Peau blanche, peau noire.
Peau colon-colonisée.
Métisse. Et alors ?

Il y a des échos d’images qui font frémir mes pores
Des lignes d’horizons loin­tains tout au long de mon corps
Il y a sur cet épi­derme caramel dont ma peau est le décor
Des mon­des étrangers qui s’accouplent encore et encore.

Une petite fille Mahi  née dans le giron des Mamelles Bleues
Allaitée au souf­fle apaisant d’Anaklé et d’Anadjagoun 
Enlevée dans son odeur de lait pour servir le roi d’Abomey.
La petite fille du pays bleu crie dans mon sang.
Ne pleure pas, tu seras mon arrière-grand-mère.

Métisse. Et alors ?

Un homme quitte le berceau ver­doy­ant de la Charente
Sur le bateau qui vogue vers les colonies
Il bâti­ra deux ports sur sa vie par-dessus l’Océan Atlantique.
L’homme aux fières mous­tach­es du pays vert saigne dans mes veines.
Dors en paix, tu seras mon arrière-grand-père.

Peau colon-colonisée …

Sa langue est aus­si incan­des­cente que le feu tapi
Dans le ven­tre du vol­can assoupi
Dont les cen­dres fer­tiles ont fait ger­mer Clarisse.
La femme ardente du pays d’ocre rouge me danse une nos­tal­gie dans le pouls.
Sois sere­ine, grand-mère, tu m’as portée sur les paroles de la vie.

Métisse. Et alors ?

Des sangs non mis­ci­bles parta­gent le souf­fle de leurs corps-à-corps
Sur ma peau caramel que le soleil dore
D’infinis paysages humains ont engen­dré la flore
De ma couleur étrange où l’amour dort.

Peau blanche. Peau noire.
Peau colon-colonisée ;
Métisse. Et alors ?

 

 

Gare de Cérons, le 29 juin 2011 à 18h10

image_pdfimage_print