Tu n’é­tais pas là lorsque je suis passé,
j’avais pour­tant pris la route de bonne heure.
L’ocre et le rose ne se mêlaient pas encore
aux pentes de l’Anti-Atlas.
Les éboulis de la veille tenaient bons
et les ânes dor­maient toujours
d’avoir trop tourné sur le blé dur.
Oui, le jour hési­tait encore
lorsque je quit­tai Tafraout par le Nord,
la route d’Aït-Baha.
J’au­rais dû me douter bien sûr,
mais je ne sen­tis que l’odeur des amandiers
la douceur amère de leurs fruits, leurs poèmes
jetés sur le ciel ; plan­tés dans la terre fine et rouge.
J’au­rais dû m’en douter, c’est sûr !
Alors que j’ar­rivais à la Pierre-du-Vent ;
mais j’avais dans la poche
une recette de tajine,
celle que tu aimais à pré­par­er pour l’amitié.
A Arzo Wado, ils me dirent que tu n’é­tais pas venu,
qu’il y avait longtemps
qu’on ne chas­sait plus le canard ici.
Alors je me sou­vins d’un grand fleuve,
de cafés sur sa rive gauche
et des bouteilles à la mer que tu jetais sur ton destin.

image_pdfimage_print