Onde invis­i­ble
Pho­togra­phie d’un homme en allé
Vers quel horizon ?
Instant cap­turé dans la nasse de crabes .
Lumière enfouie
Dans l’espace intérieur
Déri­vant vers une mer de glace.
Accueil­lir le mouvement
Les jambes plantées
Dans le courant
Ou se laiss­er emporter par la rivière .
Dans la galerie sans fond
Veille la lampe du mineur
Enfer­mé dans la terre
Jusqu’au dernier souffle
Et jusqu’au dernier mot .
La mémoire se fragmente
Les miroirs se brisent
Les uns après les autres
Le jour se dévoile
Le noy­au de l’être apparaît
Porté par les brumes
Emmené jusqu’au rivage.
Un vis­age se révèle
Dans la boite noire
D’un homme revenu de quel naufrage ?
L’encombrement de la perte
Ou de l’absence
N’est pas le vide :
Une coquille creuse d’illusions
Et de simulacres
Un œuf blanc
Translucide
Comme un cerveau d’enfant
Avant de naître
Illu­miné par le sang
Dans la poche du ciel.
C’est dans ce cercle
Que le hochet du néant
Joue avec la semence de l’infini
Et que la con­science vibre
Dans l’univers
Empor­tant la forme du temps
Au cen­tre des galaxies:
L’instant surgit
Sur un lit d’étoiles
Et de pier­res plates..
Limpi­de orig­ine perdue
Ren­due au lan­gage qui s’y incruste
Pour ouvrir la voie
Du vivant.
Mais au pays natal
Résonne déjà la voix
Du pays mortel
Comme un écho que la vie digère
Pour avaler la mort
Et ense­mencer la terre !
Dans ce car­ré devenu men­tal et obscur
Se trou­ve pour­tant une lampe
Embar­quée sur les dents de la roue
Une lampe de saveur
Une lampe de douleur
Une lampe sur la route:
C’est une gri­mace sur un torchon
Une chair dans un corps
Et un signe dans la bouche.
Le présent se dilue
les ombres arrachent la paroi
De l’eau pourrissante:
L’axe qui nous délivre
Est aus­si l’os qui s’incline .
Dans cette rotation
Quand la proue choisit la nav­i­ga­tion ou le fracas
Nous nais­sons avec le soleil
Mais nous venons des étoiles
Des algues
Et du souffle
Qui ne tient qu’à un fil:
Celui que la lampe tisse
Dans la gram­maire de nos veines
Avec le sang du verbe
Le vent
Qui fait trem­bler la flamme
Et le feu
Ou le silence
Des astres.
Alors toutes les pen­sées chavirent dans l’impensable
Puis dans l’écume ruisselle
Le matin du monde …
Onde invisible
Pho­togra­phie d’un homme sur la plage
Ramas­sant les coquillages
Et frag­ments du naufrage
Hélices
Étraves
Morceaux de verre
Images flottantes
En miettes
Caméra nuptiale
Où le réel
Épouse
Son leurre…

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