Exer­ci­ces de chute est le pre­mier livre de ce poète incon­nu et il est pub­lié dans une col­lec­tion qui se situe “à la croisée des gen­res” qui priv­ilégie “la diver­sité des formes, la lib­erté de ton et le plaisir d’os­er”. Les textes cor­re­spon­dent à l’éprit de cette col­lec­tion joli­ment appelée If comme l’ar­bre qui sym­bol­ise la vie et la mort et dont la longévité est extra­or­di­naire. Sym­bol­ique qu’on retrou­ve dans le dessin de cou­ver­ture de Ben­jamin Mon­ti qui illus­tre à sa manière, par­ti­c­ulière­ment absurde,  le principe du levier.

Un rapi­de coup d’œil sur le con­tenu du livre fait appa­raître trois types de textes : de petits pavés de prose, des poèmes en vers libres comp­tant plus de deux mots et, plus sou­vent, des poèmes (?) aux vers ne comp­tant qu’un ou deux mots… Comme tou­jours ou presque, je suis agacé par ces bouts de prose et ces phras­es saucis­son­nés qui se don­nent pour des poèmes : ces piles de mots les uns au-dessus des autres avec beau­coup de blanc autour, ce serait donc ça la poésie ? J’en doute. Je suis plus con­va­in­cu par ce qui ressem­ble à de vrais poèmes… Même si je suis sen­si­ble à l’hu­mour absurde qui se dégage de ces pseu­do-poèmes : “la plu­part / des morts / inter­rogés / préfèrent / la mort”. Que gagne-t-on à découper ain­si en ron­delles ces phras­es qui se suff­isent à elles-mêmes ?

Les pros­es sont des accu­mu­la­tions de phras­es absur­des, ce qui n’est pas pour me déplaire. L’ab­sur­dité rési­dant dans la phrase  (“Je ne veux pas tes lèvres de ciment.”) ou dans l’ar­tic­u­la­tion ou, plutôt, la jux­ta­po­si­tion des phras­es (“Je te regarde cou­ver des ovules de dés­espoir, de tristesse. Moi, je suis sec et trempe mon panier de crabes dans la mer.”) Absur­dité, gra­tu­ité… je ne sais. Ce sont des exer­ci­ces de délire ver­bal. L’édi­teur par­le de détourne­ment du sens des mots, affirme que dans ces pros­es le lan­gage est ren­du inapte à représen­ter le réel, inef­fi­cace comme véhicule de vérité ou comme affir­ma­tion d’un ego. C’est vrai, mais ce sont là des choses qu’on savait déjà… Ces petits textes démon­tent donc le lan­gage mine de rien, le dyna­mi­tent de l’in­térieur et nous font enten­dre autrement les beaux par­leurs de la tv, les politi­ciens en vue, les rich­es qui ne le sont jamais assez, tous ces hyp­ocrites qu’il ne faut jamais croire…

Le lecteur a l’im­pres­sion qu’Alex­is Alvarez Bar­bosa déblaie le ter­rain pour un autre livre. Que j’at­tends avec curiosité

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