6e opus de Réso­nance générale, revue emmenée par Serge Mar­tin, Lau­rent Mourey et Philippe Païni, tous activistes du poème et de la poésie, et poètes que les lecteurs de Recours au Poème con­nais­sent ou retrou­veront sous peu dans nos pages. C’est aus­si le cas d’une par­tie des poètes dont le nom est inscrit au fron­ton de ce vol­ume, ain­si Antoine Emaz, Fab­rice Farre ou Lau­ra Vasquez, poètes que l’on lira aus­si dans nos pages. C’est donc en ter­ri­toire proche que nous plon­geons les yeux. D’autant qu’un autre point com­mun rap­proche incon­testable­ment Réso­nance générale et Recours au Poème : celui de penser la poésie dans un con­texte d’urgence. Les noms des deux revues par­lent d’eux-mêmes. Là comme ici, la poésie et le poème sont pris au sérieux, et leur fonc­tion pro­fondé­ment révo­lu­tion­naire est affirmée.

Du con­tenu de la revue, je ne dirai que peu, préférant évo­quer ce que cette générale fait réson­ner en moi. La revue, on la lira, et la lisant on entr­era sur un ce chemin dont je veux ici parler.

Où tu bouges je vois le poème, tel est le « thème » de ce numéro. Cela com­mence par un man­i­feste con­tin­ué, dans lequel les poètes / ani­ma­teurs de Réso­nance générale posent un des prob­lèmes fon­da­men­taux de notre temps, prob­lème auquel la poésie et les poètes ont, de notre point de vue, le devoir humain et poé­tique (mais ce sont mêmes mots) de résis­ter. Le poète est par sa nature même un com­bat­tant, un guer­ri­er, un cheva­lier par­fois un tan­ti­net aris­to­crate. En un mot, le poète est un révo­lu­tion­naire (car la vie poé­tique est agir révo­lu­tion­naire par nature) qui a les yeux et l’âme entière­ment tournés vers le Poème. Bien sûr, les acteurs de Réso­nance générale ne se recon­naîtront pas entière­ment dans les mots qui précè­dent, ce n’est pas grave, tout est ici ques­tion d’angle. Et cet angle, ici, nous con­vient : « Ils dis­ent ça bouge. Cer­tains ajoutent trop et d’autres pas assez. En experts, ils obser­vent, décrivent, analy­sent et pérorent, abjurent et con­jurent. Le bougisme fait bien l’affaire du con­ser­vatisme et ce dernier l’affaire de ceux qui n’ont qu’un mot à la bouche : s’adapter au con­tem­po­rain, aux flux qui comptent. Jeu de balles. Ils aiment se la ren­voy­er et, pen­dant ce temps, ça tourne. Les affaires. Petites ou grandes. Juteuses tou­jours. Et si non, alors ils changent de sens sans per­dre le nord. Bref, rien ne bouge quand ça bouge ». Heureux sont les acteurs de Recours au Poème de con­stater l’influence de ce penseur qui nous est cher, Pïerre-André Taguieff, PAT pour les amis, et de son con­cept de « bougisme ». Heureux aus­si de con­stater qu’en cer­tains endroits, encore trop rares mais aux­quels nous nous flat­tons d’appartenir, le monde de la poésie recom­mence à penser.  Et penser aujourd’hui, cela con­duit à con­stater qu’il y a de nou­veau de l’inhumain en nous et face à nous, de l’inhumain pro­pre­ment total­i­taire, cet inhu­main qui « bouge » et qu’ici nous analysons sous le voca­ble d’immé­di­at. La machine dans laque­lle nous sommes plongés tente de faire de nous des êtres plus immé­di­ats et agités que l’humain. Com­ment ce dernier ne… pèterait-il pas un câble ? Nous sem­blons « des­tinés » à devenir des homocode­bar­rus, à moins que nous con­servions l’œil fixé sur cette étoile mer­veilleuse et flam­boy­ante qu’est le Poème. Cela, en prox­im­ité de Réso­nance générale, ce con­tem­po­rain mécanique, nous le refu­sons intégralement.

Pour cette sim­ple et belle rai­son que nous voulons vivre inté­grale­ment.

Et nous n’aspirons qu’à une sorte d’immédiat, celui de l’implosion con­crète, immé­di­ate­ment, de Das Sys­tem dans lequel le soft total­i­tarisme mécanique vise à nous entraîn­er. Qu’il meurt, ses ruines seront de toute beauté.

Nous ne sommes que des poètes, rien ou si peu, une espèce de tiers-état con­tem­po­rain. C’est pourquoi nous agis­sons en pleine con­science de la respon­s­abil­ité qui aujourd’hui pèse sur nos épaules : celle de con­duire la trans­for­ma­tion du monde.

Que la beauté l’orne.

Le Poème, Réso­nance générale le voit, au-delà du bougisme. Et nous, nous le regar­dons tan­dis qu’il nous regarde.

 

Réso­nance générale n° 6.
Revue semes­trielle.
Adresse : Serge Mar­tin. 35 chemin de l’Arc. 14000 Caen.
resonancegenerale@laposte.net

ou : serge.martin@unicaen.fr

Blog : revue-resonancegenerale.blogspot.com
Abon­nement : 20 euros
Un numéro : 12 euros.
La revue est éditée par L’Atelier du Grand Tétras.

   

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