Un filet des car­reaux et des cœurs pal­pite au-dessus de la Seine

 

Le filet des car­reaux et des cœurs pal­pite au-dessus de la Seine.
Nous vivons dans une mai­son qui coule du toit.
L’averse entre par les lucarnes à car­reaux et à cœurs,
il pleut sur le lit des enfants, sur ceux qui ne sont pas encore nés,
et sur les morts d’an­tan. Personne
ne veut faire face à la pluie.
À l’ar­rière-fond, nous enten­dons le raf­fut des sèche-cheveux.
Les locataires et les pro­prié­taires recherchent leurs lunettes
pour inspecter de plus près.
Ils ne voient rien de rien. Ils cherchent, pour voir la pluie.
Les enfants jouent tels des pois­sons sous la cou­ver­ture vert végétal.
C’est ain­si que par­fois la pluie arrive et elle insiste
sur ses mes­sages un brin
révo­lus. Elle s’en­roule dans le four comme un cheva­lier de feu,
la pluie pré­pare tout en sueur des spaghet­tis aux enfants.
Retournez ces vête­ments de vieil­lesse, tournez les visages,
nous brûlons.
Lorsque les dames refer­ment leurs trouss­es à maquillage,
l’air, envahi par l’ét­ince­lante pous­sière violette,
où, carpes mourantes et muettes, elles ouvrent leurs bouches,
est sat­uré d’une immen­sité de mots tus qui leur pèse dessus.
Le filet des car­reaux et des cœurs pal­pite au-dessus de la Seine
et il y a toi qui sais en extraire une musique, comme si tu dépli­ais une couverture.

 

 

Tra­duc­tion Stéphane Bou­quet et l’auteur
 

image_pdfimage_print