Eliane Ver­nay nous par­le d’un deuil, quand la peau devient mar­bre avec un vis­age au regard infini.

Pour­tant le flam­beau de la parole est encore vivace, les mots dansent tou­jours, même si c’est sans musique, les ailes peu­plent le ciel. Mais le vide est là, plus puis­sant que le silence, absence qui bat jusqu’à l’os.

Des larmes de pierre, plus lour­des que toutes les mon­tagnes, tombent et creusent le présent dans un puits sans fond.

La rive n’est plus, plus de repère, plus d’amer, plus de rêves, alors on cherche l’é­cho des ombres, le fra­cas du silence dans un monde sans haut ni bas.

Heureuse­ment il y a le sou­venir de quelques images à tra­vers des hom­mages à de grands pein­tres, Le Car­avage, Ver­meer, Delacroix, Goya, Rem­brandt entre autres, où la pein­ture est à fleur de peau, où la lumière et les cen­dres ont engagé une bataille sans vainqueur.

On a pu croire un moment que la mer « lav­erait » la douleur, quand les pois­sons d’or vien­nent à la sur­face, se reflé­tant dans le ciel, quand le jour qui point prend son juste poids.

Alors n’y-a-t-il plus d’e­spoir de vivre à nou­veau ? Si, car finale­ment l’air allège, avec « au bord des paupières un élan », où brille encore « la flamme du silence ».

 

 

« les notes accrochent aux branches
un train de voyelles
comme autant de guir­lan­des du ciel à la terre
et les ombres

noir­cies
au feu des jours

 …

 

niée alors,
ou dépassée et comme absoute,
l’im­age d’un ciel trop bas

 

cet éclair fur­tif qui scalpe, incise, sectionne
puis ouvre, tranche, fouille
écarte mor­taise, caresse
puis casse
brise fra­casse

 

Englouti, le néant de ta nuit
qui ne tenait qu’à un fil.
Le tien.
Sec­tion­né.

 

Et moi, accrochée à ce fil m’agrippant
toute la nuit
mor­dant
gar­rotant
étranglant
le fil -

 

Etran­gléel
la nuit.

 

La tienne. »

 

*

 

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