Il est Français d’origine chi­noise, écrivain et poète. Il est Coréen et vit en France,  c’est un religieux domini­cain con­nu pour ses pein­tures non fig­u­ra­tives. François Cheng et Kim en Joong étaient faits pour se ren­con­tr­er. En 2009, dans le livre Vraie lumière née de vraie nuit, les poèmes du pre­mier avaient été accom­pa­g­nés par des lith­o­gra­phies du sec­ond. En 2010, François Cheng avait rédigé un texte de médi­ta­tion – « la joie » − pour accom­pa­g­n­er un tableau de Kim en Joong. Ce qui les réu­nit aujourd’hui, dans un nou­v­el ouvrage, ce sont les Can­tos toscans de François Cheng réédités pour l’occasion et qui met­tent en vis-à-vis des poèmes écrits sur sept lignes et (à gauche)  et les pein­tures, aux allures de vit­raux, de l’artiste coréen.

     Les deux hommes ont en com­mun un goût pronon­cé de la nature, un pen­chant pronon­cé pour la quête spir­ituelle, une apti­tude à révéler le beau dans la noirceur du monde. Les écrits de Cheng sur la Toscane sont le creuset de cette démarche con­jointe, à la fois poé­tique et artis­tique. Par­lant de la Toscane, Nico­las Jean Sed écrit très juste­ment dans la post­face du livre : « Ce coin de terre sem­ble inviter l’homme à répon­dre à un cer­tain appel pour une créa­tion qui élève l’homme à sa dimen­sion tran­scen­dante et universelle.

     Il y a, bien sûr, sous la plume de François Cheng, des « mar­queurs » géo­graphiques évi­dents pour désign­er ce morceau d’Italie. « Ligne de crête héris­sée de cyprès/ourlet des nuages rompu par un aigle ». Ou encore ceci : « Midi le muet/L’olivier mûrit son huile/La vigne mûrit son vin/Les four­mis trans­portent leurs vivres/Le long d’un muret herbeux/La cam­pagne à perte de vue/Tait sa joie d’être ».

     Mais la Toscane – on s’en doute – dit plus que la Toscane.  Ce chant com­mun aux deux hommes invite d’abord à la con­tem­pla­tion, à la louange, à l’insurrection des cœurs (« Dis donc ce qui vient de toi/Dis tout ce qui te soulève »). Il  fait le pont entre les vivants et les morts (« Que leur cri muet soit notre pain quo­ti­di­en ») et encour­age à vivre pleine­ment l’ici et le main­tenant (« L’éternité est là/Un seul instant l’instaure »).

     Ce tres­saille­ment de l’homme au cœur d’une human­ité en proie au mal (« Le cru­el et le méchant n’ont pas dit leur dernier mot ») peut venir à bout de toutes les vilénies. « Quand les âmes se font chant/Le monde d’un coup se souvient/La nuit s’éveille à son aube ». Ces Can­tos toscans, pour tout dire, sont un hymne à la vie en pléni­tude. Ils sig­nent la pro­fondeur de notre human­ité et sa capac­ité de ray­on­nement, à l’image de ces éclats de couleur et de lumière irra­di­ant les tableaux de Kim en Joong.

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