La pluie au goût d’oranges amères partout se cale
pose ses bras lourds sur le dos du souvenir
ravive les cer­cles et jeux de tes rires
dans un jaune vif  immense qui aveu­gle et fait mal

                                                                                Forêts clos­es circulaires

Dans la nuit les esprits voient chuter ton corps
Je te donne la main je ne ferme pas les yeux
dans ce temps immo­bile et pieux
je cours j’attrape les scarabées d’or

                                                                                 Entre ciel et terre

Un fuit vers la lumière je l’appelle Lazare
et laisse fil­er un temps l’éternité
le soir je partage avec l’étranger
ombres et douleurs à remod­el­er le hasard

                                                                                   Mater­nité d’horizons

Dans le cadavre exquis lente­ment je plonge
quelle beauté les bleus en toi ces humanités
qui désha­bil­lent ton vis­age d’ange en ricochés
enfants qui lèchent tes plaies n’est pas un songe

Arriverais-je à saisir ce que tu pleures
la mer absorbe tes larmes grosse de tes malheurs
les hommes s’y baig­nent dans le bonheur
plein soleil tout se trans­forme sauf la peur

Les Ros­es font exprès d’être des Roses
à la sur­face pour ne pas mourir de tristesse
leur beauté nous éloigne de tout ce qui blesse
les longs dimanche les jours moroses

Sur le Rio Grande tu suces des morceaux d’étoiles
silen­cieux nous suiv­ait un loup
amar­rée mon nez au creux de ton cou
ta peau débor­dait le monde en un scin­til­lant voile

                                                                                J’épouse l’insaisissable

L’innocence ouvre la voie à l’enchantement
vien­nent y boire ani­maux au crépuscule
langues s’abreuvent de deux choses Lune
et chant des sirènes aux pâles filaments

                                                                                Dans la fraîche campagne

le par­fum âcre et piquant des tulipes fanées
finit à force par me bouleverser
des bouch­es muettes se noient
au bout de leurs bras l’histoire
dans l’irreprésentable de la mémoire
tour­mentent ton âme en exil
dis-moi comment
vivre à la sur­face des choses sans foi
en sculp­ture de mar­bre illuminée

                                                                               Mais point de travestissements

Cesse de ges­tic­uler en série noire
cette mon­stru­osité en nous
au cœur un pro­fond sommeil
j’accueille tous tes génies

recon­nais mes frag­iles victoires
qui flottent
à la sur­face de tes insomnies
sur ton front d’un bleu cramoisi

                                                                              Nous sommes tous des faus­saires de nous-mêmes

Tu con­traries mes vérités
j’offense tes certitudes
toutes les philoso­phies sont dans les mains du jardinier
te laiss­er venir c’est l’art de la calligraphie
les arbres ces livres qui te sont destinés
c’est ton coeur qui te relie au monde
à sa beauté autant qu’à sa tragédie

                                                                                Som­bres nymphéas

Obscur
ton futur gît dans mon assiette
se trans­forme dans mon estomac
frais­es myr­tilles framboises
baies cas­sis lavande des bois
Comme ce vin doux m’enivre
les cieux…

                                                                             Les cieux

Pourquoi veux-tu demain tou­jours plus vite
tu ne vivras pas plus demain qu’aujourd’hui
plus vite à la mort, plus vite à la mort !
pour toi je démul­ti­plie les heures
restons dans ce présent sans lendemain
demain
c’est sous la terre

                                                                            Plus de lilas

Un jour
quelqu’un vous dit : c’est l’hiver
alors on aligne des peut-être de carnaval
on fait le fou on fait le sage
Qui croit être ce qu’il est
demeure dans un con­stant vertige

Si les Ros­es font exprès d’être des Roses
pour te faire oubli­er tous tes deuils
tu dois les croire
à tous les chapitres de notre histoire

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