Aventures de l’œil déserteur de lumières

Par | 2 janvier 2017|Catégories : Blog|

 

(extraits)

 

 

Le pignon dressé dans le ciel va s’écrouler un jour dans l’herbe sans faire de mys­tère. Petit à petit le vide grig­note les pier­res. Le vide blan­chit sans que per­son­ne n’en soit sûr. Et la pous­sière des pier­res s’éparpille comme des os noirs lorsqu’ils men­a­cent les pas des hommes. En atten­dant une barre de fer pour danseuse sui­cidaire les soude d’un seul trait. Il est temps de se sou­venir que le lierre n’a pas tou­jours rai­son et qu’être funam­bule en dessous masque les ver­tus du con­fort. Per­son­ne ne sait d’ailleurs de quel côté le ciel démarre.

 

***

 

Les chemins de la cam­pagne aboutis­sent trop vite à cette fente où coule la source syn­onyme de vie à brève échéance. La preuve est qu’à l’extérieur sub­sis­tent des pier­res à con­tem­pler dans leur déso­la­tion. Le lierre y arrache un peu de vie à la nature comme il arrache des morceaux de craie par dessus la source trop étroite pour que le jour puisse y être découvert.

 

***

 

Le ver­tige tombe à l’intérieur d’une fenêtre coupée par du lierre grim­pant à sa source. Com­ment un corps à l’entrée d’un autre souter­rain  peut-il s’en sor­tir ? Mieux vaudrait bat­tre le linge à sa ter­rasse. A cette pro­fondeur toutes les tra­jec­toires ne cessent de se con­tredire. Il n’y a plus jamais de print­emps dans ces ruines assem­blées en toiles impré­cis­es. Peut-être la fenêtre attend-elle que des ruines blanch­es la bouchent un jour que le bar­rage de la source aura sauté.

 

***

 

Le chemin qui descend a un par­fum de reli­gion à faire peur aux enfants. Cette odeur de buis en tour­nant autour des ruines se révèle insup­port­able. Les arbres accu­mu­lent de l’ombre sur un point du mal­heur enfoui. Per­son­ne ne sait jamais où. Par néces­sité toutes les branch­es se réfugient con­tre les murs qu’elles grif­f­ent comme des bou­gies vac­il­lantes. Il faudrait devenir un géant pour com­pren­dre ce monde à moitié enter­ré qui meurt chaque jour sans nulle comparaison.

 

***

 

Les trous à l’intérieur des murs sont des meur­trières qui n’attendent que la chute des pier­res. Dans cet ensem­ble de per­spec­tives mourantes il fait tou­jours nuit. Le vis­age implore et glisse sur les parois de moins en moins glabres. Le grain de la pierre à suiv­re est ren­du bril­lant par le gel. Il sait se dur­cir au point de couper les doigts de l’esprit qui veut s’élever en faisant des cauchemars en plein après-midi. Et ce monde se com­pose de mouch­es paralysées dans les inter­stices par des sig­naux qui ne bougent plus qu’une fois les corps pré­cip­ités à terre.

 

***

 

Sur le ciel tapis­sé de feuilles entre ces qua­tre murs ouverts l’air ne cir­cule que s’il est froid. Et en bout de course demeure une impres­sion de vol­ume fait âme. Il serait facile d’en rester là puisque per­son­ne ne sur­veille le lent tra­vail de la mort. Par­tir pour le ciel debout néces­sit­erait un peu de calme à la dernière main enfouie dans l’ombre. Déjà les portes du par­adis s’entrebâillent avec un regard fuyant lorsque l’essentiel est de vivre dans le bruit.

 

***

 

La vie échoue dans un trou de ver­dure noir où la nuit ne respire pas au dehors. Tan­dis que les arbres passent der­rière les encadrements de silence des portes les ser­pents de bois se pétri­fient en hiv­er faute de pou­voir s’élever entre les murs. Le brouil­lard des cœurs monte lente­ment entre les tombeaux vides après que soient remués les débris des poutres. Com­ment trou­ver l’équilibre au milieu des décom­bres qui pour­ris­sent moins vite que les corps ?

 

***

 

Les fenêtres sont tombées avec la lumière entre qua­tre murs dépourvus de trans­parence. Des fan­tômes ont dû se relever pour les met­tre à bas. Au pas­sage ils ont enlevé la lumière sans allumer de feu. Et main­tenant le corps passe à tra­vers les mon­tants engoncés d’orties. Il coule en apparence dans cette eau tein­tée de brou de noix. A l’intérieur le voici pris­on­nier d’une gangue retar­dant tou­jours la route. Ses pas avan­cent masqués comme s’ils apparte­naient à un crim­inel qui aurait per­du son vis­age à force de le frot­ter con­tre des miroirs obscurs.

 

***

 

Le corps ne bouge plus. Tapis­sé de paille verdâtre il songe à réveiller l’absolu. Mais il faudrait pour cela des prières à dormir debout avec de la mau­vaise lumière dans les yeux. Si la paille sent le refer­mé d’innombrables fleurs sont à écarter comme les min­utes d’une vie végé­ta­tive. Le vis­age n’absorbe pas ses pail­lettes mais demande juste des preuves que la place qu’il occupe peut tou­jours s’évanouir. Par con­tre l’odeur de vomi se réfugie dans la terre de cru­ci­fiés anonymes. Con­tre leurs bois ram­p­ent dans cette mai­son des bêtes à bon dieu.

 

***

 

L’enfer sem­ble s’être déplacé sur la terre. Là-bas l’eau noire dis­paraît avec sa source à dis­tance en signe de respect pour un déluge incon­sis­tant et il n’y a même plus d’eau dans la mai­son aux galeries cer­clées de briques. L’hiver est devenu un désert aux allées sour­des. C’est à peine si les robi­nets coulent des murs inin­ter­rom­pus. Les pier­res ont moulé les vis­ages de tra­vailleurs pétri­fiés. Pren­dre con­gé de ces lieux revient à laiss­er traîn­er son âme loin de la fête laïque. Per­son­ne n’a par­lé d’être robot. Per­son­ne n’a par­lé. La soif reprend vite quand la tête dépasse l’ombre du corps allongé.

 

 

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Aventures de l’œil déserteur de lumières

Par | 20 décembre 2016|Catégories : Blog|

(extraits)

 

 

 

Le pignon dressé dans le ciel va s’écrouler un jour dans l’herbe sans faire de mys­tère. Petit à petit le vide grig­note les pier­res. Le vide blan­chit sans que per­son­ne n’en soit sûr. Et la pous­sière des pier­res s’éparpille comme des os noirs lorsqu’ils men­a­cent les pas des hommes. En atten­dant une barre de fer pour danseuse sui­cidaire les soude d’un seul trait. Il est temps de se sou­venir que le lierre n’a pas tou­jours rai­son et qu’être funam­bule en dessous masque les ver­tus du con­fort. Per­son­ne ne sait d’ailleurs de quel côté le ciel démarre.

 

 

 

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Les chemins de la cam­pagne aboutis­sent trop vite à cette fente où coule la source syn­onyme de vie à brève échéance. La preuve est qu’à l’extérieur sub­sis­tent des pier­res à con­tem­pler dans leur déso­la­tion. Le lierre y arrache un peu de vie à la nature comme il arrache des morceaux de craie par dessus la source trop étroite pour que le jour puisse y être découvert.

 

 

 

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Le ver­tige tombe à l’intérieur d’une fenêtre coupée par du lierre grim­pant à sa source. Com­ment un corps à l’entrée d’un autre souter­rain  peut-il s’en sor­tir ? Mieux vaudrait bat­tre le linge à sa ter­rasse. A cette pro­fondeur toutes les tra­jec­toires ne cessent de se con­tredire. Il n’y a plus jamais de print­emps dans ces ruines assem­blées en toiles impré­cis­es. Peut-être la fenêtre attend-elle que des ruines blanch­es la bouchent un jour que le bar­rage de la source aura sauté.

 

 

 

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Le chemin qui descend a un par­fum de reli­gion à faire peur aux enfants. Cette odeur de buis en tour­nant autour des ruines se révèle insup­port­able. Les arbres accu­mu­lent de l’ombre sur un point du mal­heur enfoui. Per­son­ne ne sait jamais où. Par néces­sité toutes les branch­es se réfugient con­tre les murs qu’elles grif­f­ent comme des bou­gies vac­il­lantes. Il faudrait devenir un géant pour com­pren­dre ce monde à moitié enter­ré qui meurt chaque jour sans nulle comparaison.

 

 

 

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Les trous à l’intérieur des murs sont des meur­trières qui n’attendent que la chute des pier­res. Dans cet ensem­ble de per­spec­tives mourantes il fait tou­jours nuit. Le vis­age implore et glisse sur les parois de moins en moins glabres. Le grain de la pierre à suiv­re est ren­du bril­lant par le gel. Il sait se dur­cir au point de couper les doigts de l’esprit qui veut s’élever en faisant des cauchemars en plein après-midi. Et ce monde se com­pose de mouch­es paralysées dans les inter­stices par des sig­naux qui ne bougent plus qu’une fois les corps pré­cip­ités à terre.

 

 

 

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Sur le ciel tapis­sé de feuilles entre ces qua­tre murs ouverts l’air ne cir­cule que s’il est froid. Et en bout de course demeure une impres­sion de vol­ume fait âme. Il serait facile d’en rester là puisque per­son­ne ne sur­veille le lent tra­vail de la mort. Par­tir pour le ciel debout néces­sit­erait un peu de calme à la dernière main enfouie dans l’ombre. Déjà les portes du par­adis s’entrebâillent avec un regard fuyant lorsque l’essentiel est de vivre dans le bruit.

 

 

 

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La vie échoue dans un trou de ver­dure noir où la nuit ne respire pas au dehors. Tan­dis que les arbres passent der­rière les encadrements de silence des portes les ser­pents de bois se pétri­fient en hiv­er faute de pou­voir s’élever entre les murs. Le brouil­lard des cœurs monte lente­ment entre les tombeaux vides après que soient remués les débris des poutres. Com­ment trou­ver l’équilibre au milieu des décom­bres qui pour­ris­sent moins vite que les corps ?

 

 

 

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Les fenêtres sont tombées avec la lumière entre qua­tre murs dépourvus de trans­parence. Des fan­tômes ont dû se relever pour les met­tre à bas. Au pas­sage ils ont enlevé la lumière sans allumer de feu. Et main­tenant le corps passe à tra­vers les mon­tants engoncés d’orties. Il coule en apparence dans cette eau tein­tée de brou de noix. A l’intérieur le voici pris­on­nier d’une gangue retar­dant tou­jours la route. Ses pas avan­cent masqués comme s’ils apparte­naient à un crim­inel qui aurait per­du son vis­age à force de le frot­ter con­tre des miroirs obscurs.

 

 

 

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Le corps ne bouge plus. Tapis­sé de paille verdâtre il songe à réveiller l’absolu. Mais il faudrait pour cela des prières à dormir debout avec de la mau­vaise lumière dans les yeux. Si la paille sent le refer­mé d’innombrables fleurs sont à écarter comme les min­utes d’une vie végé­ta­tive. Le vis­age n’absorbe pas ses pail­lettes mais demande juste des preuves que la place qu’il occupe peut tou­jours s’évanouir. Par con­tre l’odeur de vomi se réfugie dans la terre de cru­ci­fiés anonymes. Con­tre leurs bois ram­p­ent dans cette mai­son des bêtes à bon dieu.

 

 

 

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L’enfer sem­ble s’être déplacé sur la terre. Là-bas l’eau noire dis­paraît avec sa source à dis­tance en signe de respect pour un déluge incon­sis­tant et il n’y a même plus d’eau dans la mai­son aux galeries cer­clées de briques. L’hiver est devenu un désert aux allées sour­des. C’est à peine si les robi­nets coulent des murs inin­ter­rom­pus. Les pier­res ont moulé les vis­ages de tra­vailleurs pétri­fiés. Pren­dre con­gé de ces lieux revient à laiss­er traîn­er son âme loin de la fête laïque. Per­son­ne n’a par­lé d’être robot. Per­son­ne n’a par­lé. La soif reprend vite quand la tête dépasse l’ombre du corps allongé.

 

 

 

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