Une feuille de mer repose en tra­vers de l’écorce :
J’ai cessé de parler
sauf à tra­vers le monde tel qu’il est.

Mais la feuille n’est pas philosophe.
Elle n’est que lisière, sig­nal lumineux,
Et non  chose en soi.

La lumière s’y installe avec les couleurs qu’elle (lui) donne,
elle est ici un instrument
dans un motif de pier­res camouflées.

Ici je vois le chemin que je suis,
ici advient l’ombre,
la cara­pace de crabe blanchie par­mi des galets,

Et j’observe com­ment une fine feuille de roches penche dans le soleil.
Cha­cun vit et chas­se et pêche,
cha­cun vit et se porte bien.

Un coup de vent chaud sur mon mon vis­age et dans mon cou,
noie l’é­clat mul­ti­col­ore des coquil­lages de la plage.
Des vagues bleues s’écroulent sous le lobe de mes oreilles.

Comme le feu sous la grille le vac­ille­ment de la feuille de fucus -
tan­dis que les pois­sons de bois laqués de rouge claque­nt les uns con­tre les autres,
des cordes d’é­corce enfilées dans leurs queues.

 

(tra­duc­tion : Mar­i­lyne Bertoncini)

 

On the Tra­di­tion­al Way of Painting

 

A sea-leaf  is laid across the bark:
I’ve giv­en up talking
save through the world as it is.

But the leaf is no philosopher.
It’s just an edge, a flare-mark,
and not a thing in itself.

The light moves in with the colours which it gives,
it’s used here as an instrument
in a pat­tern of cam­ou­flaged stones.

Here I see the way I walk,
here becomes the shadow,
the bleached crab-shell among pebbles,

and I notice how a thin sheet of rock slants into the sun.
Every­one lives and hunts and fishes,
every­one lives and is well.

A hot wind bursts in my face and round my neck,
drown­ing out the glare of the beach’s mul­ti-coloured shells.
Blue surf top­ples under the ledges of my ears.

Like fire in a grate the flick­er of the sea-wrack­’s leaf -
while the red-daubed wood­en fish clack against each other
with bark twine thread­ed through their tails.

from Wild Bees 

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