D’aucuns savent qu’elle a été,  dans une autre vie (était-ce une autre vie ?), un auteur- com­pos­i­teur- inter­prète de chan­sons à textes et de poèmes mis en musique, égérie d’un Club des poètes, du temps où la poésie avait droit de cité à la télévi­sion. D’autres con­nais­sent son engage­ment auprès des tox­i­co­manes tan­dis que tout ce que le monde de la poésie compte  la con­nait pour diriger auprès de Jean-Luc Max­ence les édi­tions Le nou­v­el athanor. Des priv­ilégiés, qui s’honorent de son ami­tié, con­nais­sant les tré­sors de sen­si­bil­ité,  de générosité, d’humanité qui éma­nent d’elle mal­gré la pudeur der­rière laque­lle elle tente de les mas­quer. Et voilà, tout à coup, que se dévoile la poète et que se révèle la femme, la femme d’amour, et pour tout dire la femme éter­nelle .Tes mains de fer­veur / ont fait éclater dans mon corps/ tout le soleil du monde. Elle dit cela, Dan­ny-Marc,  le plus naturelle­ment du monde, comme une évi­dence ! Nous n’avons plus vingt ans/ mon amour/ le temps presse, affirme-t-elle. Au moins sur ce point, Dan­ny-Marc se trompe. Elle a tou­jours vingt ans, car elle a cette audace,  qu’adolescent l’on a, et que l’on aban­donne pour gag­n­er du temps, cette audace que seuls retrou­vent par­fois ceux qui n’ont plus rien à per­dre, et surtout pas leur temps. Leçon de jeunesse, donc, d’abord, que ce court recueil : Dan­ny-Marc ose, libre !  Elle écrit comme une jeune fille en fleurs écrirait ses pre­miers émois amoureux « T’ouvrir la porte ce soir/ c’est aller à la ren­con­tre des étoiles », une jeune fille, qui cepen­dant  serait forte de toute l’expérience d’une vie :   «  L’amour nous va trop bien désormais/ Pour que nous allions bien sans lui ». A la pre­mière lec­ture c’est donc la fraîcheur, l’innocence, j’allais écrire la pureté, qui se déploient dans l’élan, qui appa­rais­sent. Mais ces mots, d’une évi­dence con­fon­dante, con­ti­en­nent de tout autres niveaux de sens. C’est de fer­veur qu’il s’agit et de fêtes. Notez  bien ces mots : «  ô, noces inat­ten­dues », «  dans tes mains, le pain rompu », «  l’offrande enfin venue » , «  notre prière sur le monde » ; cette fer­veur-là, que n’aurait pas reniée  la grande poétesse Marie Noël , pour char­nelle qu’elle soit en apparence, s’enracine , comme chez Marie Noël, dans un pro­fond chris­tian­isme orig­inel, celui des évangiles , vécu dans une foi qui, seule, per­met d’accéder à la joie d’être.  C’est bien cette manière d’être au monde qui habite Dan­ny-Marc et qu’elle exprime, l’amour, vécu comme la plus haute valeur humaine, dans toutes ses dimen­sions,  là où l’amour divin rejoint l’amour humain. Là où Marie-Noël a ten­dance à dis­soci­er les deux, par un chris­tian­isme ancré dans la tra­di­tion, Dan­ny-Marc, elle, les réu­nit, jusque dans la dimen­sion char­nelle,  comme dans ce poème Moment d’éternité : Nous voici enfin mon amour/ toi et ton regard d’étoiles/moi et mon vis­age d’attente/ ensem­ble, d’offrande et de lumière. Mais si j’ai employé le terme «  la femme éter­nelle », j’aurais dû écrire «  l’éternel féminin »,  c’est,  comme l’aborde Michel Cazenave dans sa pré­face faisant référence au principe féminin jungien, parce qu’il  creuse  encore plus pro­fond  pour accéder à la source du sens des mots de Dan­ny-Marc. La femme amoureuse dont par­le Dan­ny-Marc est  aus­si, surtout, une représen­ta­tion de cette déesse,  Gaîa, la terre-mère, ce principe que toute femme porte en elle, elle qui donne la vie, et qui lui per­met de révéler l’homme,  sex­ué, à lui-même .Voilà, tout sim­ple­ment, d’où me sem­ble s’exprimer Dan­ny-Marc. Voilà ce qui lui donne une telle assur­ance, voilà ce qui lui per­met une telle lib­erté d’expression. Dan­ny-Marc n’a rien à prou­ver, sinon peut-être à elle-même, un peu aus­si à l’homme avec qui elle partage l’amour. A nous, lecteurs, elle nous prou­ve qu’elle est une « grande-dame »,  ce que nous savions, en même temps qu’une grande poète,  ce qui ne nous sur­prend pas.  Mais pou­vait-il en être autrement ? 

http://www.pippa.fr/Un-grand-vent-s-est-leve

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