Nous ne dirons et ne répéterons jamais trop ni assez com­bi­en cette col­lec­tion, « Poètes trop effacés », est une néces­sité, tant elle per­met de décou­vrir les œuvres fortes de poètes dis­crets. On trou­ve ain­si au cat­a­logue de ces petites antholo­gies les noms de Jako­bi­ak, Cazenave, Allix, Pfis­ter, Thieck, Berthi­er, Selos, Héroult, Alain Bre­ton et main­tenant Gérard Engel­bach. De ce beau poète, le vol­ume pro­pose des extraits de six ensem­bles déjà parus et, comme l’usage de la col­lec­tion le veut, des inédits. Une par­tie des poèmes sont extraits d’un récent recueil inti­t­ulé De la sig­na­ture des choses. Evidem­ment, don­ner comme titre à l’un de ses recueils celui du maître ouvrage de l’alchimiste chré­tien Jacob Boëhme, cela n’est pas anodin. Encore moins quand le recueil paraît sous l’égide du Nou­v­el Athanor… Voilà qui campe la situation :

 

Raflons
Ce vol tran­chant de condor
Le bond furieux des otaries,
La patience du lézard.
 

Posons
Des briques chaudes sur la neige,
Enivrons-nous de sel et de vapeur,
Le gant du froid, retournons-le.
 

Soyons « un » dans la tour­mente, la défaite,
Vig­i­lant sous les métamorphoses.
 

 

Donc… Ora & Lab­o­ra, sans quoi une telle poésie ne peut être saisie par l’athanor qu’est le poète. A la fois con­tenant, récep­ta­cle et con­tenu. Où l’on appren­dra sim­ple­ment ce que nous enten­dons par « poésie des pro­fondeurs ». Et d’une cer­taine manière la poésie de Gérard Engel­bach est aus­si, comme sou­vent du côté de la poésie des pro­fondeurs, philoso­phie. Enten­dons-nous bien, je ne par­le pas ici de « philoso­phie » au sens des sys­tèmes de pen­sée par­fois qual­i­fiés de « dog­ma­tiques », qual­i­fi­catif lui-même, de mon point de vue, aus­si mil­i­tant que ce qu’il qual­i­fie, mais de cette recherche de la « vérité » en tant que mode de vie, et récipro­que­ment, qui ani­mait les Anciens, recherche que l’on retrou­ve juste­ment à l’époque de Boëhme, et dans laque­lle le poète des pro­fondeurs Gérard Engel­bach s’inscrit comme naturelle­ment . De la philoso­phie comme mode de vie, et donc d’être, tout comme la poésie en tant qu’état de l’esprit dans la vie. Mais André Bre­ton et René Dau­mal ont déjà ample­ment expliqué tout cela. Un « tout cela » qui dit le réel et explique la fuite en avant du Sim­u­lacre : com­ment ce dernier pour­rait-il réelle­ment résis­ter au réel ? Ce qui ne saurait résis­ter se délite. C’est tout simple.

Sinon, la réponse se trou­ve dans l’intimité intérieure des poètes/philosophes.

On lira Gérard Engel­bach. Longtemps. Et l’on écrira longue­ment sur sa poésie, quand les temps seront venus.

 

Alpin­iste du sommeil
Dans les col­orations sans nombre
De nos lettres,
La pré­ces­sion des équinox­es t’accompagne,
Lanceur de feu,
Souf­fleur du géant Cristal. 

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