Né en 1961 sur les bor­ds de la Seine, Jean-Marc Sour­dil­lon a d’abord enseigné à l’In­sti­tut français de Madrid puis par choix, pen­dant dix ans, à l’hôpi­tal Ray­mond Poin­caré de Garch­es auprès d’élèves hand­i­capés. Il enseigne à présent en classe pré­para­toire dans la région parisienne.

Ont comp­té pour lui d’une manière déci­sive les ren­con­tres avec Philippe Jac­cot­tet et l’œuvre de María Zam­bra­no  ain­si que la décou­verte, à l’âge de 16 ans, des Cévennes, sa région mentale.

Depuis cet âge où tout a com­mencé vrai­ment, écrire (poé­tique­ment) a tou­jours été sa corde de rap­pel. Il vivait, il dévis­sait, il écrivait. S’éblouissait.

Il pour­rait met­tre en exer­gue à tout ce qu’il écrit cette phrase inau­gu­rale de María Zam­bra­no : ” Tout est révéla­tion, tout pour­rait l’être si on l’ac­cueil­lait à l’é­tat nais­sant.” Ecrire, en effet l’aide à naître, à pour­suiv­re la nais­sance inachevée. Ce qu’on appelle ordi­naire­ment nais­sance n’é­tant que le pre­mier jour de la  nais­sance véri­ta­ble, celle  qui n’a pas de fin. Voilà pourquoi il essaye d’être atten­tif, tout autour de lui, à ce qui naît et que, générale­ment, parce que c’est imper­cep­ti­ble, on ne voit pas. Ce sont ses enfants, en nais­sant, qui l’ont mis sur cette voie-là. Il sait aus­si qu’il n’est pas tout seul et que la nais­sance ne peut se faire qu’à tra­vers quelqu’un d’autre. Sa poésie est donc tou­jours adressée, tournée vers quelqu’un, par­fois il aimerait bien savoir qui. Ecrire est une manière d’é­clair­er, de décou­vrir peu à peu son vis­age. Il a trou­vé chez Ale­jan­dra Piziarnik un vers qui résume bien les choses. Toute la nuit j’écris pour chercher qui me cherche.

Enfin, il sait que l’écri­t­ure se fait dans le pro­longe­ment de la vie, dans ce qu’elle de plus intime­ment, de plus con­crète­ment vécu… Comme il a été dif­fi­cile de s’ar­racher aux con­cepts, aux grandes idées, aux images sai­sis­santes ! Il le fal­lait pour entr­er les yeux grands ouverts dans sa vie, sa pro­pre vie, dans ce qu’elle avait de plus sin­guli­er, de con­cret et donc d’u­nique. Là et seule­ment là pou­vait s’ac­com­plir la nais­sance. Au milieu des cir­con­stances. La poésie aide à ça.  C’est ce que Philippe Jac­cot­tet lui a enseigné pen­dant son ado­les­cence, mais aus­si Rim­baud, Joë Bous­quet, María Zam­bra­no et Jean-Pierre Lemaire, le poète ami et admiré, l’habi­tant musi­cien de la “marge des jours”.

La dif­fi­culté n’est pas d’écrire, mais de vivre de telle manière que l’écrit naisse naturelle­ment. C’est cela qui est presque impos­si­ble aujour­d’hui ; mais je ne puis imag­in­er d’autre voie. Poésie comme épanouisse­ment, flo­rai­son, ou rien. Tout l’art du monde ne saurait dis­simuler ce rien. Philippe Jaccottet

 

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