1

 

Les trois femmes qui chantent 

dans l’aube du Cheva­lier à la Rose

ne m’ont pas empêchée 

d’ouvrir avec une lame neuve

le gras de mon pouce dur brugnon

d’où extraire un morceau de gel

qui fond à mon bras

dans le jour vient par­mi les gémissements 

et les larmes de reconnaissance

 

 

 

2

 

Tu es entrée dans l’enchantement d’une aube

noire comme la mon­tagne où tu vis

recluse dans le cer­cle de souvenirs 

alcool neige thé vent d’autan

Xanax au beau nom de demi-dieu 

qui empêche que la nuit s’attarde

dans le jour et que tu meures 

sans avoir franchi les drailles de sapins

et de hêtres pour descendre

vers les cyprès de l’Aude

 

 

 

3

 

Jour après jour

sur les dalles de minuit 

tu te dédies au gel 

et recom­mences à mourir

de ne savoir crier

ni prier hors des mot

 

4

 

La table est celle du tueur

Ses bras s’allongent

Sa veste tombe avec les grandes eaux

du print­emps à venir

Son silence me sépare de lui

dans l’absence de couteau

 

 

 

5

 

Nul besoin d’en appel­er à l’âge de la houille

le Verbe est là

qui erre d’une langue à l’autre

et chante dans la langue des langues

en atten­dant le Roi misérable 

sous le mur qui tombe moins vite que le jour

 

 

 

6

 

Mon vis­age tourné vers lui-même

je n’ai soutenu dans l’ombre

les yeux d’aucun inconnu 

ni la buse haute en plein midi

Je suis nue dans cette face

plus muette que l’ubac

qui me sépare de moi

 
image_pdfimage_print