Dans ce recueil, nous avançons à grandes enjam­bées. Par­fois des cas­cades d’images font reten­tir la musique douce, har­monieuse de mots choi­sis dans la couleur du quo­ti­di­en qui se tâtent et se répon­dent. Des images quelque­fois grandil­o­quentes puisent au réel un léger mur­mure, léger décalage, elles  entre­ti­en­nent une plus val­ue des mots usés : Ce souf­fle à l’oreille de la nuit. Les sens en éveil sont le sup­port du vivre d’une marche ten­dre et rugueuse qui ouvre un monde déjà con­nu. Les ques­tions fon­da­men­tales sub­sis­tent, celles qui for­ment la vie et ne répon­dent jamais. Il y a une tra­ver­sée chez Gerin qui engage nos épi­der­mes avec un mou­ve­ment qui s’accélère et débite plus d’images quand l’auteur cherche une con­tre­langue :

Une langue qui tienne pour cer­taine la con­nivence de l’ombre
Qui épouse les hauts champs lam­inés des estives du corps

 

Il marche jusqu’à

La civière de nos regards
A nou­veau
Au chevet du monde

Il y a un mou­ve­ment dans ces textes, mou­ve­ments internes qui décroisent les mots de la prison de leur sens et qui sou­vent démar­rent par le côté du manque.

Les divers­es  sec­tions du recueil sont com­pris­es entre deux par­ties d’un texte en italique à struc­ture dif­férente, écrit sur un ton et un esprit qui tranchent sur le reste. Un lyrisme plus étouf­fé, plus proche de la con­fi­dence, plus musi­cal : J’ai … dess­iné sur ta robe tout le désir que j’ai de toi. Le recueil bal­ance entre deux voix, l’une plus dure sous la lèvre à peine écorchées des rizières/ la margelle de ton sexe l’autre plus douce : Et les yeux du chat sur les branches/ Font naître un oiseau comme si la chose appa­rais­sait par sim­ple désir. Gerin en appelle à l’amour dans toutes les direc­tions par­fois jusqu’à la douleur, en étroite rela­tion avec des élé­ments naturels. L’abstrait et le con­cret s’appuient l’un sur l’autre pour libér­er un dire que l’on sent plus rêvé qu’accompli.

 

image_pdfimage_print