Dans son incessant questionnement, entre métaphysique et poésie, Yves Namur procède selon une méthode qui vise à creuser, en reprenant à la fois le mouvement de la vrille et celui de l’escalier. Les mêmes motifs, les mêmes mots, les mêmes enchaînements conduisent le lecteur dans une spirale qui donne souvent l’impression qu’elle enferme le lecteur au sein d’une réflexion. L’oiseau, la demande, la bouche, l’ange, la rose, l’ombre, la lumière, comme lexèmes, les anaphores, les reprises comme on le dit d’un tissu : tout mène à mesurer combien cette poésie est surtout écrin de langage et source infinie du même.
« c’est sur toi que de la lumière s’est posée
c’est sur toi qu’est venu l’oiseau
…
seuls nous parviennent encore la rumeur insensée des hommes
et leurs égarements
seuls sont audibles le désastre
les ruines du temple…
…
une voix remplie de poèmes
une voix comme il n’y en a pas »
Cette voix, tissée des mêmes mots, entortille la réalité, l’engage dans des circonvolutions lentes et composées, induit elle-même une lecture sensible à ce qui se dit, se répète, comme un thrène qui puisse épuiser cette réalité du monde.
Pourtant, derrière ces vers, « les hommes de peu » de « rien », la « souffrance », « le désastre » prennent poids et l’homme « perdu » qui écrit trouve là sans doute une manière de baume parce qu’il doit encore « apprendre à écrire le poème/ des saisons terribles et amoureuses ».
« un poème peut-il entendre le chant des oiseaux
un poème peut-il parler de ces choses-là
…
un poème
peut-il sortir du souffle de l’amour, »
On retient le chant, désespéré, d’un être qui, par sa poétique, relaie bien les tourments en strapontin de son âme déchirée.
Sans doute le lecteur pourra-t-il parfois être interrompu dans sa rêverie par le rythme des mêmes motifs : affaire de subjective lecture, il me paraît que « La tristesse du figuier » allait sans doute plus loin dans l’intense questionnement du monde.
*
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