La revue Sand, sous titrée « Berlin’s eng­lish lit­er­ary jour­nal », est une revue de langue anglaise, très ouverte à la poésie, pub­liée à Berlin et disponible dans la majeure par­tie des librairies et des lieux cul­turels qui comptent, in ou off, dans la cap­i­tale européenne de l’art, sous toutes ses formes, y com­pris incon­nues ou invis­i­bles. Il faut avoir mis les pieds dans cette ville pour com­pren­dre cela. C’est une revue de très haute tenue, qui con­tribue à l’animation et la vie lit­téraire berli­noise (par ses « par­ty »), et son huitième opus ne déroge pas à l’habitude. L’éditorial de sa rédac­trice en chef, Lyz Pfis­ter, annonce la couleur : « This issue of Sand is a fire with a slow burn », après s’être demandé « What is there is too much dark ? ». Et en effet, Sand explore ici, à tra­vers les voix poé­tiques choisies, l’état con­tem­po­rain de nos êtres. Cela ne va pas sans ténèbres. Cela ne va pas non plus sans motifs d’espérance. Le fil est ténu qui se fau­file dis­crète­ment entre blancheur et noirceur. C’est un espace dont, pour de mul­ti­ples raisons, Recours au Poème se sent et se sait proche. On ne sera donc pas éton­né d’y retrou­ver deux poèmes de Matthieu Bau­mi­er, traduits par Eliz­a­beth Brunazzi, dont l’un est dédié à Joël Coutu­ra, ancien directeur du Musée d’Aquitaine, his­to­rien des idées et de la franc-maçon­ner­ie bor­de­laise, à laque­lle il con­sacra plusieurs ouvrages impor­tants peu avant de nous quit­ter il y a une ving­taine d’années, trop jeune, des suites d’une mal­adie rare. Un poème très émou­vant qui ne pour­ra que rap­pel­er la sil­hou­ette de Coutu­ra à ceux qui ont eu la chance de ren­con­tr­er cet homme. Bien sûr, Sand ne pub­lie pas que de la poésie ; c’est cepen­dant sur cette forme de recherche en dedans des mon­des con­nus et incon­nus, vis­i­bles et/ou voilés, que nous devons ici insis­ter, tel est l’objet de ce déploiement de forces résis­tantes qu’est Recours au Poème. On lira donc avec bon­heur les poèmes du poète islandais Val­ger­dur Thorodds­dot­tir, ceux aus­si du norvégien Jan Grue, ou bien encore les Notes for Jack Schae­fer de l’américaine Shane Micha­lik et Two pos­si­ble ways Michael Regime fell in love with lan­guage de cet autre poète améri­cain qu’est Travis Vick. Tout cela est fort riche et mon­tre que la poésie n’a pas de fron­tière (s), ce dont nous ne dou­tons aucune­ment au sein de Recours au Poème, bien que cela soit sou­vent peu évi­dent en France, ce pays où « ne pas avoir de fron­tières » sig­ni­fie trop sou­vent, du moins en ter­res de poésie, avoir l’ego cen­tré sur le cen­tre de Paris, une agréable ville de province. Nos pages sont tout le con­traire : un regard porté vers les ailleurs. Et ils n’ont aucune lim­ite imaginable.

Sand n°8 automne 2013
Adresse : Sand Jour­nal. Donaus­trasse 50. 12043 Berlin.
Mail : info@sandjournal.com
Site : www.sandjournal.com
On retrou­ve aus­si la revue sur Face­book en tapant « sand journal ».

 

Superbe six­ième opus de La main mil­lé­naire, revue de poésie orchestrée par Jean-Pierre Védrines et ses amis, une revue main­tenant fer­me­ment instal­lée dans le paysage de la poésie con­tem­po­raine. À décou­vrir de toute urgence pour ceux qui ne la con­naî­traient pas encore. Ce vol­ume s’ouvre sur un bel ensem­ble signé James Sacré, Des pho­tos pour écrire :

 

Le sou­venir touche

À quelle inquié­tude du présent vivant ?

 

écrit le poète, avant de céder la place à des voix nou­velles (en La main mil­lé­naire) : Jean-Michel. Har­ron, André Ughet­to, Nathalie Bénézet, Pas­cale Rivray-Coupard, Jean-Marc Bar­ri­er. On médit­era ain­si sur ces vers du poète André Ughet­to, par ailleurs maître d’œuvre de cette autre revue du sud qu’est Phoenix :

 

Au con­flu­ent du sec et de l’humide
des racines à nu se meurent du regret
d’une riv­ière lente. Mais l’œuvre au noir
promet le vert d’une résurrection
par la comp­tine de nos ron­des saisonnières.

 

Il y a quelque chose de cette alchimie ini­ti­a­tique, de cette pro­fondeur du poème humain, dans l’existence même de La main mil­lé­naire. Ses pages don­nent aus­si à lire des poètes déjà croisés dans les numéros précé­dents, ain­si que par­fois en divers­es revues, comme Jacquy Gil, Ida Jaroschek, Quine Cheva­lier, Patrick-Pierre Roux. Dans ce haut con­cert, une men­tion toute spé­ciale pour les textes de Jean-Claude Xuereb et Matthieu Gosz­to­la. On lira aus­si avec bon­heur la ren­con­tre entre Jeanne Sét­ian et Philippe Jac­cot­tet et un intéres­sant dossier con­sacré au pein­tre Pierre Cay­ol, au sujet duquel Marc Alyn écrit : « Il sait de source sûre que la matière s’achemine vers l’esprit et l’âme vers l’Amour, ce qui con­fère à ses tableaux une dimen­sion secrète du bon­heur ». Tout est dit.

La main mil­lé­naire n°6, été 2013
Abon­nement 3 numéros : 36 euros
Le numéro : 15 euros
Mail : jean.pierre.vedrines@cegetel.net

 

 

Le numéro 03 de la revue pas­sage d’encres (série II) s’intéresse aux tran­si­tions. Pas­sage d’encres est une fort belle revue, emmenée par Chris­tiane Tri­coit, que je croise depuis une douzaine d’années, au for­mat grand cahi­er. Il y a déjà une longue his­toire lit­téraire der­rière les pages de cette revue, pour les auteurs pub­liés, nom­breux à suiv­re des chemins sûrs (Chris­tiane Tri­coit a tou­jours ouvert les pages de sa revue aux voix nou­velles ou décalées, qu’elle en soit ici chaleureuse­ment remer­ciée), comme pour le développe­ment mené sous forme de livres. On se dirig­era ici pour un entre­tien avec Chris­tiane Tri­coit au sujet de l’aventure pour le moins extra­or­di­naire qu’est son navire revuis­tique et édi­to­r­i­al. L’objet de ce numéro est de « pass­er le pont », une autre manière de dire « tran­si­tion ». La revue s’ouvre sur un ensem­ble poé­tique signé Yves Boudi­er, La seule rai­son poème,  extrait d’un recueil à paraître l’année prochaine dans la col­lec­tion « Action poé­tique » du Temps des ceris­es, texte à la force toute entière con­tenue dans son évo­ca­tion de l’eau, du sel et de la spi­rale. Vien­nent ensuite des textes très divers, pas­sage d’encres ne craig­nant jamais les lim­ites et ne s’occupant que peu des éti­quettes de genre à la mode (ou non). On crois­era donc, entre autres, les voix de  Philippe Di Meo (à pro­pos de Zan­zot­to), du neu­ro­bi­ol­o­giste Her­bert Axel­rad, du psy­chi­a­tre Luciano Bonuzzi ou du géo­graphe Jean Rad­vanyi. Le tout est accom­pa­g­né d’œuvres artis­tiques. Cela n’en fait pas une « revue de poésie » diront de pré­ten­dus puristes. Je répondrai que l’on se fiche des puristes, et que la poésie n’est pas dans le mot. Elle est dans l’état de l’esprit. Ce même état de l’esprit qui ani­me pas­sage d’encre depuis près de vingt ans.

 

Pas­sage d’encre, série II, 03
Moulin de Quilio. 56310 Guern.
Le numéro 20 euros
Abon­nement deux numéros + un hors série : 20 euros.
Mail : passagedencres@wanadoo.fr
Site :
http://www.inks-passagedencres.fr

 

Autre revue à la riche his­toire, Frich­es. Cahiers de Poésie Verte pub­lie son numéro 114/114 bis, sous la houlette habituelle de Jean-Pierre Thuil­lat. La revue a trente ans d’âge et le « 114 bis » est une manière de mar­quer cet anniver­saire sous la forme d’une antholo­gie com­posée de 64 poèmes signés par 64 poètes ayant pub­lié là au cours des quinze dernières années. On décou­vri­ra ou redé­cou­vri­ra ain­si des poèmes de Charles Juli­et, Michel Butor, Marc Alyn, Mario Luzi, Bernard Mazo, Guy Gof­fette, Jude Sté­fan, Serge Wellens, Odile Caradec, Bernard Per­roy, Marie-Claire Banc­quart, Michel Cosem, Pierre Maubé, Claude Vigée, Lorand Gas­par, Georges Dra­no, Jean-François Mathé et tant d’autres… Le sim­ple fait de par­courir ces pages anniver­saire mon­tre l’importance du lieu poé­tique que Frich­es a été et con­tin­ue d’être. Jean-Pierre Thuil­lat est un poète/passeur et/ou un passeur/poète. Qu’il soit remer­cié de tout ce tra­vail mené avec acharne­ment au long des années.

Le numéro 114 précède le « 114 bis ». On peut y lire un « hors champ » con­sacré à Isabelle Pon­cet-Rimaud, un dossier pas­sion­nant autour de deux poètes de Gal­ice (Manuel Rivas et Lois Pereiro), deux « Cahiers de Textes » com­por­tant des poèmes de Paul Badin, Matthieu Bau­mi­er, Eve Lern­er, Valérie Canat de Chizy, Alain Baquier, Mar­tine Bar­li­er, Michel Druez et Line Szol­losi. Le tout est accom­pa­g­né de notes de lec­ture. Ces pages sont à lire, si jamais (tout est pos­si­ble) vous n’avez encore jamais eu cette forte revue en mains.

 

Frich­es. Cahiers de Poésie Verte, n° 114/114 bis.
Le Gravier de Glan­don. 87500 Saint Yrieix.
Abon­nement 3 numéros : 25 euros
Le numéro : 15 euros.
Mail : jeanpierre.thuillat@wanadoo.fr

 

 

 

 

 

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