Au « rit­uel des lisières », le fils poète d’un poète cède comme on con­cède la beauté à la fleur qui penche et va faiblir.

En dis­tiques justes, l’auteur s’avance vers le père qui le quitte et le « tombeau » serre l’absence et les beautés de « tous les sou­venirs », rameutés par une voix qui ne sen­ti­men­talise jamais mais ramène à la sur­face de la parole des pans entiers de mémoire vive et le ser­vice d’hommage com­mence : « dans la nuit de l’encre » oui, car  « j’ai accu­mulé ton visage/ Pour annot­er tes poèmes/ de salves de toi ».

La splen­deur des images recrée le défunt : « si tu rampes/ dans le som­meil du buf­fle ». La fer­veur et l’amour fil­ial décochent des vers de pure beauté :

 

« Aujourd’hui, si tu parles
dans ma nuit de chaque jour
mon sourire dans tes yeux
dépose-t-il une larme et un éloge ? »

 

La mort se décline dans une laisse de poèmes brefs : « Pour toi, père/ j’ai tenté/ ce mince larcin/ des saintes dactylographies/ — ton sanctuaire »

Faut-il vrai­ment aimer pour « oubli­er la mort » ? La poésie de Bre­ton (1956/ dix recueils depuis 1979) con­signe l’éloge en vers vrais, recueil­lant « l’hospitalité » des livres du père, offrant le sien, défi­ant la mort, appelant à « renaître » « dans l’érection/ des bruits » du monde.

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Philippe Leuckx

Né à Havay en 1955. Etudes de let­tres romanes.
Mem­bre de l’As­so­ci­a­tion des Ecrivains belges.
Cri­tique dans plusieurs revues et blogs (Jour­nal des poètes, Fran­coph­o­nie vivante, Bleu d’en­cre, poez­ibao, Les Belles Phras­es, revue Tex­ture…)

Prix Emma-Mar­tin 2011.

Auteur d’une trentaine de livres et pla­que­ttes de poésie : Une ombreuse soli­tude, Comme une épaule d’om­bres, Le fraudeur de poèmes, Le fleuve et le cha­grin, Touché cœur, Une espèce de tour­ment ?, Rome rumeurs nomades, Selon le fleuve et la lumière, Un pié­ton à Barcelone, Rome à la place de ton nom, D’enfances…