Nous suiv­ions le courant et voyagions
en ascenseurs haut et droit vers les étages ;
en plein milieu, nous nous retournions, tels des estomacs,
les ascenseurs se mirent au carré ;
nous nous ren­con­tri­ons en vête­ments, achetés
en sol­des, et flot­tions des bou­quets de fleurs fraich­es à la main.
C’est la dis­tance. Cer­tains par­mi nous partaient
en sémi­naire, plongés dans le gazouil­lis des pas­sages, c’est
la dis­tance, la dis­tance – d’autres, soli­taires, repous­saient la neige
loin des mon­u­ments de la ville natale.

La paume de la main s’ouvre : tu y aperçois les miettes
du mois que tu viens de pass­er. Retrou­vé dans le bras brun du fleuve
com­mun, petit pois­son agile, avec ses dents faits de protes­ta­tion silencieuse.
J’ai ten­té de touch­er sa joue, mais on aurait dit
l’autoroute fuyant sous les roues.
Il n’a pas bougé, pourtant
il s’échappait sous les mains comme de l’eau. C’est alors
que
c’est arrivé : les tours des maisons sont entrées dans la rivière,
et de leurs bor­ds angu­laires, elles se sont mises

à nag­er.

 

 

Tra­duc­tion Stéphane Bou­quet et l’auteur
 

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