(Ps IV, 5)

 

Aboi du vent ce soir, tard, der­rière la fenêtre,
Emporte­ment du vent, présence, signe avant-coureur.
Revanche du vent. Et je la fais mienne.
Et dans le vent, sur l’erre du vent, j’en entends un autre qui se lève, et je me lève avec lui,
car il faut que colère se passe.
J’entends à tra­vers le vent la Beauté qui se met en colère, et je la fais mienne.
Colère de la Beauté sur le monde et sur moi, et je la fais mienne et me laisse emporter.
Il faut, enten­dez-vous ? Il faut que la Beauté se mette en colère elle-même, une bonne fois.
Colère de la Beauté sur le monde et sur ses immondices et sur ses détri­tus, et elle me monte
à l’avenant du vent,
colère sur l’horreur du monde et sa médi­ocrité, colère
sur les vivants mêmes qui vivent comme des morts et ne se lèvent pas
quand de toutes ses préve­nances elle vient,
elle veut les aviver,
Ah ! Colère sur la mol­lesse du monde !
Quand la Beauté sor­ti­ra d’elle-même, un soir, et se dressera sur son séant,
Elle d’ordinaire si douce,
Quand pour une fois – la seule –, Elle se met­tra en colère, ce sera terrible
et beau,
et je l’appelle, cette colère, sur toute colère insen­sée du monde,
et de tous les instru­ments de mon âme je la fais mienne,
car il faut que colère se passe.
Et je la siffle
du fond du monde, avec les lévri­ers du vent !
 

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