J’enfouis la tête dans l’écrit,
Je fais sauter ma tête,
J’ai la vitesse d’un vers.
J’enfouis la tête dans l’écrit,
Je fais sauter ma tête,
J’ai la vitesse d’un ver.
J’écris comme un petit vers rouge
qui prêche aux petits vers rouges
la grandeur du métier d’écrivain
chez les petits vers rouges.
Je suis le ver de ma tête de femme
le ver de mon écrit d’homme
le vers du ver de la femme-homme
J’ai le don du vers d’un ver bisexué.
Je fais entrer des sentiments dans ma tête.
Je fais sortir des sentiments de ma tête.
Un ver n’en a pas besoin,
un vers a besoin de lui-même
et de sa nourriture fraîche.
J’écris comme une nourriture fraîche,
dans un corps affamé,
Je suis en besoin de moi-même,
J’écris comme « le besoin de moi-même ».
Je m’emplis,
Me gonfle, m’écrase,
jusqu’à ce qu’il n’y ait plus
rien de moi.
Et il n’y a plus rien.
Aucune nuance
à cause de ce que
je pourrais être.
Rien que
mon nom
à l’air d’un vers
qui
chatouille
et
ronge
tout ce qu’il aime que j’aime comme ver.
Ainsi, il crie ce que j’écris contre toute écriture docile.
QUE SUIS-JE ?
QUI SUIS-JE ?
Un nom à la vitesse de ver,
écrit en chair pour
les petits vers de terre
sous la pluie et les pieds
des gens heureux ou tristes.
QUI SUIS-JE ?
QUE SUIS-JE ?
Ma tête flotte au-dessus de moi
et ne me trouve pas.
Ma tête veut de toute ma chair.
38,5°C, 38, 6°C, 38,7°C, 38,8°C, 38,9°C, 39°C. Fièvre. Automne tardif, froid d’hiver, brouillard, chiens gris, enfants homosexuels, drogués mendiants, ‑7°C. Dans une photo on existe même quand on n’est pas… vivant. J’ai grandi ainsi (4 saisons, très chaud, très froid, tout ce qui est le non, le surtout pas […], j’ai connu des genspoissons, des plantesanimaux, des pierreseauxoiseaux, l’air et le feu des photosterre. J’ai fait l’amour avec la première photo la deuxième la troisième les suivantes, avec l’appareil photo, avec l’œil en vitre noire, et ses objets affûtés, avec les lignes et leurs cercles chaleureux, amour avec etc, si bien qu’à présent, je ne sais plus si mes parents ne sont pas en quelque sorte, l’expression agrandie de mon âge à ses différents âges, pris en photo ou abandonnés en marge, au-delà de (…)
39,1°C. A tout moment, je peux allumer, le manque d’action, l’absence, l’attente, ses preuves simples et lentes.
L’intérieur et l’extérieur d’une photo sont inséparables. Dans la vie, quelle qu’elle soit, il y a des zones et des mouvements explicables, des zones et des mouvements inexplicables.
Noir, lumière, ombre, vide limpide, vide touché.
Nue, dénattée, mouillée, élastique, bouclée.
« Le beau ver rouge » aux seins danseurs. 1,67 m.
Je vis.
Je suis.
Vide ou vidée.
Je frappe avec la tête la croûte du ciel, je donne des pieds à la croûte de la terre. Si je tends les mains, horizontalement, je perfore la frontière avec le monde. Il y reste des accidents, des blessures moelleuses, par lesquelles je reçois des lettres de l’extérieur de l’éternité. Ding — dong, ding – dong, ding – dong… Comme les cloches des églises. Les grosses cloches tintent. Ding – dong, ding – dong, ding –dong (…)
Dans ma tête, les abeilles se sont faites des clochettes en cire.
Ma tête et son miel flottent sur moi.
Je pousse des cris
et le miel s’écoule entre les dents.
Femme aux clochettesrayons
ayant une
ruche dans la tête.
Je suis une très bonne femme, ver de miel,
vers dans le miel,
ver écrivant avec le miel d’une femme,
en profondeur et dans la longueur,
entre et parmi,
conformément à,
à l’exactitude d’un écrit bisexué,
jusqu’à l’orgasme de la métaphore d’être
seule et seule,
seule tant de fois qu’il le faut.
N’est-ce pas que ce n’est pas (…) ?
Mais un ver n’a pas besoin de sentiments,
il fait des trous, lieuxrayons d’une ruche,
lieux pour les clochettes et les vols des abeilles.
Je suis un ver(s) dans le temps, un ver(s) – pendant – que,
dans le temps – de – mots – de — sentiments.
Je m’appelle Poémie. Et je flotte
la tête tournée vers ce
que je ne possède plus. Vers l’autre côté. Et l’autre côté flotte aussi.
Dans la forme sauvage et verte de la lentille d’eau.
Des têtes – lentilles. Petites photos aquatiques. Vertes.
J’écris petit. Et je mange tout ce qui est beau.
J’écris en moi, pour que sorte de moi le trou des abeilles,
le miel de la pensée
dans lequel tête et corps flottent dans
la même direction,
marécage courant
au bord de la mémoire.
Un vers est comme ça.
Il se précipite doucement,
Il palpite doucement,
Il ne dit pas de gros mots.
Il écrit dans
la blessure,
comme si la
plaie lui écrivait sur
des douleurs lourdes, provoquant des
jurons.
Qui puisse
comprendre les vers d’un ver
qui se prend pour une femme,
et surtout d’une femme qui se prend pour un ver(s) ? !
Que les poètes sévèrement « maudits » !
Je suis la stalactite de la nuque
votre poète – de- ver(re),
et je vous dis le plus beau juron d’amour :
…………………………………………………..
Un ver parle tellement bien, mais
une seule fois dans sa vie.
Je ne vous souhaite jamais de l’entendre.
Vaihingen, décembre 2004 :
À petits pas. À petits pas.
Je cours d’un bout à l’autre.
Je tourne dans
la photo, telle la clef dans la serrure.
Je m’ouvre en écrivant. Je ne
ressens
rien. Je m’ouvre largement.
Il est probable que j’écris ce que
je raconte assise dans ce nid
de chair qui bouge selon sa
propre musique, mais qui
n’est pas capable de sentiments.
Je vois mes mains de plus en
plus grandes.
Comme les tiges des haricots de Jack,
elles poussent et poussent
vers
le ciel.
Je mets mes doigts dans
la bouche et j’y écris
Grimpant sur la salive, je vais
dans l’écriture :
en haut,
en bas,
ainsi de suite,
ensuite plus
loin
et plus proche.
Je mets ma tête dans l’écrit.
Je la fais sauter.
J’ai la vitesse d’
un coup de foudre.
J’écris jusqu’à ce qu’il n’y ait rien.
Et que
c’est beau et limpide le rien !
Je peux parler librement.
Et je peux parler si
bien,
je peux parler librement,
je peu
x par
le
r
libre
ment !
Au- dessus des maisons il y a
des
corneilles.
Au-dessus des corneilles, un
ciel rouge.
Si je n’écrivais pas, je dirais « coucher de soleil noir et blanc ».
Et le clocher de l’église de la gaieté.
Et la petite pluie fine, gelée sous
la forme des épingles.
Et le sapin de la
fenêtre.
Et les pommes de pin et mes
photos en morceaux,
pendant aux branches
du sapin.
Et,
surtout,
les corneilles
qui
volent en se querellant,
les griffes enfoncées les unes dans les autres,
comme les pièces
d’un puzzle.
Et le petit
ver rouge inexistant,
petit néant, rouge et gluant,
Ver – Vers –vers l’océan en terre.
39,1°C.
39,2°C.
Vous m’avez dit plusieurs fois :
« On ne peut pas être en bonne relation avec votre ver
en vers !
«Nous tous on a peur,
peur de vous écouter ! »
A mi-voix,
avant de
vous endormir, vous tous vous m’avez tourné le dos.
Mais vous ne saurez jamais rien sur le
petit ver rouge et moi petite jouant dans le préau.
Je crois avoir 39,9°C. Intrigue de cabale ? Chiffres de chance ?
39, le numéro de
ma maison paternelle,
9, à l’école, ma
note préférée,
je crois que,
je
grimpe de plus
en plus
en haut
En cadence,
telle une vrille dans le nombril du ciel.
Il n’y a pas de marches, ni de descentes
mon écrit n’est pas incliné.
Le petit ver rouge,
le cobaye de mon écrit, la
petite lettre rouge qui ronge des pas :
Je viens, je retourne, j’implante des lettres aiguës
dans les tiges de
votre corps, je descends, me voilà
J’introduis ma
tête dans la vôtre ,
mon corps dans le vôtre,
votre tête dans mon corps
votre corps dans ma tête,
et…
Stuttgart,
le 17 décembre 2004