Une nou­velle revue de poésie vient de naitre, Haies Vives,  emmenée par Sébastien Robert, qui signe le mot d’in­tro­duc­tion inti­t­ulé “La poésie et son Lieu”. Cet incip­it, presque pro­gram­ma­tique, donne le ton au pro­jet de cette revue : “la poésie ne dit pas les choses. On trou­ve tou­jours beau­coup de pau­vreté à par­courir une syn­taxe néces­saire dont les mots sont utiles à l’ex­pres­sion. Nous voulons dire que la poésie ne doit jamais être motivée par la volon­té de dire, c’est-à-dire ren­dre la rudesse et la résis­tance des objets, la com­plex­ité et la forme même de nos idées.” Seri­ons-nous proche ici d’une pen­sée philosophique, aux accoin­tances japon­isantes, faite de sug­ges­tions et d’im­pres­sions ? Sébastien Robert pour­suit : “le poème ne s’a­ban­donne pas au son : s’il a par­fois dis­paru dans la page, en faire cla­quer les con­sonnes et réson­ner les voyelles l’éloign­era de sa nature même. L’in­tim­ité se cherche et ne se livre pas : les mots, farouch­es, se replient au secret”. Se risquant alors à une déf­i­ni­tion : “Poé­tis­er n’est ni plus ni moins que les (les choses et les idées) couper de leurs racines matérielles ou idéelles, pour qu’elles devi­en­nent des choses poé­tiques”. Et de con­clure : “la poésie vaut tou­jours davan­tage que l’ob­jet sur lequel elle écrit car elle le trans­forme. Et les hommes ne par­lent jamais du réel mais ils dis­cu­tent tou­jours sa valeur : écrire un poème n’est jamais un acte réal­iste, ni sur-réal­iste, mais la célébra­tion de leur entrelacs pour le monde”.

Voilà donc un homme, Sébastien Robert, et un out­il, Haies Vives, qui se col­lè­tent avec la pen­sée de la poésie. Exer­ci­ce dif­fi­cile mais ô com­bi­en salu­taire lorsqu’on lance une revue avec la pas­sion au ven­tre : penser, tra­vailler, oppos­er au Super­fi­ciel d’au­jour­d’hui la matière spir­ituelle du Poème. Con­stru­ire, donc.

S’en­suiv­ent huit poètes, Bernard Gras­set, Jacques Ceaux, Eric Dubois, Patrice Goré, Rodrigue Laval­lé, Nicole Laval-Turpin, Sébastien Robert et Anélia Vélé­va, syn­thé­tique­ment présen­tés dans leur par­cours poé­tique avant de laiss­er libre place à leurs poèmes tirés de leur voy­age bibliographique. 

Plusieurs de ces poètes ont été à l’hon­neur dans Recours au Poème et nous avons plaisir à retrou­ver leur tes­si­ture, comme Rodrigue Lavallé :

 

 

Tes seins posés sur la terrasse
ont des mys­tères d’évangile
des ron­deurs de villages
aux clochers pointant
comme une aube
transgresse
la nuit
 

 

 D’autres sont des décou­vertes, comme les beaux poèmes de Sébastien Robert :
 

 

Petite et jetée,
La terre
N’avait pas recouvert
Le drap de toile
Et de pluie :
 

On ne vit plus, pâles,
Tes mains jointes au matin.
 

Voici qu’elles se donnent,
Relevées de présence
Et voulues maintenant.
 

 

Au sor­tir de cette revue sobre et effi­cace, lais­sant toute sa place à la poésie, Recours au Poème entend souhaiter longue route à Haies Vives. D’ex­pli­ca­tions sur le choix du nom de la revue, le lecteur n’au­ra pas. Ses pro­pres rêves et médi­ta­tions pro­longeront la séman­tique du titre. Quant à savoir si le pro­jet de la revue entend épais­sir le nom­bre de poètes invités à l’avenir, nous le saurons au prochain numéro.

Haies Vives, n°1, sep­tem­bre 2013, 38 pages, 10 euros

30 Clos des Bordes

45450 Don­nery

haiesvives@hotmail.fr
http://haiesvives.wix.com/haiesvives

 

 

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