Pour ne pas oublier
Puis-je me sou­venir que justement
Je ne me sou­viens pas.

Ce n’est que lorsque je recon­nais que je ne sais rien
Qu’il m’est don­né la pos­si­bil­ité de tout connaître
Car la per­cep­tion de ma fragilité ren­force encore
La con­science qui m’est don­née de l’Infini,
Comme la con­stata­tion répétée de mon oubli
Me rap­pelle sans cesse à la Présence.

Ai-je une autre solu­tion que de voir où se loge le problème ?

Il me faut percevoir le monde voilé de faux
Pour m’ouvrir à la vraie vie,
Et sen­tir les bar­reaux de ma prison
Pour réus­sir mon évasion
Et com­pren­dre qu’en vérité
J’ai tou­jours été libre.

Seule la claire vision de mon manque
M’offre la pos­si­bil­ité d’être comblé
Car ce n’est encore que lorsque je perçois
Que sans cœur, je suis inca­pable d’aimer,
Que se révèle à moi le mer­veilleux Amour !

Seule la per­cep­tion directe de mon orgueil
Ren­force la con­science qui m’est don­née de l’humilité

Seule la per­cep­tion directe de mon amour-propre
Me révèle la présence imper­son­nelle de la paix

Je ne peux vivre qu’en voy­ant ma vanité
Com­pren­dre que « Je suis la voie, la vérité et la vie »,
Qu’en faisant l’expérience de l’impasse
Du men­songe et de la mort.

Car je ne suis pas un homme qui fait l’expérience de la Vie
Mais je suis la Vie qui fait l’expérience d’être un homme.

Lâch­er-prise, tout lâch­er en lâchant celui qui tient
Voir que je ne suis rien pour sen­tir que je suis Tout
Con­tem­pler l’éphémère pour renaître à l’Éternel.

Ici et main­tenant, voilà quelle est ma tâche,
Et le doux labeur de la Béatitude –

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