Soulig­nant le loin­tain, vertèbres immenses de nos pen­sées, des hau­teurs à perte de vue ne mon­trent qu’abîmes sans bornes, ne sou­ti­en­nent qu’incomprises et per­ver­ties nour­ri­t­ures ; et cette idée de n’habiter que le vide, sourde et seule demeure édi­fiée pour notre con­so­la­tion, abri absolu, cabane de nos plus vio­lents et improb­a­bles bonheurs.
 

    L’Apercevable comme l’Evanescent dessi­nent-ils donc si grise­ment la lim­ite qu’il nous paraît à ce point ver­tige, alors même que nous suiv­ons ses jalons de lumière, d’atteindre dès lors aux march­es de l’ombre ?
 

Face à face entre l’œil et l’infini

Debout sur ces pieds qui ne me passent Rien

Je m’ouvre des mains d’épée

Où le cœur et la folie se caressent
 

    Ce que j’appréhende matière, ce que je devine à tra­vers, est le pan pal­pi­tant, la part cutanéï­forme et pal­pa­ble du temps — pour un moment fron­tière — à l’énigme de laque­lle, attiré, han­té par son chant de traîne, croy­ant te heurter, je m’assassine et je m’accroche.
 

Pas­sages vers d’extrêmes séjours

Virages d’ailes en fardeau

Sangs apa­trides vers leurs saints archipels

De jeunes blêmes oiseaux
 

    Aus­si reculé que le mur­mure entend, aus­si proche que le silence appelle, s’abandonner, se laiss­er venir à cette patience héli­o­ga­bale, ne crain­dre que l’unique bon vouloir de ton absence… et quit­ter sans cesse son pays sans mal.
 

Séraphins de la peur

Dia­bles de retrouvailles

Tou­jours qui sont les miens

Tou­jours qui sont les mêmes

 

    Puisqu’il est insen­sé d’affirmer par des traits où finis­sent et où com­men­cent les choses.

   Puisqu’il est tant aisé, en cette inquiète et longue et mortelle éter­nité, d’en tir­er entre les êtres.

   Puisque ce qui réu­nit dans les pâles douceurs de soi n’est pas entière­ment étranger à cette paroi, née nulle part du néant, qui nous ras­sure, nous entoure… et nous ment.

    Quand s’impose au corps le fran­chisse­ment naturel, et cette dimen­sion d’une sépa­ra­tion soudaine se révélant lente­ment poreuse à l’humeur déchi­rante des étoiles.

    Quand brûle le dénoue­ment, quand de nos idéales murailles l’artifice se dévoile dans un fra­cas de poussière.

 

Pour ceux qui ne sont plus

Pour ceux qui ne sont pas encore

J’écris à la façon d’alors

Des mots de bienvenue

 

    Car où irais-je, sinon où s’enroulent l’eau et la pierre ?

    Et par où reviendrais-je sinon par là, où roulent ensem­ble l’or et la mer ?

 

 

 

Les Cahiers du Sens N°17

(2007) 

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