Un jour, je com­mencerai à vivre cette vie que je me suis promise, sans con­trainte aucune :
avec un cœur de pirate lux­u­ri­ant et san­guinaire où se fer­ont écho les pas­sions les plus fortes, l’in­stinct m’emportera vers le délire de la foi, vers l’in­san­ité de l’his­toire, vers l’avalanche des jours et des nuits, par une active per­fec­tion du corps !

Res­teront der­rière moi dilemmes et incer­ti­tudes, faib­lesse de la volon­té et grandeur du doute, et, comme jadis face au peu­ple de Moïse, la mer va s’ou­vrir pour livr­er pas­sage au peu­ple-moi vers une vie promise et entière, vers la terre qui m’est promise.

Pour l’in­stant, je n’ai encore rien entre­pris en vue du grand événe­ment, mais demain ! demain je ferai cer­taine­ment quelque chose, dussé-je, impuis­sant, tourn­er en rond dans ma cham­bre, dussé-je rester au lit des jours durant, dussé-je relire les mêmes livres que je reli­sais depuis des années afin de paral­yser toute activité.
Voilà, je me pré­pare déjà à sor­tir de ma cham­bre, à faire cla­quer toutes les portes avec fra­cas, mais, dans cet espace garan­ti du doute, en rai­son de la peur, fureur et colère me man­quent, une com­pas­sion soudaine m’i­nonde vers ces portes et le silence du vide qui resteraient, après moi, fan­toma­tiques, tel un bâille­ment gigan­tesque grand ouvert.

Un jour, toute­fois, je com­mencerai cer­taine­ment à vivre cette vie que je me suis promise, sans lim­ite aucune :
envahi par une volon­té qui pul­vérise tout je plongerai vigoureuse­ment dans la froideur mati­nale dans une vie éton­nam­ment naturelle et bru­tale, de manière active, comme tout bar­bare, un jour, lorsque je serai moins sage et moins hau­tain, moins apathique, indé­cis et sceptique :
lorsque je ne serai plus.

 

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