J’ai tressé une enfilade inex­tri­ca­ble de mots et aucun n’a été écrit le jour. Une nuit de let­tres, de mots, de textes, de poèmes.

Un poème anti diurne n’ouvre jamais ses paupières.

Ténèbres sur ténèbres. Une couleur brûlante. Je suis ébloui de noirceur. Etoiles ruti­lantes. Elles tâton­nent, me cherchent de doigt, caressent l’humidité de ma fenêtre. Pourquoi tu es par­tie ? Ensem­ble on partageait le tis­su bril­lant de la nuit. La nuit, la nôtre, la vraie, avait un revers. 

 

La nuit meurt-elle de solitude ?

 

Est-ce par amour ou par peur que j’oblige mon encre d’aller au-delà du cré­pus­cule, alors que mon cœur s’obstine à m’enfoncer dans le gouf­fre lumineux du jour ?
Je grif­fonne des mots nus sur la vir­ginité encore intacte de ta nuit. Mes mots on ne peut plus sauvages et ven­imeux, à saisir l’inaccessible, l’écho de ta voix. Une voix noc­turne, encore retentissante.
Je la rends immi­nente. Ta voix me prou­ve à chaque rap­pel mon amour, mon impuissance.
« Mon âme éter­nelle observe ton vœu ». C’est ce qui par­fait mon corps ; une écorce qui meut et per­turbe mon repos.
Ta voix.
Ta voix te ressemble.
Elle est sal­va­trice, comme une main à un noyé com­bat­if. Elle me délivre de cette « nuit seule » et ter­ri­ble­ment taciturne.
J’imite ta nuit. Je tiens tête à la soli­tude. Dans ce moment de dis­tance, je me res­sai­sis. J’imite ta voix onirique qui fait du corps et de l’esprit une har­monie. Accord se récla­mant désor­mais du rêve. De la nuit.

Vois-tu ? Ta voix te dépasse. Ta voix part plus loin encore. Elle est seule. Elle exerce l’amour et la rup­ture, le voy­age et les réminis­cences. Et moi, je suc­combe à son attrait, à sa ten­ta­tion. Pas de refuge. Je m’ouvre à elle. Nonchalamment.
Tu me reviens comme un refrain, mais sans voix, déguisée en silence. Comme dans une pre­mière ren­con­tre, timide et dépourvue de mots.
Une ren­con­tre diurne n’est jamais trans­par­ente. La nuit nous offre tou­jours parole et vérité. Comme dans une ren­con­tre nup­tiale. La trace du sang ne laisse plus de doutes. Le sang noc­turne est juste vrai.
Je suis envahi par cet écoule­ment seul de la nuit. La nuit sait parler.
Ta voix sur­git douce­ment comme une lueur filante dans la nuit. De la nuit.

La nuit.
Ta peau est un véri­ta­ble esclavage. Je suis soumis. Je suis libre. Libre d’esclave.
Dédale et exploit accomplis.
Une peau écla­tante sorite ombil­i­cale du ven­tre de la nuit embel­lie de caress­es proférées à même le silence.

Avène­ment noc­turne. Noir sur noir.

Nuit coupe le souf­fle de Nuit
Nuit auréolée de Nuit
Nuit naît de Nuit
Voue Jour à l’oubli
Scis­sion du faux et de l’ennui
Dégage­ment du vrai poème
Au seuil de la parole.

La nuit tombe sans prévenir. Elle bal­bu­tie ses pre­mières étoiles. M’inspire mes pre­mières ratures de mon texte dis­parate et visqueux.

 

Fleur

 

Une rose, rouge et jaune, pointe dans l’hori­zon. Elle grandit en tournoy­ant, lance ses couleurs scin­til­lantes en fais­ceaux lumineux et exhale, par bouf­fées viv­i­fi­antes ses sen­teurs édéniques. Des nuages coton­neux, voguant dans le ciel azuré, blancs et onctueux, opu­lents et immac­ulés frô­lent l’air pur et s’en­v­o­lent, valsent avec le vent. Au champ musqué, des oiseaux ten­ant dans leurs menus pieds de petites grappes de raisins jade se fau­fi­lent dans la mous­se­line céleste. l’éc­ume de la mer indo­lente s’élève déli­cate­ment vers le ciel, en sour­dine, et dans sa mon­tée dans les airs brille puis éclate en gout­telettes sus­pendues, petits soleils ren­voy­ant, dis­til­lant la lumière mère; lumière sur lumière; lumière dans la lumière; et toute cette mag­nif­i­cence, en ondu­la­tion de cyprès, se reflète dans l’eau pure de mon verre cristalline, que je bois des lèvres ver­meils de mon amour, cette joie, c’est de mon naufrage dans l’océan de ses yeux, cette folie c’est de m’être aven­turé, l’e­space d’un moment, dans son roy­aume interdit.

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