La pre­mière cri­tique de Philippe Leuckx parue dans Recours au poème, au som­maire 121 de novem­bre 2014.

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D’un azur « pour­pre » à l’autre, le temps d’un livre, Eve­lyne Deferr con­cède au lecteur son intim­ité de mère. Les titres des poèmes sont là comme autant de balis­es pré­cieuses pour con­stru­ire un par­cours à l’enfant en elle, qui, un jour, est là, « incar­né ». Dans une réso­nance sere­ine, qui doit beau­coup au « Nou­veau-né » de Georges de La Tour, la mère con­verse, sig­nale « tes cris dans le couloir », évoque son fils entre « ces fleurs blanch­es » et « le chemin (qui) se fait aérien ».

Mater­nité heureuse donc, louée, entretenue sub­tile­ment par les mots, dans une langue assez clas­sique et sur un ton lyrique bienvenu :

 

Absorbée dans tes yeux vibrants de faim
Tu es le cri, je suis le lait
Arc et flèche ten­dus vers un seul but
Immo­biles, sans sujet ni objet

 

Tout le livre hon­ore la vie dans toutes ses mailles, qu’il soit « nuit organique, chaude, silen­cieuse » ou « jour aveuglant de juil­let » ; le poète entend « des bribes de cris d’enfants/ De joyeux appels entre les rives » ; à peine si la mère perçoit dans cette nasse de joie qui la comble quelques fan­tômes de mau­vais augure.

La beauté ray­on­nante du livre au thème uni­versel tient beau­coup à cette voix qui ne hausse pas le ton, trop soumise à son bonheur.

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Philippe Leuckx

Né à Havay en 1955. Etudes de let­tres romanes.
Mem­bre de l’As­so­ci­a­tion des Ecrivains belges.
Cri­tique dans plusieurs revues et blogs (Jour­nal des poètes, Fran­coph­o­nie vivante, Bleu d’en­cre, poez­ibao, Les Belles Phras­es, revue Tex­ture…)

Prix Emma-Mar­tin 2011.

Auteur d’une trentaine de livres et pla­que­ttes de poésie : Une ombreuse soli­tude, Comme une épaule d’om­bres, Le fraudeur de poèmes, Le fleuve et le cha­grin, Touché cœur, Une espèce de tour­ment ?, Rome rumeurs nomades, Selon le fleuve et la lumière, Un pié­ton à Barcelone, Rome à la place de ton nom, D’enfances…