sur la colline

la nappe si blanche brodée de soleil et d’air
tran­chait sur le vert
ils s’y déposèrent en silence pour franchir l’inconnu paysage
s’y déposèrent de tous leurs os et tendons
de leur âme ils igno­raient qu’elle fût ce lieu de lévitation

le pain le vin partagèrent

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

image_pdfimage_print