Que sommes-nous, alors qu’au ciel s’effeuillent les nuages, pen­dant que la mer immense emporte notre trace, aus­si inéluctable qu’un métronome ? Que voyons-nous la nuit sur un bord de fenêtre ? Ce sont des ques­tions aus­si vastes qu’éternelles qui tra­versent La mésange sans tête, recueil de Lydia Padel­lec, dont La mai­son morcelée nous avait aus­si beau­coup touchés lors de sa paru­tion en 2011.

La mésange sans tête est dédié à la grand-mère, fig­ure cen­trale de La mai­son morcelée, tis­sant ain­si un lien qui chem­ine à tra­vers la poésie de Lydia Padel­lec et qu’éclaire pour nous l’incipit d’Anna Akhma­to­va : Pas un poète n’a encore dit / Que la sagesse n’existe pas / Que la vieil­lesse n’existe pas / Que la mort, peut-être n’existe pas.

Le recueil s’ouvre sur une présence à la fois sen­si­ble et frag­ile aux choses et au monde, comme regard d’oiseau, à la fois con­tem­platif et hum­ble, face aux forces qui régis­sent l’univers.  Suit l’envol, ivresse des hori­zons marins où il se perd, là où brise et  fra­cas des vagues sur les rochers assour­dis­sent et affo­lent.  Temps et iden­tité se dilu­ent, bal­ayés par une puis­sance océane destruc­trice, mais aus­si source de fas­ci­na­tion à l’œil qui plonge très loin dans un passé qui le dépasse : Je ne me sou­viens plus / de l’empreinte des doigts / dans le sable préhis­torique / de l’enfant sans tronc.  L’enclos du jardin offre le refuge où émer­gent les sou­venirs, sen­sa­tions fon­da­tri­ces, images recom­posées où retrou­ver ce qui s’était dis­per­sé dans l’errance d’une bous­sole égarée. Elles sont autant d’échos d’enfance et de découvertes.

Lydia Padel­lec écrit en touch­es fines et légères.  Ces courts poèmes cer­nent avec grâce et déli­catesse un rêve d’apesanteur qu’elle épelle pour nous en bal­ançoires, marelles et saut de mésanges.

 

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