Le titre de ce recueil, Terre sen­tinelle, à l’image de l’ouvrage de Guille­vic auquel on pense immé­di­ate­ment, fait œuvre à lui seul. Il y a beau­coup en ces sim­ples mots élagués. C’est un livre de riv­ières, d’arbres, d’animaux ; une manière d’être au monde tout en en con­stru­isant le lieu.

À l’envol des oiseaux.

Fabi­enne Raphoz est né en 1961. Son ate­lier com­porte des livres de poèmes et des essais, la plu­part parus chez le même édi­teur, un édi­teur dont il con­vient de saluer la beauté physique des livres. La poète est aus­si éditrice, oeu­vrant pour la poésie et le mer­veilleux au sein des édi­tions José Cor­ti qu’elle dirige en com­pag­nie de Bernard Fil­laudeau depuis 1996. On la sait pas­sion­née par la nature, le monde ani­mal, et en par­ti­c­uli­er les oiseaux. C’est ain­si que Terre sen­tinelle con­tient… tous les ani­maux de la Terre. Déjà, Ses Jeux d’oiseaux dans un ciel vide, augures (Héros-Lim­ite, 2011) étaient entière­ment con­sacrés aux oiseaux. Car il y a « de l’oiseau » en cette poète quand elle nous con­duit, comme sur­volant la/sa géo­gra­phie, de sa terre natale à l’Afrique, en pas­sant par ses ter­res intérieures, celle de la mère, de la perte, et de la nature proche. Les poèmes sont enrac­inés dans le vol, de branch­es d’arbres en ciels éclairés. 

Ain­si :

 

enfer­mé
l’œil fertile
les expose
toutes les bêtes
de la Tête
 

puis les libère
du toit – trop
plat
 

La poète entraîne son lecteur (ou son com­plice) de la glaise/au miroir, et offre une plongée en res­pi­ra­tion dans le creux même du monde – de ce qui est ; de ce qui vit. Il y a de l’espoir dans cette poésie, une sorte de refus du nihilisme actuelle­ment à l’œuvre. Une poésie bien­v­enue. Et cepen­dant lucide :

 

le drame ce n’est pas :
la six­ième extinction
le drame c’est :
l’instrument est conscient ;
l’instrument a extrait
l’enfer d’ici paradis.
 

Pour­tant : L’enfance fos­sile ray­onne encore

Il faut lire la poète et son argile, quand elle fait œuvre.

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