Poète, longtemps enseignant, Pierre Chap­puis vit de l’autre côté des Alpes (de notre point de vue). Il est l’auteur, depuis 1969, d’une ving­taine de livres et recueils de poésie, la plu­part chez José Cor­ti. Cri­tique de poésie, il con­tribue ou a con­tribué à divers­es revues, dont la NRF, La Quin­zaine Lit­téraire, Cri­tique, Archipel, La Revue de Belles Let­tres… Ses Entailles s’ouvrent sur un « paysage brouil­lé » où le poème appa­raît ain­si que le pinceau du pein­tre ou l’appareil du pho­tographe (quand pho­togra­phi­er avait encore du sens). Ce sont du reste « négatif » et « épure » qui appa­rais­sent sous la plume du poète. Vien­nent ensuite les « entailles », placées sous les cica­tri­ces absentes de Pierre Reverdy, poète que le lecteur n’est pas sur­pris de trou­ver ou retrou­ver dans l’entourage de Chap­puis. Ils ont la lucarne en com­mun. Dans cette poésie, prose ou vers, tout procède d’une « ten­sion accrue du regard », phrase qui vaut presque déf­i­ni­tion de l’état de l’esprit du poète dans le monde. Car Chap­puis ne vit pas aux creux des con­cepts, plutôt à mi chemin entre rêves, oiseaux et arbres. La nature est par­tie inté­grante du regard. C’est d’ailleurs le cœur et le sens même, pro­fond, de ce qu’est le rap­port spir­ituel au réel :

 

Mon­tagne encore, scindée en deux.
 

Blanc, brume
ban­deau hérité de la nuit.
 

Telle, coupée la parole.
 

 

Et en effet ces poèmes/entailles appa­rais­sent au lecteur, sous son pro­pre regard, comme si ce lecteur regar­dait lui-même au-devant de lui, par la fenêtre, le long du chemin :

 

Sur le bout de la langue,
aus­si loin que porte la vue.
 

Tant mon­tagnes que nuages.
 

 

La poésie de Chap­puis, c’est une ren­con­tre. Le long de la marche.

 

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