Comme l’étonnement d’être encore là, ce soir,
le bras, très mai­gre, s’inclinant au foyer,
au bord de la cendre,
pau­vresse tassée entre deux pierres.

La main s’avance dans l’âtre,
ruinant avec soin les mousses
savon­neuses de la cendre
et le char­bon si léger de quelque branche
où, jadis, du soleil s’offrait dans les rires,

– et le vent du soir qui s’était jeté dans les creux,
y reste t il un seul grain de son absence ? –

L’étonnement d’être là, ce soir,
cen­dre douce sous les doigts,
chaude sous la paume,
cette bûche en cen­dre qui s’effondre
sous les doigts de la mémoire…

De décou­vrir cette main
comme, à l’entrée d’un ciel bas,
prête à quel nou­veau visage,
main­tenant cen­dreuse elle s’élève
et déchire avec soin les nuages.

 

 

L’invisible grandit (extrait), Le Pont de l’Épée, 1987.

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