… comme sont les filles
“nous ne pratiquons pas de politique de retours”
dans un verre de whisky
je me suis vêtue d’étoiles
puis nue
j’ai bu à ras bord ta bouche
prêtée de nuit
sans garantie
quelque chose se fait jour
un soleil daté
tente d’imiter
le nouveau venu
au chevet du jour où il m’a connu
magot d’automne
après quelques siècles
oui
ça devrait pouvoir
se tenir en équilibre
sur le fil d’un cri
Prodigieux manoeuvre
Je ne peine pas à t’aimer, moi,
bête des sommes où je rêve loin de toi
mais
je ne me console pas non plus, augmentée de ta main, fleur au jardin pendu -
ta main preuve certaine du monde dansant autour
— s’il en fallait des preuves -
du monde extasié sous le feu de ma peau au chevet du tournis,
tournis du soleil fou qui lève nos matins,
ta main qui jamais ne s’essouffle, tenace ganse d’amour,
fourbisseuse d’extases, masque dévoilant les voiles,
ta main, poumon obstiné que ma main
entrelace ta main où je m’éveille dans une liasse
d’étoiles à savoir :
— revers qui repousse l’avancée têtue
de la menace évidant son fuseau ténu d’heures rapaces,
revers à mon envers, velours en carapace puis
— paume, irriguée des lignes de mes pages,
aventureuse paume irradiée d’or, joueuse d’un jour,
raconteuse précise et obstinée, paume enceinte de ma joie singulière
bombée dans son berceau de parme,
paume qui s’embarque dès l’orée des contours, et m’endort puis
— bouquet d’orpailleurs, réunion de virtuoses, doigts volubiles,
ondoyants danseurs de ma piste ductile, fauteurs de troubles,
sourciers insoumis que démultiplie la fonte des rêves,
floraison sur l’étang de ma chair épanouie,
grands causeurs, dix de coeur à la proue,
pulsation de la pulpe sous l’incarnat languide,
puis
passant à la poupe, chavirante naissance,
aveugles nautoniers de la reconnaissance…
Je ne me console pas non plus, augmentée de ta main — étreinte de la mienne -
des années dépassées où nous ne nous savions
ni du même espace ni de la même langue
où s’attardent nos mots
— ces signes volatiles dont fusent les baisers -
orphelins de nos bouches rangés dans des volumes
par ordre alphabétique
quand tout ordre multiplie nos chances de nous perdre
nous me manquera
pour détacher ma main de tes hanches
il faudrait larder jusqu’aux os
j’ai le bras long mais c’est dimanche
je ferai mieux d’aller au zoo
BONUS : fer — Grand K
enfin
je murmure
enfin !
le livre où périt l’arbre, je ne l’ai pas écrit
même mort,
l’écorce incarnée,
parle l’arbre dans mes cordes
et l’arc de mon corps te ploie
foudroyée la maison crie par la fenêtre et toutes ses fissûres
son grand cri de joie autour duquel danser : ce sont tes bras que réclament
mes bras
la petite pluie a le zèle du fer rouge — mais elle dorlote les endoloris
Vois :
je ne saborde plus mes rêves,
et la réalité éreintée tourne jupons par dessus-tête
l’arbre où périt le livre, grimpons dedans — accroche-toi
“et l’on se dira des poèmes ?”
oui, si tu veux, oui… mais après
par cœur