Est-ce le Rhin ce fleuve, ou l’Escaut, la Tamise
ma tête est comme un pont, l’eau tourbillonne, frise
de souvenirs tremblants, j’oublie ma vie dehors
on marche bruyamment, soudain pénombre, l’or
autour de ce visage peint sur une icône au mur
ce regard doux profondément et pur
j’entends la pluie ce sont les pleurs et la douleur des hommes
l’écriture penchée du temps qui frappe et sonne,
ce visage ne craint ni tempête ni vent
il est dans le siècle, il est hors du temps
c’est votre visage grave et beau Vierge Marie
Villon ce frère d’un autre âge, avec lui je vous prie
je vous priais naguère à l’Oratoire d’Old Brompton Road
au Sacré-Cœur, à Rome, et toujours le Mal rôde
la pluie heurte les toits et le vent se déchaîne
nous vous avons abandonné Seigneur Jésus, la laine
de la tunique à terre et la croix désolée
et vous mourant si seul et Marie seule allée
avec Jean près de vous tandis que la nuit tombe
et le monde ici bas est une vaste tombe
voilà ce qui surgit au jour dans le ciel blanc
la douce, la bienheureuse pluie lave maintenant
les trottoirs d’eau lustrale et mon cœur baptisé
ma pauvre âme en chemise il faut la nettoyer
mes pieds qui ont marché sur les routes du monde
et mes oreilles sourdes par trop de bruit du monde
Seigneur je viens à vous, je suis ce naufragé
la vie pousse à la rive chacun jeunes, âgés
nos mains sont lasses, nos jambes nous emportent
et nous venons frapper le soir à votre porte
mort et néant vaincus, Jésus pardonne
j’entends la grande joie, la cloche en bronze donne
Voici la joie du cœur, la chair renouvelée,
le feu dans la nuit vaine, la rude vérité
je m’accroche à ce cierge à la petite flamme
je sens ragaillardie, tremblante encore l’âme
Seigneur vous voici hors, Résurrection le gué,
allons à votre suite, et d’un pas assuré,
tout est si simple, dans la lumière, vie et joie
je tourne vers vous mon cœur, vers Vous tourné vers moi.