Tout sauf rien

 

« La sen­sa­tion du corps, qui donc la présentera
sinon le fait lui-même en sa preuve éclatante ? »
De la nature, Lucrèce.

 

 

Une absence de monde

 

Ce à quoi peut pré­ten­dre une vie
entre ter­reur et barbarie
dans la mondialisation
de l’économie
compt­able de la technique.

Sans com­mence­ment ni fin :
on se croirait dans la vie réelle
sans y être.

Comme si rien n’était rien :
tout sauf rien.
Rien qu’une absence de monde
dans la servi­tude volontaire
et l’oubli halluciné.

 

Le temps infi­ni du fini

 

Ne rien faire :
être-là
dans ce qui à chaque
instant
ne cesse d’advenir.
Le temps infi­ni du fini.

Le repos éveillé
du feuillage
bruis­sant de la cour
et de l’eau jaillissant
et retombant
dans les grandes vasques
des fontaines
de la place voisine.

Le som­meil immédiat,
quelque part par là
avec toi, sans toi,
à côté de toi,
dans le cadre mondial
de l’Europe.

 

                                                                                                                                                    Surgissement

 

Des livres qui tombent
sur l’abat-jour
dans le silence de tes nuits.

Des livres qui te rappellent
à toi au hasard des librairies
et des bibliothèques.

Des livres qui se précipitent
sur toi,
du haut d’une étagère,
en plein sommeil.

Tu n’es pas seul,
cette main,
ce corps qui t’a déjà
tiré à soi.

 

 

Au cœur du spectacle

 

D’une pen­sée qui serait
encore
ruse de l’intelligence,
mul­ti­ple et diverse.

La parole et le cri
d’Artaud
au cœur du spectacle
de la mort lente.

La voix de Debord
con­tre la paralysie
de la mémoire
et la falsification
de l’histoire.

 

Ce qui l’emporte

 

Ce qui l’emporte
constitue
la pensée.

L’être et la parole
qui font que penser et être
sont le même.

 

 

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