Il suf­fit de fer­mer les yeux –

 

mon pas s’éloigne de moi
comme une cloche sourde l’air va l’absorber
et ma voix ma pro­pre voix qui crie de loin
gèle en une pelote de vapeur
mes mains retombent
encer­clant la bouche qui crie

le touch­er ani­mal aveugle
se retir­era au fond
de cav­ernes som­bres et humides
sub­sis­tera l’odeur du corps
la cire qui se consume

 

alors grandit en moi
non la peur ou l’amour
mais une pierre blanche

c’est donc ain­si que s’accomplit
le des­tin qui nous des­sine au miroir d’un bas-relief
je vois le vis­age con­cave la poitrine sail­lante et les coques sour­des des genoux
les pieds dressés une gerbe de doigts secs

 

plus pro­fonde que la terre le sang
plus touf­fue que l’arbre
la pierre blanche
pléni­tude indifférente

mais les yeux cri­ent à nouveau
la pierre recule
c’est à nou­veau un grain de sable
noyé sous le cœur

 

nous absorbons des images nous rem­plis­sons le vide
notre voix se mesure avec l’espace
oreilles mains bouche trem­blent sous les cascades
dans la coquille des nar­ines vogue
un navire trans­portant les arômes des Indes
et des arcs-en-ciel fleuris­sent du ciel aux yeux

attends pierre blanche
il suf­fit de fer­mer les yeux

image_pdfimage_print